A l'Assemblée, tenue correcte exigée

Patrick Chesneau

   Elève remuant, Eric Ciotti tape de ses deux petits poings rageurs sur la table. En fait son pupitre à l'Assemblée Nationale. Au risque de passer pour un lascar de banlieue indiscipliné, il vitupère contre" le laisser-aller et le débraillé", " look " qui serait popularisé par les élus de la NUPE NUPESSE NUPS. Selon le député de la droite des LR, il y a un relâchement général des tenues vestimentaires sous la voûte du Palais Bourbon. 

   Et pour les députés conservateurs, nul doute, les coupables sont les mélenchonnistes de tout poil. "Ils sont vulgaires et dépenaillés" éructent-t-ils. Un cacique LR a même déclaré avoir vu pendant une récente intervention de l'élue LFI  Rachel Kéké, Raquel Garrido, placée juste derrière, "en train de remonter sa culotte". Dans le viseur à infra- rouge, un autre élu LFI.  Louis Boyard. Accusé d'être négligé à l'extrême, il concentre toute l'attention sur lui. 

   Trop fort le Boyard !

   Il y a donc avis de tempête sous les crânes à propos de ce dossier particulièrement épineux, on s'en rend compte : la dégaine, l'allure, le maintien, la mise et l'habillement des députés. Au nom de tous ses collègues dépités...devant un tel foutoir, Eric Ciotti veut rendre la cravate obligatoire à l'Assemblée. On ne sait pas si les parlementaires pourront la desserrer à la buvette. Sinon comment s'envoyer un godet derrière la cravate ? Faudra-t-il prendre le tour de cou de chaque député en préalable ? Raison de sécurité oblige. Comment éructer sans s'étrangler en séance de nuit ? Beaucoup sont des cols blancs dans la vie civile. Des cadres très comme il faut. Propres sur eux. Pas d'ouvriers, donc cols bleus en parcimonie. Les adeptes de la mode mélenchonista, auront-ils droit à des cravates à pois ? À rayures façon zèbre ?  Piquetées de feuilles de cannabis ? Je crie au flou !

   En toute logique, un député frileux ne pourrait pas arborer un magnifique pull à col roulé avec poche kangourou dans le dos.  Une clarification s'impose.  Aucune revendication non plus de la part du député des Alpes maritimes concernant les pieds. Les députés godillots seront-ils acceptés ? Singulièrement ceux du conglomérat macroniste Ensemble. Les députés seront-ils admis à faire le pied de grue dans la salle des pas perdus ? Les talons-aiguilles seront-ils autorisés quand il s'agira de tricoter des textes de compromis ? Les députés polynésiens pourront-ils venir en tongs ?

   Reste que cette affaire de cravate risque d'en mettre plus d'un dans l'embarras.

Ainsi, je pense qu'on devrait rendre obligatoire les crânes dûment garnis. Pas de scalp luisant comme un œuf. La lumière crue des projecteurs rebondit quand les débats sont retransmis à la télévision. Par exemple sur la chaine parlementaire. C'est l'effet miroir. Un crâne lisse fait réverbération. Le député voisin risque d'être ébloui et de s'emmêler les pinceaux au moment du vote. Appuyer sur la bonne touche est un droit garanti à chaque représentant de la nation. En cas de non cheveux, moumoute obligatoire. Pour les imberbes du caillou, la perruque. Ce serait bien le moindre des respects. N'est-ce pas Ciotti, dit le ratiboisé de la calebasse !!!  Et plus vite que ça !

   Alors le chauve sourit ? Ou la grimace a pris le dessus ?

  PATRICK  CHESNEAU

Commentaires

Toréador ?

OuiNon

23/07/2022 - 14:13

Il n'est qu'à considérer les Assemblées nationales des pays étrangers pour voir que la tenue vestimentaire n'y est pas négligée.
A l'Assemblée nationale française, le port de la cravate n'est que le symbole d'une tenue "correcte", eu égard au respect de la fonction de député.
La cravate n'y est pas importante en elle-même, mais pour ce qu'elle représente : une convention de respect mutuel.
Du reste, il n'en est pas question pour les femmes et l'on a vu à l'Assemblée des hommes sans cravate : des prêtres ont porté la soutane (dont l'abbé Pierre) et, avant l’indépendance des pays colonisés, les costumes traditionnels d’Afrique noire ou du Maghreb n'étaient pas rares.
En fait, ce qui interpelle, c'est moins la réaction d'Eric Ciotti que l'action des députés de la NUPES qui provoque cette réaction : la négligence affichée des conventions, vestimentaires ou autres, qui vaut à celles-ci une importance inattendue.
Eric Ciotti se moque donc de la NUPES avec sa cravate, comme le toréador excite le taureau avec un chiffon rouge. Et ça marche !

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