Autonomie alimentaire et bouleversement climatique

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   A la fin du 20è siècle, nombre d'analystes, communicants et autres beaux esprits avaient annoncé que le Nouveau Millénaire serait celui du triomphe de l'écologie ou plus exactement de la défense de l'environnement.

    A les entendre, si la première moitié du 20è avait vu l'avancée considérable du communisme à travers le monde et la deuxième moitié celle de la mondialisation capitaliste, ces idéologies seraient contraintes de battre en retraite face aux périls environnementaux qui menacent la planète. Le 21è siècle serait VERT ! Un peu partout à travers le monde étaient créés des ministères de l'écologie et des partis politiques se réclamant de cette dernière faisaient un tabac, notamment en France, en Allemagne, au Brésil et au Japon. Quant à l'opinion publique, elle se voyait contrainte de questionner les deux systèmes économiques dominants : le capitalisme classique et le capitalisme d'Etat (Rusie, Chine etc...). De plus, diverses catastrophes (tsunamis, inondations catasrophiques, sécheresses interminables, montée inexorable du niveau des océans etc.) venaient donner raison au discours écologiste. 

   Sauf que ce rêve écologiste s'est heurté frontalement à la Nature humaine. 

   Plus précisément la Nature humaine et son égoïsme, sa soif de "toujours plus", poétiquement désigné sous le vocable de "développement", a repris les rènes après avoir été un temps secouée par la défense de la Nature...naturelle. A notre minuscule échelle martiniquaise nous subissons de plein fouet les conséquences de cet aveuglement. Or, les préoccupations écologiques ont quasiment disparu du discours ambiant et, par exemple, le combat contre l'empoisonnement de notre ile par ce pesticide cancérogène qu'est le chlordécone a été démagogiquement accaparé par des groupuscules qui ont l'habitude de sauter sur n'importe quelle cause afin d'exister dans le paysage politique. Résultat : l'impasse. Quant au mouvement contre "la vie chère", il est, lui aussi, dans le "toujours plus" mais "au meilleur prix", ce qui lui vaut bien évidemment l'approbation de larges fractions de la population mais n'augure d'aucune remise en cause fondamentale du système en place. 

   Or, la Martinique est trop petite pour vivre dans "le toujours plus". 

   Toujours plus de routes, de voitures, de lotissements, de centres nautiques, de zones pseudo-industrielles (en réalité commerciales) etc...qui donnent l'illusion que "le pays se développe". Or, dans le même temps, nos politiques de tous bords se gargarisent de la notion d'"autonomie alimentaire" sans se rendre compte que celle-ci ne pourra jamais être, ne disons même pas "atteinte" mais "approchée", tant que l'économie de comptoir ne sera pas jetée bas. Celles et ceux qui pointent du doigt les Békés ces temps-ci ne proposent aucune alternative et en réalité veulent des Noirs à la tête des entreprises comme ils réclament un "Préfet noir". Jamais le système lui-même n'est rejeté ! Par exemple, jamais il n'est question de cesser d'importer massivement des voitures mais simplement qu'elles soient vendues moins chères au "peuple". 

   Il est vrai que remettre en cause le "toujours plus" n'est pas électoralement payant. 

   C'est ce qui permet aux adversaires de l'écologie de ricaner en disant que "le peuple songe davantage à la fin du mois qu'à la fin du monde". Autrement dit que son compte en banque à découvert dès le 5 du mois et sont frigo presque vide le 10 sont pour lui des préoccupations plus pressantes que la perspective d'un bouleversement climatique. Or, s'il est vrai que 60% de la population martiniquaise (30% qui vivent sous le seuil de pauvreté et autant qui vivotent avec des salaires indécents) est confronté à d'énormes difficultés quotidiennes, les défis environnementaux impactent directement de nombreux secteurs. Ainsi, l'actuelle abondance de pluied depuis des mois a quasiment ruiné l'apiculture et empêche la récolte de la canne à sucre laquelle aurait déjà dû commencer depuis presque deux mois. Sans même parler de son impact sur le tourisme alors qu'on est en haute saison. Avec l'Internet et les réseaux sociaux, tout le monde peut consulter les prévisions météo et un Européen qui veut du soleil préférera se rendre en Tunisie et au Maroc au lieu de venir en Martinique et en Guadeloupe pour ne pas subir un déluge quotidien. 

   La Nature nous rattrape. Nos plages se rétrécissent année après année, les constructions situées en bordure du littoral sont menacées par l'érosion, la ville basse de Fort-de-France n'existera plus dans trente ans selon les projections des chercheurs les plus optimistes. Il ne s'agit pas du tout de faire du catastrophisme mais de donner l'alerte : sans un pouvoir politique authentiquement martiniquais, nous ne pourrons pas faire face aux défis qui se dressent déjà devant nous. Ce n'est pas une question de plus de subventions franco-européennes, de marchandises importées moins chère ou de Noirs remplaçant des Blancs aux poste de responsabilité. Ce n'est pas ça du tout ! C'est une question de changement progressif mais radical de modèle économique avec comme mot d'ordre la notion de SOBRIETE. Il nous faut construire une société de sobriété et non persister dans celle de la surconsommation laquelle entraine inévitablement un gaspillage effroyable. 

   Et on en revient à la notion d'autonomie alimentaire dont se gargarisent nos élus (es). Sans une prise en compte sérieuse des questions environnementales, d'une part et sans un réapprentissage de nos habitudes culinaires, de l'autre, cela demeurera un discours creux. Flo comme un coco sec...

   NB. Non, il n'est pas du tout normal que la Martinique et la Guadeloupe soient les deux plus grosses consommatrices de champagne de toutes les régions françaises ! 

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Commentaires récents

  • On pensait qu'il n'y avait pas pire qu'eux...

    Difficile de savoir qui sont les pires!

    Frédéric C.

    18/04/2025 - 04:21

    Les Afro-Américains ayant voté Trump, avaient ils oublié QUE pendant son 1er mandat celui-ci avai Lire la suite

  • Est de la RDC: Félix Tshisekedi et Paul Kagame se sont entretenus au Qatar

    NE RIEN FAIRE ?

    Albè

    17/04/2025 - 12:00

    Qui a dit que les Antillais ne devraient rien faire contre telle ou telle ignominie qui se déroul Lire la suite

  • Est de la RDC: Félix Tshisekedi et Paul Kagame se sont entretenus au Qatar

    Réponse à "Qui dit qu'il.."

    pra

    17/04/2025 - 10:30

    Ainsi les antillais devraient laisser D’ABORD les Africains régler leurs problèmes de négrophobie Lire la suite

  • Est de la RDC: Félix Tshisekedi et Paul Kagame se sont entretenus au Qatar

    C’est en effet dommage, Prau...

    Frédéric C.

    15/04/2025 - 12:23

    ...que vous ne commentiez pas le sujet central de tel article de FK. Lire la suite

  • Est de la RDC: Félix Tshisekedi et Paul Kagame se sont entretenus au Qatar

    QUI DIT QU'IL...

    Albè

    15/04/2025 - 06:50

    ...n'y a pas de négrophobie au Maghreb ? Lire la suite