Catalogne : les indépendantistes de droite quittent le gouvernement de coalition

   La Catalogne, c'est où, ça ? s'exclameront certains (es) à la lecture du titre de cet article. Mais c'est loin de nous, réagiront d'autres. Sa pa zafè-nou ! décréteront les plus véhéments. 

   Sauf que l'exemple de ce "pays dominé", pour reprendre l'expression en vogue chez nos intellos, réduit à néant trois idées reçues profondément ancrées dans le crâne des Martiniquais. Premièrement, celle qui n'a de cesse d'évoquer les 7.000 ou 8.000kms qui nous séparent de la France et qui justifient que nous disposions d'un pouvoir local, autonome ou alors que nous devenions indépendants. Justification parfaitement idiote puisqu'il suffit de jeter un oeil deux minutes sur une carte du monde pour se rendre compte que la plupart, pour ne pas dire la quasi-totalité, des conflits entre pays sont des conflits...frontaliers. Il y a ainsi 0 (zéro) kilomètre de distance entre la Catalogne et l'Espagne, l'Ukraine et la Russie, le Tibet et la Chine, le Tigré et l'Erythrée, le Québec et le Canada, le Sahara occidental et le Maroc, la Corée du Nord et la Corée du sud etc...

   De plus, l'Internet a aboli les distances et quand un Martiniquais met sa carte bleue dans un distributeur, le système qui vérifie en deux secondes si son code est le bon n'est pas situé à Fond-Zombi mais à...8.000kms. Et si ledit code est bon, il peut retirer de l'argent en deux minutes. Donc, il serait bon que nos politiciens arrêtent de nous bassiner avec leur rengaine de la distance. Ce n'est pas parce que la Martinique est loin de la France qu'elle a besoin de s'émanciper !

  La Catalogne est frontalière de l'Espagne et veut s'en émanciper (cf. la carte qui illustre le présent article)

  Pourquoi revenir encore à la Catalogne, se demanderont nos lecteurs ? Eh bien, pour une deuxième raison : parce que ce territoire, qui se bat pour devenir indépendant, est dirigé par une coalition d'indépendantistes. Oui et alors ? dira-t-on. On a connu ça à l'ex-Conseil Régional de la Martinique et à la CTM qui lui a succédé. OK, les gars, sauf qu'il convient de préciser une chose : le gouvernement de coalition catalan est composé d'indépendantistes de gauche et d'extrême-gauche, d'une part et d'indépendantistes de droite, de l'autre. QUOI ? Des indépendantistes de droite, mais c'est quoi ce truc, écarquilleront les yeux, nos chers (ères) natifs de l'ile aux fleurs ? Ben oui, non seulement ça existe mais c'est même, à travers le vaste monde, la chose la plus courante.

   Il suffit de regarder notre continent américain : aucun d'eux n'a accédé à l'indépendance grâce à des indépendantistes de gauche. Quand Fidel  Castro prend le pouvoir en 1959 à Cuba, l'ile est indépendante depuis 1902. Quand Maurice Bishop, en 1977, en fait de même à Grenade, son pays est indépendant depuis 1974. Sur la terre ferme, en Bolivie et au Venezuela, Evo Morales et Hugo Chavez deviennent présidents plus d'un siècle après l'accès de leur pays à la pleine souveraineté ! 

   Il n'y a pas donc pas de lien logique entre désir d'émancipation et idéologie de gauche ou d'extrême-gauche.

   La Catalogne vient de nous en donner un exemple éclatant : la coalition d'indépendantistes de gauche et de droite qui la gouverne vient de voler en éclats. Et pourquoi ? Parce que les indépendantistes de gauche veulent "négocier" avec l'Espagne alors que les indépendantistes de droite exigent de cette dernière qu'elle respecte le référendum organisé en 2017 par la Généralitat de Catalunya (l'Etat autonome catalan) qui avait vu la victoire écrasante du "OUI" à l'indépendance. On se souvient que l'Espagne avait annulé ce référendum et écrasé les manifestations qui s'en étaient suivies avec une violence inouïe digne d'un pays colonialiste. 

 

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  Le chef du gouvernement catalan à cette époque, Carles Puigdemont (indépendantiste de droite) avait même dû s'enfuir en Belgique avec certains membres de son gouvernement où ils sont réfugiés politiques jusqu'à la date d'aujourd'hui. D'autres ministres furent emprisonnés et condamnés à de lourdes peines de prison. Depuis, ce sont les indépendantistes de gauche qui leur ont succédé à la tête de la Generalitat, ceux-là même qui veulent aujourd'hui "négocier" avec Madrid !!! 

   Venons-en à la troisième idée reçue dans notre chère Martinique : nous n'appartenons pas à la même "race" que ceux qui nous ont mis sous tutelle. Nous, on est des "Noirs" tandis qu'eux, ils sont des "Blancs". Or, il suffit là encore de jeter un oeil à la carte du monde pour se rendre compte que la quasi-totalité des conflits opposent des peuples de même "race" : Ukrainiens et Russes, Tigréens et Ethiopiens, Catalans et Espagnols, Tibétains et Chinois, Coréens du Nord et Coréens du Sud, Québécois et Canadiens, Pakistanais et Indiens etc...L'argument racial permettant de justifier notre volonté de séparation avec la France ne tient donc pas la route.    

   CONCLUSION : 1) la distance (8.000kms) n'est pas un argument pour justifier la nécessité de l'accession à la souveraineté ; 2) on n'a nul besoin d'être de gauche ou d'extrême-gauche pour être indépendantiste ; 3) ce n'est pas parce qu'on n'appartient pas à la même "race" que les Français que nous devons nous séparer d'eux.

   Le seul argument indépendantiste valable ou sérieux, si l'on préfère est celui : la Martinique est une Nation avec sa langue, sa culture, son identité, une Nation à part entière qui risque de disparaître à terme, minuscule qu'elle est, de se noyer dans le grand bain franco-européen.

   Voulons-nous persister dans notre être ou au contraire nous diluer définitivement ? 

   That is the question !

Commentaires

Ce genre de question nous intéresse au 1er chef

Frédéric C.

09/10/2022 - 11:03

En fait, et pour ne prendre que ces exemples, les demandes d'autonomie ou d'indépendance venant d'Ecosse, d'Irlande du nord, du pays basque (sud et nord), du pays de Galles, de Tchétchénie (n'en déplaise à Poutine!), de Papouasie-Ouest, nous concernent! Non pas pour copier bêtement, mais pour tirer des enseignements pouvant nous être utiles dans notre stratégie et tactique contemporaine. Pour les militants ayant un minimum de réalisme politique! Parce que c'est bien beau de fantasmer 24H sur 24 à propos de la Moncada, qui concernait un pays cent-dix fois plus grand que la Martinique, doté d'un arrière-pays physique immense dont nous n'avons pas l'équivalent, et dirigé par une dictature formelle et sanglante liée directement à la Maffia italo-américaine (Lucky Lucciano et Cie). Cela n'enlève rien au courage des révolutionnaires cubains, mais ce n'est pas transposable à la Martinique, qui est dans une situation très différente. En revanche, les processus entamés dans les pays susvisés (sauf peut-être la Papoua-Ouest) peuvent davantage nous inspirer. A moins de vouloir "prendre" la Préfecture, la DRFIP et les principaux établissements militaires de façon simultanée! Y a-t-il des candidats, ailleurs que sur le papier?

Alfred Marie-Jeanne est -il de gauche ?

Rose

10/10/2022 - 14:55

Excellent article de fond pulvérisant les habituels clichés présentant les valeurs de la "gauche indépendantiste" opposée à celle de la (méchante) droite" réactionnaire...Mais une question reste fondamentale : les valeurs de la "gauche " sont elles portées par tous les Indépendantistes? Prenons le cas du MIM ,parti indépendantiste s'il en est :s' il est vrai qu'il fut souvent présenté comme proche des petites gens ,le comportement de son leader emblématiques ,AMJ interroge
et est souvent plus proche de la droite y compris macoute que de la gauche !!! .A noter que la proximité avec les petites gens fut souvent revendiquée depuis toujours par la droite ,voire parfois l'extrême-droite. Pour s'en tenir à notre continent américain ,bcp de leaders d'extrême -droite se réclamaient du "peuple" et gouvernaient en son nom (Péron ,Vargas ,Trujillo ,Duvallier etc....) ; Se réclamer du peuple et "être" de gauche sont donc deux attitudes complètement différentes qu'il faut apprendre à distinguer. On peut se dire "de gauche " et être un parfait macoute...Quand on analyse les réactions politiques de AMJ ,on peut effectivement se poser la question: ne fut -il pas hostile à l'installation de rastas (porteurs de revendications identitaires ) dans la commune dont il fut maire ? ;Ne promit -il pas des coups de balata (symbole de répression ) à ceux qui n 'était pas d'accord avec lui ?,n'est il pas adulé par les petits entrepreneurs viscéralement partisans d'un discours que n'aurait renié ni Vargas ,ni Trujillo ,ni d'autres de même obédience ( l'effort ,le labeur , l'autorité , etc.....)…Mais il n'est pas le seul à "gauche" à être EN FAIT DE DROITE .D'autres forces totalitaires plus sournoises s'organisent peu à peu dans l'ombre .

GAUCHE ou DROITE?

Veyative

11/10/2022 - 08:24

Quand vous prônez l'indépendance d'un pays , il s'agit d'un changement de statut. Chez nous on classe à gauche tous les indépendantistes. Mais les termes de gauche et droite sont, elles , relatives aussi à la manière de gouverner.

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