Martinique : Congrès ou pas Congrès ?

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       Rien ne démontre mieux la dépendance totale de la Martinique envers la "Métropole" que les débats qui se déroulent en ce moment à propos du Congrès. 

       "Inutile !", clament les habituels aboyeurs de réseaux sociaux dont la seule expertise est justement d'aboyer. "Indispensable !" clament d'autres du haut de leur suffisance agrémentée de prétendues démonstrations de haute volée. "Nous exigeons d'y participer !" proclament enocre d'autres qui prétendent représenter "le peuple" lequel aurait faim de produits vendus exactement au même prix que dans l'Amère-patrie. "Nou sanfouté !" lâchent le plus grand nombre, d'aucuns préoccupés par l'ouverture des soldes, la venue de tel rappeur Bac-12 ou quelque énième concours de "Miss Machin".  

       Personne ou presque pour faire sereinement ce qu'il faut bien appeler l'analyse d'un désastre.

       OUI, D'UN DESASTRE PARCE QUE NOUS N'AVONS CESSE COLLECTIVEMENT DE FUIR TOUT CE QUI DE PRES OU DE LOIN NOUS PERMETTRAIT D'ACQUERIR UN DEBUT DE RESPONSABILITE.  La vieille Droite assimilationniste nous rejoue en ce moment son chantage au "largage" que l'on imaginait enterré depuis longtemps dans les poubelles de l'histoire. Elle feint d'oublier qu'elle a été au pouvoir local pendant les quatre décennies qui ont suivi la loi de Départementalisation/Assimilation de 1946 avec, entre autres les Emile Maurice (Président du Conseil Général), Victor Sablé (Député), Edmond Valcin (sénateur) sans oublier l'inénarrable Michel Renard. A cette époque, Fort-de-France était une sorte de citadelle assiégée où Aimé Césaire se voyait contraint d'accueillir les milliers des gens qui fuyaient la misère des campagnes suite à l'effondrement de la "société d'habitation". Cette Droite ne se demande pas pourquoi elle a été évincée à la fin du 20è siècle et en ces deux premières décennies du 21è. Pourquoi elle n'a ni président de CTM ni président d'agglo ni député ni sénateur et ne dispose que de 6 municipalités sur 34. Si le peuple avait été satisfait de sa gestion, pourquoi l'aurait-il mise de côté ? Alors, on va nous sortir la construction d'écoles, de routes, d'hôpitaux, de ponts etc...comme si au POUVOIR de tutelle qu'exerce la France sur la Martinique ne s'ajoutait pas automatiquement un DEVOIR de tutelle. Aucun pays ne peut laisser en abandon total une partie de son territoire ! OUI, beaucoup d'infrastructures nécessaires ont été créées mais cela relevait simplement du devoir de tutelle, pas de la charité chrétienne.

    Quant aux autonomistes (communistes, puis PPM), ils ne se demandent pas non plus pourquoi ils ont échoué à convaincre le peuple de la fiabilité de leur principale revendication alors même qu'ils remportaient victoires électorales après victoires électorales au point de réduire la Droite à la portion congrue. Pour les communistes, progressivement effacés du paysage politique, le mot d'ordre était celui de l'Autonomie "en conservant tous les droits acquis". Si cette revendication part d'un bon sentiment à savoir préserver les intérêts des masses populaires, dans la pratique cela est...impraticable. Emmanuel Macron l'a déclaré l'autre soir à l'Elysée lorsqu'il y avait reçu à dîner les parlementaires d'Outre-mer : toute accession à l'autonomie signifierait la non-application automatique dans nos territoires des mesures sociales en vigueur dans l'Hexagone. Suite à la démission de Césaire du Parti Communiste Français en 1946, c'est le PPM qui a repris le flambeau de l'autonomisme mais cela, hélas, de manière floue. Dans ses discours électoraux, le député-poète évoquait fréquemment les provinces italiennes ou les landers allemands en guise de modèle mais sans plus. En fait, le PPM n'a jamais produit de programme détaillé et donc chiffré de l'autonomie jusqu'à la date d'aujourd'hui. Et pour cause ! Cela signifierait, pour ne prendre que ce seul exemple, que les 40% des fonctionnaires pourraiennt ne plus exister. Beaucoup trop dangereux électoralement ! Sinon, le PPM a donné le coup de grâce à l'idée d'autonomie en janvier 2010 lorsque, pour des raisons électoralistes également, il avait appelé anbafey à voter "NON" à la consultation sur l'Article 74 qui aurait pu permettre à notre île d'accéder à un tout petit début de responsabilité locale. Cet Article 74, la Polynésie l'avait déjà adopté depuis longtemps et Saint-Barth, pourtant peuplée de Blancs créoles, avait voté "OUI" en 2010. Or, aucun de ces deux territoires n'est devenu indépendant depuis !!!

   Pour en venir aux indépendantistes, ils ont été aux commandes par deux fois : d'abord à l'ex-Conseil Régional, puis à la CTM. Qu'ont-ils fait pour permettre de faire avancer l'idée de pleine et entière souveraineté ? OOn se le demande ! Ils se sont contentés de gérer et de bien gérer l'existant, chose qui ne pouvait que ravir la tutelle fançaise puisqu'elle n'aurait plus à mettre la main à la poche pour renflouer les caisses comme c'était le cas auparavant à cause de la gestion systématiquement déficitaire de la Droite, puis des Autonomistes. Nos indépendantistes se sont cachés derrière un mot d'ordre farfelu : "Nous proposons, le peuple dispose". Ouais...Sauf que là encore, faute d'un programme détaillé et chiffré de l'indépendance, ledit peuple n'était pas du tout prêt à se débarrasser de la tutelle fançaise. Mais le plus gros problème des indépendantistes est qu'il n'ont pas réussi ni cherché d'ailleurs à convaincre le peuple d'une chose. Une seule : à terme nous risquons de disparaitre en tant que peuple. La goutte de café martiniquaise finira par se diluer complètement dans les millions d'hectolitres de lait franco-européen. Autrement dit, nous serons à terme les propres artisans du fameux génocide par substitution ! 

    On comprend mieux qu'avec cet échec de la Droite assimilationniste, des Autonomistes et des Indépendantistes pourquoi des mouvements de colère, pour la plupart fondés sur des revendications irréalistes, ont fini par envahir l'espace public et s'imposer dans l'esprit de beaucoup avec l'aide de cet outil terrible d'abêtissement que sont les réseaux sociaux. Comme croire que la boite de beurre fabriquée en Normandie pourra se vendre au même prix en Martinique et en...Normandie en dépit des 8.000kms qui séparent ces deux régions ? Pourquoi cette idée n'a-t-elle pas pris en Guadeloupe ? Parce que vivant dans un archipel, un Marigalantais ou un Saintois sait très bien que le prix des marchandises venues de la Guadeloupe, dont ces dépendances ne sont pourtant séparées que de quelques kilomètres, se voient automatiquement augmentés, certes de quelques centimes, cela à cause des frais de transport. Ce qui est logique...

   Alors, au final, Congrès ou pas Congrès ? 

   S'il permet de faire avancer la Martinique vers un PNL (Pouvoir Normatif Local), pourquoi pas ? Chose qui n'est pas difficile du tout à expliquer au peuple : si une mesure, un règlement ou une loi hexagonale est mal adaptée à notre réalité insulaire et tropicale, on la modifie ; s'ils s'y s'adaptent sans problème, on les accepte tels quels. RIEN DE PLUS ! On n'est même pas dans une quelconque autonomie mais dans le bon sens le plus élémentaire.  

   Sauf que tout cela est bien joli mais nous sommes entièrement dépendants du bon-vouloir du Pouvoir français. Et cela quel qu'il soit ou sera ! 

   La "ratière" de la Loi de 1946 s'est refermée depuis des lustres...

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