Mettre en place une stratégie d’immersion linguistique dans toutes les communes pour revitaliser la pratique de la langue corse dans la société, c’est l’objectif du nouveau label « Cità è Paesi immersivi ». Sa création a été adoptée à l’unanimité, jeudi après-midi, en session de l’Assemblée de Corse. L’opposition nationaliste, qui adhère totalement à la démarche, a juste insisté sur la nécessité de moyens humains et financiers pour relever le défi de la survie de la langue. L’Exécutif prône le dialogue avec l’Etat et l’alignement du droit sur la pratique.
Sauver la langue corse et revitaliser sa pratique dans la société et dans tous les actes de la vie courante, c’est l’objectif de l’Exécutif nationaliste qui proposait, jeudi après-midi, à l’Assemblée de Corse, d’enrichir sa politique de revitalisation linguistique à travers la création d’un nouvel outil : le label « Paesi è Cità immersivi ». Ce dispositif innovant vise à fédérer, à l’échelle d’une commune, ville ou village, l’ensemble des acteurs avec le soutien de la Collectivité de Corse (CdC) autour de la mise en œuvre progressive et coconstruite d’une stratégie d’immersion linguistique. « L’immersion dans le système éducatif, mais l’immersion aussi dans la société. Nous devons avancer sur ces deux jambes », explique le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni. « Nous devons augmenter les moyens mis à la disposition des Corses pour renforcer la place de la langue corse dans la société. Ce label doit engendrer un mouvement collectif vers la langue corse dans la commune, le village, le lieu où l’on vit tous les jours. L’idée est de proposer à tous les villages de Corse de devenir des villages immersifs en mode naturel, selon une progression qui peut dépendre des moyens, de la volonté, de l’ambiance générale où s’inscrit l’action communale ». L’objectif est de généraliser l’usage de la langue corse à travers notamment son utilité sociale et économique et en jouant sur l’adhésion populaire, le soutien institutionnel et le capital d’attachement symbolique à la langue ancestrale.
Une langue à vivre
Plusieurs domaines sont concernés par ce label. Et Gilles Simeoni de lister : En premier lieu, l’éducation et la transmission dans tous les endroits où il y a des enfants, des scolaires ou des étudiants. Les services publics et l’administration avec le renforcement du bilinguisme dans l’accueil, les documents officiels, la communication institutionnelle et la signalétique « pour permettre à la langue corse d’être à égalité avec le français dans la vie administrative ». La santé, « parce qu’on sait que chez certains publics, notamment les anciens, l’aide médicale est plus facile quand on parle corse aux patients. Nous pensons qu’il faut renforcer les formations pour les personnels soignants pour qu’ils puissent parler corse aux malades ». Des formations également pour les pompiers ou les éducateurs sportifs. La vie économique et commerciale avec la signalétique, l’affichage publique, les devantures commerciales : « les restaurants peuvent avoir leur carte en corse, par exemple ». La toponymie où un gros travail a déjà été fait et bien sûr, la vie culturelle, sportive, associative, religieuse... « Notre rêve et notre combat est d’inviter à parler Corse et à penser en Corse, de la naissance jusqu’à la fin de la vie. Par exemple à Bastia, quand il y a une naissance, le livret de famille est entièrement en langue corse ». Sans oublier les traditions : « Il faudrait associer pas seulement les confréries, mais aussi les prêtres avec des messes en langue corse. L’évêque a beaucoup travaillé pour que l’Évangile soit traduit et que tous les actes religieux puissent se faire en langue corse. L’idée est de faire corps et de faire vivre la langue dans tous les actes de la vie des villages à travers aussi une forme d’émulation qui fait que la langue devient un jeu pour tous. Il s’agit aussi de mettre en relation de manière plus structurelle tous les acteurs qui sont sur le terrain et qui travaillent parfois de manière isolée. Tout en laissant une place à leur créativité et à leur imagination ».
Gilles Simeoni. Photo Paule Santoni.
Des communes pilotes
L’ambition du label est, donc, de devenir, à la fois, un outil de valorisation des initiatives locales de démocratisation de l’usage du corse dans la sphère publique et citoyenne, un levier d’appropriation et de transmission de la langue dans les pratiques sociales, éducatives et économiques, également un moyen d’émulation entre les territoires, favorisant le partage d’expériences et une dynamique collective autour de la langue et de la culture corses. L’Exécutif propose que certaines communes deviennent des sites pilotes. Le président Simeoni cite, pour exemple, Corti. « Les communes, qui veulent s’impliquer, peuvent servir de modèle. Par exemple, Corti est le lieu, peut-être l’un des derniers, où l’on entend parler corse dans tous les endroits de sociabilité de la vie de tous les jours. Je pense même que ça peut devenir pour les touristes, une manière d’aller à la rencontre d’une Corse plus vraie, avec une authenticité qui n’existe plus aujourd’hui dans toutes nos communes ». Une commune immersive sera, donc, un territoire où la langue et la culture corses seront visibles, vivantes, partagées et transmises. Les initiatives seront recueillies dans une charte qui fixera le cadre d’engagement des communes et définira les principes, les objectifs et les champs d’action qui permettront de donner une portée concrète et cohérente à la politique d’immersion linguistique et culturelle. L’idée n’est pas de réserver ce label aux villes, mais d’aller vers les villages qui n’ont pas l’ingénierie technique pour penser le bilinguisme, « La CdC pourra intervenir pour appuyer, soutenir et parfois pour financer », déclare le président.
Une coofficialité de fait
Afin d’assurer la cohérence, la transparence et l’efficacité du dispositif, sera créé un comité de pilotage composé de représentants de la CdC, des communes désirant adhérer à la charte, l’Université de Corse, des acteurs culturels et associatifs et des experts linguistiques. Ce comité aura pour mission de définir la charte et ses modalités d’application, d’élaborer un cahier des charges pour l’attribution du label et d’évaluer périodiquement le respect des engagements pris. « Nous proposons que la commission ad hoc de la CdC réfléchisse avec les maires et les associations pour définir une charte à trois niveaux de labellisation : un niveau de base, un niveau moyen, un niveau d’excellence avec une immersion généralisée dans toute l’île qui est l’objectif à atteindre », indique Gilles Simeoni. Le défi est aussi de financer la démarche et de l’assurer juridiquement. « On a assuré le bilinguisme et l’immersion dans le système éducatif public avec Scola Corsa qui a créé une dynamique d’enseignement. Avec cette nouvelle proposition, on cherche à dynamiser l’immersion dans la vie de tous les jours dans sa dimension sociétale pour arriver à une coofficialité de fait. On sait qu’une langue minoritaire comme la nôtre ne peut pas vivre si elle n’est pas arrimée à un statut officiel. La convention dans le système éducatif tient à une volonté politique et à la volonté et la personnalité du recteur. Elle n’est pas en cohérence avec la Constitution française, seule une tolérance administrative permet un enseignement bilingue et immersif ». La seule solution est de « changer les règles et donc de changer la Constitution ».
Véronique Pietri. Photo Paule Santoni.
La question du financement
La création du label, qui a reçu l’avis favorable de la Chambre des territoires, de l’Assemblea di a Ghjuventu et du CESEC, fait l’unanimité dans l’hémicycle. Le débat est bref. Seuls les nationalistes interviennent pour exprimer des inquiétudes sur le financement et réaffirmer que la langue corse est, pour eux, un combat historique. « Je partage l’ambition de donner une impulsion forte à la langue corse à partir des communes. Il ne faut pas partir de zéro, il faut partir du travail déjà fait, et il faut des moyens humains et financiers », estime Véronique Pietri pour Core in Fronte. Pour elle, le label ne doit pas « être seulement un instrument incitatif, mais doit être accompagné d’exigences fortes et pratiques car la langue corse est en péril. Tout ce qu’on peut faire par nous-mêmes, tout ce qui dépend de nos institutions et de nos choix, il faut le faire ». D’autant, ajoute-t-elle que « le bilinguisme éducatif montre la fragilité du système. Chaque petit pas pour la reconnaissance de la langue est tout de suite freiné par l’Etat. Nous voulons que ce label soit un instrument de reconquête car la langue ne vivra pas seulement de symbole, mais de pratiques ». Saveriu Luciani, pour Avanzemu, va plus loin : « Le vrai défi, c’est le colonialisme linguistique et culturel qui est toujours là. Dans certains lieux, le corse ne se parle plus. Parler corse, c’est une façon de vivre. Nous sommes dans un combat, face à un défi historique. On peut voter ce que l’on veut, prendre les dispositifs que l’on veut, comme avec la charte, mais la réalité est qu’on n’a pas les moyens de les porter. Que vont demander les maires ? De l’argent ! Il faut un budget. Le Pays basque dépense beaucoup d’argent pour la langue. Pensez au financement ! ». Et de marteler : « Le défi est plus que vital pour un peuple. La convention avec le recteur, il faut la stabiliser avec des objectifs précis. Il faut développer la formation à tous les niveaux et un réseau intercommunal avec des initiatives généralisées. Il faut mettre en place un rapport de force. La corsophonie se rétrécit parce que le système ne répond pas aux défis. Le Riacquistu a fait son œuvre, mais ne fait plus. Il y a une autre société corse, l’action de la CdC ne suffira pas ».
Le combat de tous
Le président Simeoni se réjouit de cette unanimité et du fait que la présentation du rapport, comme le débat, se sont déroulés entièrement en langue corse : « C’est la preuve que l’on peut parler corse, même s’il y a une décision de justice qui nous empêche de le faire. Je continue de penser qu’il faut le droit et la pratique. Il faut engager une discussion avec l’Etat pour que la pratique de la langue ne soit pas seulement cantonnée au système éducatif ». Il reconnait qu’il faut réfléchir au financement : « Certaines actions sont déjà financées. Il faut trouver de l’argent pour que les choses avancent. Il est important d’arriver à un certain niveau d’efficacité et à des résultats ». Il lance un appel à tous les Corses : « Nous nous sommes battus ensemble pour l’immersion dans le système éducatif. Il est important de se battre ensemble pour une société immersive. Connaître la langue, c’est un attrait majeur de cohésion sociale parce que la langue fait peuple. On ne pourra pas sauver la langue si on ne la met pas dans le travail et le quotidien, c’est un facteur de progression individuelle et collective ». Le rapport a été adopté à l’unanimité.
N.M.
Afin de protéger le site ("trop sérieux") contre "les imposteurs, les profiteurs, les squatteurs" Lire la suite
Woaaaw ! Je ne savais pas que je me situais à un tel niveau d'intellectualité. Lire la suite
....accordes tu tant d'importance à leurs commentaires et pourquoi investis tu tant de temps et d Lire la suite
Vous savez très bien que Fondas est fiancé en sous-main par des enturbannés du Golfe. Lire la suite
Je Con-fesse = vagin-séant....waaaah !!!! Génialissime .
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