Martinique : nos octogénaires sont en train de nous quitter

   Les sociologues appellent cela pudiquement "le renouvellement générationnel". C'est qu'en effet, toute une génération de Martiniquais nés entre 1940 et 1950 et donc désormais octogénaire ou quasi-octogénaire est en train de s'effacer. 

   Elevés pour la plupart à la dure dans une Martinique qui peinait à se relever des privations de la Deuxième guerre mondiale et du "Temps de l'Amiral Robert", ils et elles ont su résister à celles-ci pendant la deuxième moitié du 20è siècle et plus récemment, au chlordécone, au covid etc...puisque l'espérance-vie des hommes en Martinique tourne autour de 75-76 ans. Il n'est pas du tout sûr que la génération suivante__celle des actuels septuagénaires__fasse preuve d'une telle résistance.

   Beaucoup de ces octogénaires martiniquais qui s'en vont ont contribué, chacun dans son domaine (syndicalisme, musique, yoles, université etc.), à façonner notre île. Ils ont été porteurs d'une mémoire qui mérite d'être sauvegardée et transmise à nos jeunes trop souvent sans repères. On ne connait que les visages des plus célèbres d'entre eux mais il faut se garder d'oublier la masse des anonymes qui, jour après jour, a tenu le cap ou tjenbé larel comme on dit en créole.

   Honneur et respect pour elles et eux !

Commentaires

CHAQUE JOUR

Albè

06/01/2024 - 19:10

A cet âge-là, je suppose que chaque jour compte. Etre octogénaire c'est en fait se retrouver dans le couloir de la mort sans avoir été condamné par aucun tribunal. Et puis, tous ces morts égrenés quasiment chaque jour par France-Antilles et les autres médias, c'est anxiogène même pour les personnes n'ayant pas encore atteint ce grand âg que Régis Debray qualifie de "se retrouver dans la ligne de tir". A portée de main de la Grande Faucheuse n fait.

Oui, Albè, c'est anxiogène mais...

Frédéric C.

07/01/2024 - 08:50

... c'est la vie. Chacun d'entre nous n'est que de passage, une éphémère poussière. Montaigne (philosophe français du 16è siècle ayant condamné l'esclavage des Nègres, et auteur des "Essais") a écrit des textes nous permettant de nous accommoder de ce "scandale pour l'esprit" qu'est la certitude de sa disparition. Nous n'avons pas le choix, il nous faut "faire avec". A terme, nous sommes tous morts! Quand on voit tant de crétins "faire leur intéressant", cela a paradoxalement un coté amusant. Avant ou après moi, il/elle sera à l'état de légume faisant sous lui/elle. Cette perspective est une belle leçon d'humilité... En attendant, profitons de la vie au maximum, sans attendre que la faucheuse montre le bout de son nez... Rions!

Si mon commentaire a choqué certains...

Frédéric C.

07/01/2024 - 09:04

...j'en suis navré. Mais ces dernières années, ça a été une véritable hécatombe dans ma famille et des proches, et pas forcément des gens très âgées. L'un d'eux n'avait que 70 ans et n'a même pas eu le temps de prendre sa retraite.... Le Covid a tué au moins un ancien camarade de Fac, un autre (pianiste) est mort plus jeune que moi... Ça oblige à réfléchir, au-delà du caractère "anxiogène" évoqué par Albè.

BIZARRE !!!

Albè

08/01/2024 - 08:47

J'ai du mal à comprendre le sens de cet article même après l'avoir lu et relu. Car enfin, ce n'est pas l'âge qui définit quelqu'un mais ce qu'il a accompli MEME S'IL A EU UNE VIE BREVE. Fanon est mort à 36 ans, Vincent Placoly à 45 et Paulo Rosine à peu près au même âge mais ils ont "laissé une cicatrice sur la terre" (André Malraux) considérablement plus importante que nombre d'octogénaires.

Albè, parmi les divers points évoqués dans cet article...

Frédéric C.

09/01/2024 - 02:54

...il me semble en avoir relevé un très important pour l'avenir.. Toutes ces personnes aujourd'hui octogénaires et plus âgées ont contribué à façonner la Mque d'aujourd'hui dans des conditions très difficiles. Elles ont eu à se forger souvent elles-mêmes, dans l'adversité, dans un relatif dénuement par rapport aux générations qui ont suivi (notamment celles nées après 1946). Bien sûr, certaines étaient mieux dotées que d'autres, au fur et à mesure que l'on monte la pyramide société (concrètement, un petit- ou moyen-bourgeois de F.F.-Centre avait moins à "se battre pour la vie" qu'un coupeur de canne...). Mais dans leur masse, ces générations d'anciens et leurs prédécesseurs eurent à se battre et à transmettre. Cette "transmission" et notamment celle de cet esprit du "fòk goumen, fòk goumen touléjou", est-il sûr qu'elle se soit produite avec la même densité, la même force par les générations suivantes ? (Ceci n'est pas une apologie de la pauvreté, mais une hypothèse d'interprétation d'un point de l'article :) Car cela fait des décennies que l'esprit de solidarité s'étiole et de délite en Mque, alors que c'était une valeur fondamentale... Les aides sociales, indispensables, et parfois les "délices de la consommation à crédit", peuvent aider à faciliter les fins de mois, mais CONTRIBUENT à dvper une mentalité de "frime", à l'occidentale dans ce que l'Occident produit de pire, complètement "hors sol" par rapport au pays réel. Et aussi à l'individualisme forcené, au CHACUN POUR SOI quasi-généralisé! Et ce n'est pas propre aux générations ayant aujourd'hui 20 ou 30 ans : cela existait déjà dans les années 70 et 80 du 20è siècle, mais ça s'est considérablement accentué depuis 40-50 ans. De même que le trafic de drogue et d'armes... Qu'est-ce qui s'est passé ?... On peut se demander si ces générations d'octogénaires et plus âgés (élevées dans des conditions plus "dures") n'ont pas fait un travail de transmission des valeurs de travail et de solidarité qualitativement plus important que les générations suivantes... Bien sûr, il y a "l'évolution sociale", l'application progressive des lois sociales françaises (Sécu comprise). Mais il y a aussi l'éducation, la transmission de parents à enfants... Et quand on voit, parfois, le "n'importe quoi" politique, le goût des postures "radicalement indépendantistes" de certains qui sont ou furent fonctionnaires, l'irresponsabilité ayant débouché sur certaines manifestations (parfois hystériques) pendant la crise du Covid-19, etc, on se demande si la transmission d'éléments "de bon sens" n'a pas connu comme des "ratés", ceci étant un euphémisme. Et si cette hypothèse (que je crois déceler dans l'article) s'avérait exacte via des études de spécialistes (sociologues, historiens, psychologues travaillant en trans-disciplinarité), cela augurerait mal de l'avenir du pays, si aucun sursaut collectif ne se produisait. Mais comment pourrait se produire ce sursaut ? Pour que se produise ce SURSAUT et que beaucoup de Mquais "reviennent les pieds sur terre et arrêtent leurs délires", faudrait-il que l'ExtrDroite prenne le pouvoir politique central de l'"Ensemble Institutionnel Français", et montre son vrai visage raciste, hyper-répressif (lire entre les lignes le pgme du FN/RN) (beaucoup plus que sous Macron !), censurant systématiquement les opérations contraires au "grand roman natîonal (français)" qu'appellent de leurs vœux MLP, Zemmour et Bardella ? Donc intimidation musclée puis répression contre: 1)ceux qui commémorent le 22/5/1848, l'insurrection du Sud, 2)ceux qui condamnent Napoléon comme restaurateur dictatorial de l'esclavage (en Gpe), 3)Ceux qui condamnent Napoléon 3, chef de l'Etat français qui remit dans une large mesure en cause les espérances des anciens esclavagisés après 1848, au point d'avoir en Mque une sorte de régime intermédiaire entre un capitalisme sauvage colonial (ateliers durcis, régime du Livret, et autres mesures "phares" pro-békés prises par le gouverneur Gueydon) et l'esclavage colonial d'avant 1848... Ce ne sont là que des exemples... On en vient à se poser certaines questions "taboues"...

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