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L’accord “historique” de Bougival sur la Kananky va sans nul doute rejoindre les poubelles de l’histoire car la majorité du camp indépendantiste au sein du FLNKS va le rejeter.
Déjà, précisons que contrairement à ce que le pouvoir français et sa presse ont déclaré, les 5 membres de la délégation du FLNKS n’ont pas signé un accord à Bougival. A 5h30 du matin, en en-tête d’un texte discuté, ces 5 membres ont pris l’engagement de le ramener près de leur base et, il est vrai, de le défendre. Il en aurait été difficile autrement car le mandat de la délégation du FNLKS était connu publiquement. Il prévoyait un mandat pour avancer vers la souveraineté et même l’obtenir.
Quelques mots sur le contexte puis sur l’accord en lui-même.
Cette rencontre était en elle-même une victoire biaisée pour le camp indépendantiste. En acceptant de (re)discuter avec le FNLKS, le pouvoir français et les supposés “loyalistes” admettaient implicitement que les cris de victoire de Macron après le 3ème référendum n’avaient pas de sens et que le processus historique lancé par les Accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998) n’était pas terminé. En plus les injures de Darmanin traitant une partie des indépendantistes de mafieux ne semblaient plus d’actualité.
Il est évident que cette rencontre était la conséquence des émeutes de mai 2024 qui n’étaient qu’une riposte au passage en force du pouvoir colonial sur la question du dégel électoral (le FNLKS comme les précédents accords veulent que ce soit ceux désignés dans un accord de 1983 qui participent aux consultations sur l’avenir du territoire et non les nouveaux arrivants). Un peu comme 40 ans avant, il avait fallu briser les urnes d’une consultation imposée par Paris. Cela montre que sans réplique de masse, même violente, la France coloniale ne bouge pas.
Notons aussi que pendant ces émeutes, les extrémistes “caldoches” ont monté des milices qui ont tué de jeunes kanaks sans l’ombre, un an après, du début d’une sanction de la justice françaises. A l’assemblée nationale, le Haut Commissaire de l’époque (qui se nommait Le Franc, ce qui est le comble de l’ironie) en est allé jusqu’à nier leur existence en dépit de la documentation existant à cet égard. De même, dans la tribu de Saint Louis, on a purement assassiné des militants kanaks comme à Ouvéa. Dans le même temps, ce sont des dizaines de kanaks, en majorité des jeunes, qui ont été jugés et condamnés expéditivement dont près d’une centaine déportée en France, faute de place dans les geôles françaises sur le “caillou”.
En plus, une dizaine de responsable du FLNKS dont le président ont été arrêtés, mis en examen, déportés et gardés en prison pendant près d’un an. Aujourd’hui encore, il leur est interdit d’aller dans leur pays !
Christian TEIN que Macron avait reçu en Kanaky en juin 2024 a été interdit de négociations sous les lambris de l’Elysée et à l’hôtel de Bougival.
Voici comment la France négocie !
Elle impose en revanche dans les négociations en soutien à son refus de décoloniser une proche de Macron, ancienne ministre, qui n’a pas craint d’indiquer qu’on ne pouvait mélanger “l’huile et l’eau” et qu’il fallait instituer un développement séparé (cela s’appelle l’apartheid) en Nouvelle Calédonie !
Concernant le contenu de l’accord, il est clair que même sous l’apparence d’une nouveauté à savoir l’annonce de la création d’un état de Nouvelle Calédonie (sans qu’on sache s’il est dans l’état français, à côté ou en parallèle) avec une nationalité néo-calédonienne (liée à la nationalité française et non obligatoire) et même une reconnaissance internationale (mais sans pouvoir régalien sinon conditionné à une majorité introuvable des 2/3), ces accords de Bougival tourne le dos aux accords de Matignon et de Nouméa.
Ces derniers reconnaissaient le peuple Kanak en tant que peuple premier et visaient à mettre en place l’exercice de leur droit d’autodétermination, les Kanak ayant accepté à y associer ceux qu’on a appelé les “victimes de la colonisation”.
Or, dans cet accord, il n’est plus question de “peuple kanak” et de ses droits mais d’un “peuple de Nouvelle Calédonie” qui reste au sein de l’ensemble français.
C’est donc non seulement une violation du droit international (mais la France s’est toujours moquée du droit international quand il s’agit de ses colonies) mais un retour en arrière.
Il démontre que le pouvoir français, Macron ou un autre, n’a jamais su et ne sais pas décoloniser hors d’une situation de crise.
Notons que ces derniers temps, ce n’est pas seulement la colonie de Nouvelle Calédonie qui a intéressé le gouvernement français.
Le 30 juillet, le ministre des Colonies, Manuel Valls, a reçu une délégation d’élus guyanais de la CTG. Ce rendez-vous a été d’ailleurs tronqué car le ministre n’a pas voulu recevoir les représentants de la société civile associés depuis le début à l’élaboration du projet politique. Cela faisait deux ans qu’ils étaient en attente de ce rendez vous. Lors de son dernier voyage, Valls a refusé tout débat sur la question. C’est le maître qui prétend dicter l’agenda.
Le président de la CTG et le ministre ont signé un relevé de décisions le 30 juillet. En fait, il annonce un programme de travail qui sera soumis à Macron et une réunion en Guyane avec Valls. Pas de quoi fouetter un chat ? D’autant que le texte emploie un terme pour le moins ambigu : “Les participants reconnaissent la singularité de la Guyane et s’engagent à ne pas chercher à transposer des cadres institutionnels conçus pour d’autres territoires”.
L’imagination française (pour ne pas appeler un chat, un chat et un territoire une colonie) est sans limite aucune contre l’évidence). Va donc pour “la singularité”. Cela ne signifie rien !
Il serait étonnant que d’un tel processus, le seul territoire encore dépendant du continent sud-américain soit décolonisé dans le cadre de ce texte. On peut comprendre les doutes du MDES face à ce que le macroniste président de la CTG a bien voulu signer comme relevés de décisions.
Là encore, on est loin d’une démarche de décolonisations.
Rajoutons aussi la présentation au conseil français des ministres du 30 juillet d’un projet de loi sur un régime autonome pour la Corse. Face aux critiques de la droite réactionnaire et aux amendements du Conseil d’État (toujours égal à lui-même dans sa vision jacobine de l’administration française), le ministre Rebsamen (seul ex-socialiste récent du gouvernement actuel) a mis les choses au point en déclarant que ce projet ne signifiait pas la reconnaissance de l’existence du peuple corse, encore moins de la langue corse et du statut de résident, trois points historiques du mouvement corse depuis 50 ans. Ainsi, l’imagination étant sans limite, on ne parle pas de peuple ou de “singularité” mais de “communauté”, notion juridique sans trop de sens.
Bref, là encore, par rapport aux questions posées en 2022 par l’Assemblée de Corse, on est loin du compte. Il faut dire que le gouvernement bénéficie d’une division du mouvement nationaliste corse entre les autonomistes de Péa Corsica et les indépendantistes de Nazione. Ces derniers étaient prêts à une étape autonomiste et non que cela soit un projet final qui verrouille l’avenir. L’élue de Nazione a donc été la seule en 2022 à ne pas voter le projet originel. Lors des Journées Internationales de Corte, le porte parole de Nazione
Il semble que le gouvernement aura du mal à trouver une majorité pour soutenir et voter ce projet.
Mais en tout état de cause, il reste clair que ne reconnaissant pas le fait colonial et l’existence du peuple corse, ce projet ne peut être considéré comme une proposition de décolonisation de la Corse.
De ces trois situations de trois territoires colonisés (sur 8), on peut tirer ou confirmer quelques leçons.
Premièrement, conformément à son histoire, la France se refuse d’admettre le fait colonial et donc de son obligation découlant de sa constitution et du droit international à décoloniser.
Secondement, même quand elle est contrainte à admettre le fait colonial, la France entrave la mise en application du droit international. C’est encore le cas et depuis 50 ans aux Comores. C’est aussi le cas en Kanaky et en Polynésie. La France n’est pas neutre dans ces processus et s’appuie entre autres sur des populations françaises implantées sur place et ayant des idées extrémistes. Ce fut le cas avec les pieds noirs en Algérie. C’est le cas avec les caldoches en Kanaky. La colonisation de peuplement reste une arme coloniale!
Troisièmement, la France négocie que contrainte et forcée et sous le coup d’un rapport de force. Sans les émeutes de mai 2024, la question kanake aurait été rangée au placard. Sans la révolte de la jeunesse corse après l’assassinat de Colonna dans les geôles française, il n’y aurait eu de projet d’autonomie corse. Sans les mobilisations de 2017, la France n’aurait pas discuté sur le statut de la Guyane. Preuve que l’essentiel du combat est sur les sols nationaux et non dans les salons ou hôtels parisiens.
Quatrièmement, la France n’a pas de parole mais que des intérêts à défendre. Ce qu’elle a dû céder sous la pression, elle tente de le renier par la suite. Ce n’est pas un partenaire mais bien un adversaire.
Cinquièmement, tenant compte de ce qui précède, il faut tenter autant que faire se peut de sortir d’un face à face qui ne peut être que mortifère avec Paris. L’internationalisation du combat de la décolonisation est indispensable. La création du Front International de Décolonisation en janvier 2025 à Nouméa est donc une bonne chose et ce FID (qui concerne pas moins de de 10 territoires dont toutes les possessions françaises dans le Monde) doit rapidement parcourir les instances internationales (ONU, Non alignés, UA, CARICOM, AEC, etc...) pour obliger la France à faire face à ces violations du droit international. Tâche ardue et difficile mais nécessaire.
Pour terminer, notons que le ministre français Barrot s’est rendu le 28 juillet 2025 à l’ONU en réclamant avec emphase l’application du droit à l’autodétermination du peuple palestinien. Ce serait un “droit sacré” de vivre sur sa terre et de la contrôler.
SA KI BON POU ZWA, PA BON POU KANNA ?
Raphaël CONSTANT
Avocat Militant
Le 06/08/2025
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