L'IMMIGRATION, LE SEUL PROBLEME A RESOUDRE EN FRANCE ?

Fernand Fortuné

Deux définitions en exergue :

xénophobie n.f. Hostilité systématique manifestée à l'égard des étrangers

Racisme :Idéologie basée sur une supériorité supposée de certaines races, toujours prônée par ceux qui estiment appartenir aux races estimées "supérieures"

 

Altérité, Xénophobie, Racisme se sont invités dans la politique et ont été au centre de constructions théoriques ou idéologiques basées sur la couleur de peau (on invente les hommes de couleur en oubliant que le blanc est une couleur), la forme du nez, la religion, les accents, l'odeur de cuisine (sauf le couscous) et tout récemment (mais il faut se retenir de rire) le prénom.

 Ce prénom étranger ne serait pas interdit, mais relégué à la deuxième place. Ridicule. Ce qui compte c'est le ressenti et l'appartenance à sa culture et l'amour de son Pays.

Un des pires moments de la "Civilisation" occidentale fut la création au sein de l'Eglise catholique de l'Inquisition (1482) et la nomination du Grand Inquisiteur espagnol Torquemada. Non seulement les Européens se sont battus entre eux à mort pour défendre ou combattre le dogme, mais ils s'en sont pris (XIV et XVéme siècle) diaboliquement aux gens de religion israélite. Sous la contrainte et la torture, ces derniers se convertissent au catholicisme, deviennent officiellement des "Conversos", puis en cachette - revenant au fond de leur vérité- pratiquent leur shabbat. La pire des répressions s'abattait sur eux quand cela était découvert.

 

Alors, pour être un bon Français, un Patriote, un vrai Résistant qui entend les appels à défendre le drapeau et est prêt à mourir pour son pays, l'adoption d'un prénom chrétien ( religion qui vient du Moyen-Orient), n'est certainement pas le bon critère. Un prénom fût-il extrait du calendrier chrétien ne fait pas l'homme, ne crée pas une nationalité qui est mue par d'autres motivations et ressorts bien plus profonds. Bien entendu, dans "le projet prénominal" de société fortement médiatisé et que  20% des Français semblent approuver, il est surtout question de Mohammed ou de Sami ou de Abdoul ou de Fatima, dont la religion , cousine du Christianisme, reconnait Jésus et l'Ange Gabriel. Mais, n'oublions pas que beaucoup, sinon la majorité des pratiquants de la religion israélite, portent des prénoms qui n'ont aucun lien avec le label désiré. Et je ne parle même pas des prénoms issus de mythologies nordiques et germaniques, dont Wotan (Odin) est la principale divinité.

 

Il y a aussi ce problème du Grand Remplacement ([1] ). Plus près de nous, le Teuton fou et agité l'avait conçu pour agrandir le Deutschesvolk, et avait créé son concept de Lebensraum : concept justificatif d'une politique de conquête territoriale. Mais cette idée de "colonia" n'est pas si nouvelle. Tout l'Occident "civilisé" de la période dite des Lumières, a renoué avec cette idée romaine et a fondé et mis en place, avec l'accord des Papes -arbitres des partages- sa volonté de puissance pour obtenir un bouleversement du Monde, qui nécessitait, à cause de la misère, des famines répétées, des guerres de religion, une colonisation de peuplement, qui est en réalité une colonisation de Grand Remplacement.

Toute l'Amérique du Nord au Sud, les îles de la Caraïbe avec nous esclavagisés, une partie de l'Afrique, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et en grande partie la Kanakie sont la preuve incontestable de ce que peut être un Grand Remplacement. Ceux qui, aventuriers et bricoleurs de la politique et qui dans leur imaginaire bâtissent des politiques fantômes pour faire peur aux populations en brandissant la crainte de ce Grand Remplacement, savent bien de quoi l'Histoire a été faite. Ils savent que le Grand Remplacement, c'est la disparition de Peuples entiers et de leurs langues, l'écrasement de Civilisations et de Cultures millénaires, la perte de repères culturels, la désolation agricole, la famine, l'abrutissement des cerveaux, l'assimilation forcée à d'autres coutumes, voire à d'autres modes d'alimentation. C'est l'évangélisation dogmatique et violente, ce sont les villages rasés, la dislocation des familles et des patrimoines, c'est le travail forcé, c'est l'esclavagisation, c'est la division, c'est l'encouragement à la trahison. C'est enfin l'imposition, fusil et canon dans le dos, de législations de domination, de décrets d'annihilation de tout esprit et de décisions sauvages d'effacement de valeurs ancestrales.

 

Nous, "Civilisés jusqu'à la moelle des os" comme a dit Leo Viktor Frobénius", nous pourrions opposer  aux aventuriers revanchards et envieux, le retournement des deux proposition d'un dicton bien connu : "Tu ne voudrais pas qu'autrui te fasse, ce que tu lui as fait", ou bien avancer -sur un terrain mouvant- qu'il y a toujours un  "Retour de bâton". Mais nous ne le voulons pas. C'est la raison que nous devons leur imposer, leur opposer. Une raison qui épouse la vraie Histoire des Peuples, fût-elle douloureuse, et non une caricature de l'Histoire, dont on vole ça et là des bribes pour fabriquer des fables à faire un Peuple dormir debout.

Oui, comment un Peuple, 65 millions de citoyens français, qui porte en lui la force et la fierté de sa révolution de 1789 qui a aussi aboli l'esclavage, Peuple reconnu grand parmi les Nations, Peuple qui a connu Alésia, Waterloo et Vertières, certes, mais surtout Iéna, le pont d'Arcole et Austerlitz, la Commune et a inventé sa République porteuse aussi du projet de libération des autres Peuples asservis de la terre, comment ce Peuple, qui a deux mille ans, et qui, s'est relevé - grandement aidé par ses colonies- de deux guerres inhumaines, peut-il se penser si vulnérable et croire trop facilement et trop naïvement à des choses invraisemblables, comme à son agonie ?

 

C'est pourquoi, je propose de relire cet  article que j'ai écrit le 17 Mars 2007, publié dans Antilla,  et qui nous mettait en garde contre les pourfendeurs des valeurs de leur propre République. Et qui devrait nous mettre en garde contre les Nôtres, ceux qui ne savent pas que sans les luttes des combattants héroïques de Haïti, sans la Résistance de Delgrès et des Guadeloupéens, sans les efforts de Schœlcher dans le contexte de son époque, nous serions restés plus longtemps dans les chaînes, Nous qui n'avons pas eu de Mandela ou de Tchibaou, Nous qui n'avons pas fait grand chose de notable dans l'Histoire (si, une poésie puissante, d'extraordinaires analyses psychiatriques et des concepts philosophiques universels ) qui puisse être retenu comme exemple de libération, par d'autres Peuples.

 

FT FORTUNE

 

Ducos, le 16 XI 2021

 

 

 

 

 

 

LES BIENVEILLANTES

(Jonathan LITTELL)

(parution Août 2006)

Prix Goncourt et de l'Académie française

 

 

Du livre « Les Bienveillantes »,  au « Ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale »

 

 

Profitant des avions, des avant et après siestes, du train aussi, lors d’un récent voyage au Mali, j'ai lu en entier, je dis bien intégralement, le livre imposant de Johnatan Littel, " Les Bienveillantes", prix Goncourt et de l’Académie française.

Il faut tenir le coup et aller jusqu’au bout, car ce livre qui est un excellent roman - l'auteur sait raconter, sait enchaîner, sait faire durer le suspens, sait surprendre, sait recourir à l'Histoire- est aussi un livre terrifiant. Le héros, schizophrène assurément, fou sans doute, pervers, démoniaque, y est cynique, écoeurant à bien des égards, abject, égoïste, plein de suffisance et de morgue, plein d'une ambition démesurée qui passe par dessus les autres pour satisfaire son ego, toujours aux ordres, soumis, sans compassion. Et la culture musicale et littéraire immense dont il est le détenteur - un homme distingué et cultivé- si elle laisse échapper un sourire, car l'esprit ne peut que se réjouir- le temps d'un cillement- de partager les mêmes espaces de la pensée, ne parviendra jamais à dissiper l'odeur putride qui parcourt et empeste ce livre.

 

Dans ce livre sur la guerre hitlérienne, ce n'est pas tant l'antisémitisme qui nous surprend, ce n'est pas tant la solution finale et les camps de la mort qui retiennent notre attention: cette histoire édifiante est connue et se raconte chaque jour à la radio, dans les journaux, sur le net, à la télé et chaque mois dans un livre. Ce qui est nauséabond, c'est l'esprit de systématisation de l'affaire et les tentatives, jusqu'à l'absurde, de justification. Par exemple contourner de façon ambiguë l'impératif catégorique de Kant -sont cités: Critique de la raison pure et Critique de la raison pratique-  et ses valeurs morales pour en faire une base théorique de la solution finale. Cela signifie aussi peut-être que devant le doute -le doute fonde-t-il ici  l'homme, malgré lui?- il a fallu s'assurer que la philosophie pouvait aider, voire soulager l'esprit perturbé et le libérer de ses réticences, même en trichant avec elle.

 

Ce qui retient aussi l'attention, c'est la montée progressive, inexorable,  de l'administration qui gère l'identité nationale allemande. Là-dessus, le livre est bien fait et précis. Qui est le bon Allemand, qui fait partie du peuple élu, ce Deutschesvolk? Car pour définir un bon Allemand, il faut exclure les autres et inventer des critères même les plus ridicules, remonter des lignages les plus enchevêtrés, créer la catégorie de sous-hommes pour les stigmatiser, étudier et comprendre les métissages pour les exécrer et les exacerber, mesurer les degrés  de ces mêmes métissages pour mieux humilier, chercher leur ancienneté pour mieux avilir et rejeter,  transporter et déporter massivement pour rabaisser; s'appuyer sur les patronymes, le faciès ou autres critères physiques pour assassiner à tout va. Et tous les ethnologues, les historiens, les anthropologues, les savants, les journalistes allemands comme français ou d'autres peuples soumis au Führer, sont mis à contribution pour exclure, trier, vérifier, argumenter, chasser, donner les fondements scientifiques de la Solution finale. Car pour que les exécutants de ces basses oeuvres accomplissent leur devoir envers le Deutschesvolk et le Führer, il faut un cahier des charges, une réglementation précise, des statistiques ethniques, des circuits administratifs, des chiffres à recouper et analyser, du rendement. Si on tue un juif, un tzigane, un communiste, un nègre, un homosexuel, un handicapé, ce sera selon le règlement et sans état d'âme. C'est dire si une administration comme celle-là, avec ses ramifications tentaculaires,  a occupé les esprits au quotidien, a envahi jour après jour la société allemande tout entière, voire l'armée, prussienne dans l'âme et le commandement, laquelle armée, fut réticente à un moment au début de la guerre,.

 

Mutatis, mutandis, j'ai pensé à tout cela quand N. Sarkozy a annoncé son "Ministère de l'immigration et de l'identité française". Ce n'est pas anodin. Les conséquences seront incalculables pour la République et pour nous, minorité visible, le bon critère.   Il y aura un glissement insensible, progressif, inéluctable vers une bureaucratie omniprésente qui se voudra efficace dans la chasse aux minorités, avec force arguments et privations de libertés, car il faudra distinguer:

- le français de souche leucoderme des autres leucodermes européens ou autres, en situation régulière ou non

- pour les minorités visibles : Noir antillais français, de Noir africain français, Noir étranger régularisé et naturalisé, Noir en situation irrégulière etc...

- Arabe français, arabe régularisé, arabe naturalisé...Harki

- etc...

 

J’imagine un roman fiction comme « 1984 » de Georges Orwell : Il faudra donc en arriver aux étoiles. Je veux dire, pour paraphraser l'épisode du voile et de la laïcité, porter un signe ostentatoire de "mi-no-ri-ta-bi-li-té", pour acquérir ou non l'honorabilité de l'identité française.

Certains (je pense à certains antillo-guyanais) exigeront même de porter cette étoile pour être bien distingués des Autres. Car, on est toujours l’Autre de quelqu’un.

Mais ce n’est qu’une fiction : donc, cela n’arrivera jamais.

 

Les sondages montrent que les Français, à une forte majorité, d’une part se déclarent ouvertement racistes et d’autre part sont d’accord pour se protéger des allogènes et suivront le Comte Nicolaï Sarkozy de Nagy-Bocsa, sur cette pente-là. Mais l’Histoire les connait, quand ça bardera et débordera, personne n'aura jamais approuvé l'idée de ce super Ministère, comme après la guerre 39-45, personne n'avait approuvé l'armistice, personne n’avait soutenu le Maréchal Pétain. Tous Gaullistes dès le 18 juin. Allez, c'est vrai, et c’est heureusement bon pour le devoir de mémoire et l’honneur de ceux qui sont morts à Valmy, il y a eu beaucoup de résistants et quelques Justes. De bons Français de bon sens, des Républicains, il y en aura toujours, de vrais, qui seront toujours nos amis.

 

Fernand Tiburce FORTUNE

Ducos, le 19/03/2007

Martinique (Caraïbes)

 

[1] Pour la France, lire Maurice Barrès (1862-1923), Jacques Bainville (1879-1936), Charles Maurras (1868-1952), théoriciens en la matière et chercheurs de boucs émissaires responsables des malheurs français  (Juifs, Arabes,  Kurdes , Noirs et autres étrangers qui viennent dénaturer le sol français....)

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