C'est le 23 mai 1848 que vous, les Békés, auriez dû avoir proclamé votre fameux "Vivre-ensemble".
Or, qu'ont fait vos arrière-grands-parents ?
Il vous suffit de vous plonger dans la presse de l'époque, celle du Saint-Pierre d'avant l'éruption de la Montagne Pelée notamment. Qu'y lit-on ? Ceci : "Les Noirs sont des Affricains qui doivent être rapatiés sur la terre de leurs ancêtres". Avec deux "f" à "Africains bizaremment... Donc si l'on comprend bien, les Noirs ont défriché la Martinique, ils y ont coupé la canne durant des siècles en tant qu'esclaves, ils ont récolté le café, ils ont travaillé comme charpentiers, maçons, ouvriers de distilleries et de sucreries mais vos arrière-grands-parents ont voulu leur dénier le droit de considérer la Martinique comme la leur. Ils y ont, ces Noirs, puis Mulâtres, Indiens, Chinois etc...inventé dans le même temps une langue et une culture pour pouvoir résister à ce déni d'humanité, une musique, une cuisine, une pharmacopée, une littérature orale etc...Certes, vos ancêtresà vous les Békés, ont apporté leur pierre à ce qui fut une véritable renaissance mais de manière marginale. Or, dans cette deuxième moitié du 19è siècle, après l'abolition donc, ils ont poussé le bouchon encore plus loin : alors qu'avant l'aboliton, toute personne née dans nos îles était désignée comme "créole" quelque soit son appartenance ethnique, ce terme signifiant simplement "né sur place", vos parents installés en France ont diffusé cette idée complètement fausse et farfelue suivante que les dictionnaires comme Le Larousse ont reprise :
"Créole : Blanc de pure race né dans les Antilles françaises".
Outre le côté comique de cette pseudo-définition (car elle signifie qu'il existerait des Blancs qui ne soient pas "de pure race" !), elle soulève en filigrane une question qui ne s'est posée qu'à l'Abolition en 1848 : à savoir qui est légitime en Martinique ? Qui est autocthone ou plus exactement néo-autochtone puisque vos ancêtres avaient massacré les Kalinagos ou Caraïbes ? Cette question ne se posait avant l'abolition puisque, réduits en esclavage, les Noirs n'étaient pas des citoyens. Même pas des êtres humains, juste du "bois d'ébène". Réponse de vos grands-parents après 1848 : "Ils doivent être rapatriés en Afrique ! La Martinique est à nous !". Ce faisant, vous n'inventiez rien du tout : vous cousins Békés des Etats-Unis avaient demandé exactement la même chose et une partie des Noirs américains qui avaient sué sang et eau dans les plantations de coton pendant des siècles fut effectivement renvoyée en Afrique pour y créer deux états artificiels sur le dos des Africains : le Liberia et le Sierra-Leone. On connait la suite, ces "rapatriés" se sont mis à dominer les habitants de ces territoires, y ont créé une élite déconnectée qui jusqu'à aujourd'hui parle une créole à base lexicale anglaise appelé le..."Krio". On connait aussi les guerres civiles que cette transplantation a provoqué, les Africains se révoltant contre ces néo-colons.
Donc, aux yeux de vos grands-parents, chers Békés, de 1848 à 2007, date de création de votre association "TOUS CREOLES", c'est-à-dire pendant près d'un siècle et demi, à leurs yeux, nous, les Noirs et autres, n'avions pas le droit de réclamer la Martinique comme étant nôtre !!! Nous étions des rapatriables en puissance si l'on comprend bien. Et puis, subitement, sans doute à cause de la publication de l'ouvrage Eloge de la Créolité en 1989, vous découvrez et déclarer urbi et orbi que..."Nous sommes Tous Créoles !". Sans blague ! Entre parenthèses, sachez que nous ne sommes pas spécialement attachés au terme "créole". Il peut être parfaitement remplacé par "Martiniquais", "Antillais" ou "Caribéen". Voire même "Wanakaérien" puisque le nom kalinago de la Martinique était "Wanakaéra". Cela ne nous dérange nullement car tout en étant attaché au précieux héritage de nos lointains ancêtres africains, nous savons qu'à l'aube de ce 4è siècle de présence sur la terre de la Martinique, nous sommes pleinement, légitimement, Martiniquais. Ce pays est nôtre car nous l'avons construit avec notre sueur et notre sang. Nous n'en partirons pas, ne vous en déplaise !
En fait, vous avez détourné le concept de Créolité tout comme Staline avait détourné le marxisme, tout comme François Duvalier avait détourné la Négritude en noirisme, tout comme Ben Laden avait détourné l'islam en fanatisme islamique. C'est le propre, hélas, de toutes les idéologies de se voir dévoyées un jour. Mais, sachez que nous veillons au grain : "Tous Créoles" ne représente ABSOLUMENT PAS le mouvement de la Créolité apparu à la fin des années 80 du siècle dernier car en plus d'être un mouvement de revendication linguistique et surtout culturel, il est aussi un mouvement de revendication politique. Et cette dernière est claire : la Martinique devra un jour ou l'autre accéder à la pleine et entière souveraineté. Tout le contraire donc de votre orientation politique !
Notre option politique signifie-t-elle pour autant que les Békés devront être chassés de la Martinique. Absolument pas ! Le slogan "Bétjé déwò !" n'est pas le nôtre. Simplement, vous qui n'êtes qu'1% de la population martiniquaise, devez comprendre une fois pour toutes que vous ne pouvez plus continuer à détenir l'essentiel des richesses et que vous devez accepter, comme l'ont fait sans rechigner vos cousins Békés de la Jamaïque (3% de la population) et de Barbade (5%), que la majorité de notre population doit pouvoir pleinement en bénéficier.
Vous devez l'accepter !
NB. Rions un peu : nous vous poposons un thème de débat pour l'une des prochaines conférences de "TOUS CREOLES" : Pourquoi, après, l'Abolition de l'esclavage, les Békés on-ils voulu faire rapatrier les Noirs en Afrique ? Vos intervenants pourront se rendre à la Bibliothèque Schoelcher et aux Archives Départementales, il y trouveront toute la presse de Saint-Pierre avant l'éruption de la Pelée. Et aussi au Centre des Archives de l'Outremer à Aix-en-Provence dont les documents sont (gratuitement) accessibles par Internet.
...et apprendre. Lire la suite
A mon humble avis un site-web n'est ni une bibliothèque ni une annexe de Google ou de Wikipédia, Lire la suite
...les références PRÉCISES des organes de presse et/ou ouvrages dont les textes racistes négropho Lire la suite
...en créole est indispensable, même si ça paraît difficile puisque nous avons tous été "alphabét Lire la suite
...mon "boulon en moins" vous remercie.
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Commentaires
Peut-on nous indiquer...
Frédéric C.
23/07/2025 - 06:34
...les références PRÉCISES des organes de presse et/ou ouvrages dont les textes racistes négrophobes cités sont extraits ? Non pas qu’ils soient à mettre en doute, mais pour les VOIR. Bien sûr, le fameux "Préjugé de race aux Antilles" de Souquet-Basiège donnait une idée de ce racisme, mais dans la forme c’était un peu "édulcoré", "policé"... Ici, c’est du brutal. Et ça fait lien avec des saloperies du même genre qu’on peut lire et entendre encore en 2025... Merci d’avance si un lecteur répond à ma demande./ Question en option : peut-on dire en 2025 que TOUS les békés sont aussi "suprémacistes Blancs" que ceux qui "torchaient" les brulots racistes et appelaient au "renvoi" des Noirs en Afrique ?... Dans leur dialogue improbable publié en ouvrage, Emmanuel de Reynal et Steve Gadet n’illustrent-ils pas que, à ce propos, et sous certaines conditions, "LES" békés ("les" = article défini!) ne sont plus tous sur la même longueur d’ondes? Une éventualité de début de piste d’entente "nationale" ne serait-elle pas envisageable, même si c’est une voie très étroite? Ce qui ne signifierait ÉVIDEMMENT PAS accepter n’importe quoi, comme un truc du genre "Tous créoles" que le rédacteur de l’article fait bien de rappeler, ou autre véglaj pseudo-"moderne"...
CONFUSION
Albè
23/07/2025 - 08:33
A mon humble avis un site-web n'est ni une bibliothèque ni une annexe de Google ou de Wikipédia, sauf s'il affiche clairement une vocation encyclopédique, ce qui n'est pas le cas de Fondas, me semble-t-il. Un site-web n'est pas là pour mâcher le travail que doivent faire les lecteurs ! Je dis ça sans animosité aucune envers Frédéric mais parce que c'est la quatrième ou cinquième fois qu'il fait ce type de demande en commentant tel ou tel article. Alors bien sûr, il fait appel aux lecteurs et non aux responsables du site, sauf que les lecteurs en question sont peu nombreux par rapport à ceux d'autres sites antillais.
Vous savez, Albè, j’aime bien chercher...
Frédéric C.
23/07/2025 - 09:26
...et apprendre. Parfois, par d’autres commentateurs je trouve des réponses (ou pistes de réponses) à des questions que je me pose. Si un commentateur aimable demande une information aux autres lecteurs et que j’ai des éléments, je tâcherai de les proposer. Certes, FK n’est ni une encyclopédie ni une bibliothèque, mais on y trouve des éléments très intéressants, des pistes de réflexion, même si on ne partage pas le point de vue de tel rédacteur... En l’espèce, après 1848 il y avait quand même pléthore d’organes de presse contrôlés par les gros békés de l’époque, à St-Pierre mais pas seulement. Les nostalgiques comme Codé n’étaient pas isolés (même si son koko l’a été: un bèlè a même passé l’événement à la postérité).