On la croyait morte et enterrée depuis des lustres, notre bonne vieille Droite assimilationniste, elle qui n'a guère été au pouvoir à l'ex-Conseil général et à l'ex-Conseil régional et qui, aujourd'hui, ne l'est pas toujours à la Collectivité Territoriale de Martinique.
Mais elle bouge encore et c'est un jeune homme de 35 ans qui l'a réveillée : Sébastien Lecornu, ministre de l'Outremer. Apparemment, nos assimilationnistes ne se sont pas rendus compte que la France, leur France chérie, n'est plus dirigée par des gens qui ont connu les guerres coloniales et qui, par conséquent, n'ont pas la nostalgie de "la France de Dunkerque à Tamanrasset". Nos assimilationnistes n'ont pas compris que le temps des De Gaulle-Pompidou-Giscard-Mitterand etc. est fini et que l'Hexagone est désormais dirigé par des jeunes. De très jeunes même : Macron, Attal, Lecornu, Veran et consorts. Alors que pour les dirigeants français d'autrefois, les mots "autonomie" et encore plus "indépendance" étaient tabous, ils ne le sont plus pour la nouvelle génération et c'est pourquoi, habilement, S. Lecornu a jeté un pavé dans la mare avec sa déclaration selon laquelle le gouvernement était prêt à discuter de la question de l'autonomie.
Cette nouvelle génération est donc sans états d'âme et parle chiffres avant tout. Intérêts économiques de la France au premier chef. Et quand elle jette un oeil à ces "confettis de l'Empire" que représente l'Outremer français, elle ne voit que deux territoires qui présentent un réel intérêt : la Nouvelle-Calédonie pour ses mines de nickel d'une part et de l'autre, parce que le centre de gravité du monde est en train de basculer inexorablement vers la zone Asie-Pacifique ; la Guyane pour son centre spatial qui est rentable à un double titre : la France y lance des satellites pour le compte de nombreux pays et sans Kourou, elle serait obligée de se rabattre sur Cap Canaveral (USA) ou Baïkonour (Russie) pour pouvoir lancer les fusées Ariane.
Mais notre bonne vieille droite assimilationniste antillaise, la géopolitique, elle ne connaît pas !
Elle vit dans le passé, agitant encore les vieux hochets de la colonisation : la Mère-patrie (ou la Métropole), le drapeau bleu-blanc-rouge, les Antilles "plus anciennement françaises" que la Savoie, Nice et la Corse, la participation des soldats antillais à toutes les guerres françaises de l'Expédition du Mexique de Napoléon III en 1862 à l'Opération Barkhane au Mali en 2021, "l'apport des artistes, écrivains et intellectuels antillais à la culture française" etc... Bref, tout un lot de vieilleries dont la nouvelle génération de trentenaires et de quadragénaires qui dirige aujourd'hui la France n'a que faire. D'ailleurs, si elle avait été au pouvoir à l'époque, jamais l'île de Mayotte n'aurait été détachée de l'archipel des Comores pour devenir un département français d'Outremer.
Alors notre bonne vieille droite assimilationniste lance une pétition pour à la fois dénoncer l'autonomie et exiger le retour de "l'ordre républicain". Quand on examine la liste des cent premiers signataires, on y découvre un nombre conséquent de Békés, ces derniers oubliant que 75 ans plus tôt, leurs grands-pères étaient opposés à.…l'assimilation. En effet, ces derniers n'avaient pas voulu de la loi de 1946, rapportée à l'Assemblée nationale par Aimé Césaire, qui avait transformé les quatre "vieilles colonies" (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion) en "Département français d'Outremer". A l'époque donc, la caste békée s'était opposée à l'assimilation ! Elle préférait conserver la semi-autonomie dont jouissait les colonies et qui, il est vrai, lui était profitable. Ses petits-fils, en pétitionnant aujourd'hui contre l'autonomie, nous obligent donc à inventer un nouveau proverbe créole : Bétjé pa ni mémwè...
Mais laissons de côté nos has been d'assimilationnistes et examinons la position de nos autonomistes et indépendantistes. Pour l'heure, du côté de ces derniers c'est silence-radio sur le pavé de Lecornu et donc nous nous intéresseront pour l'heure aux seuls autonomistes. Pour le grand parti de l'autonomie depuis trois-quarts de siècle à savoir le PPM, pour les syndicats, pour les intellos et autres faiseurs d'opinion : "Ce n'est pas le sujet !". Cette réaction à un nom : botter en touche. Ou, moins poliment, déguerpir comme des lapins. Le statut de la Martinique et la question de la souveraineté nationale est le cadet de leurs soucis et c'est à se demander si dans le fond, ils ne sont pas pires que les assimilationnistes. Car enfin, soyons un tant soit peu sérieux : le seul, le vrai problème de la Martinique c'est de savoir comment se débarrasser de la tutelle bientôt quadri-séculaire de la France. Ce ne sont pas le pouvoir d'achat, la vie chère, l'égalité ou le rattrapage avec la Métropole et autres fadaises.
Souvenez-vous, en février 2009, ils étaient 30.000 à défiler dans les rues contre "le pouvoir colonial" mais, moins d'un an plus tard, en janvier 2010, ils ont voté à 79% contre un tout petit début de commencement d'autonomie (Article 74). Les mêmes ont voté "NON" ! Bref...
Voici donc ci-après la pétition des assimilationnistes...
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Antilles : plutôt que de parler d’autonomie, rétablissons déjà l’ordre républicain ! Signons l’appel au Président de la République !
En 24h, vous êtes déjà plus de 1800 citoyens ultra-marins et métropolitains à avoir signé cette Lettre ouverte au Président de la République lancée samedi 27 novembre 2021 à 21h,, heure de Paris.
Inquiets par la situation insurrectionnelle, les signataires demandent à Emmanuel Macron de rétablir l’ordre en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Martin, de protéger et de soutenir davantage les soignants sur place, et d’organiser au plus vite un Grenelle des Antilles sur place.
Ces urgences priment, et de loin, sur de faux débats comme celui de l’autonomie.
La reprise des violences sur place dimanche, l’arrivée surprise de Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mer (alors qu’il avait annoncé la veille que sa visite n’était pas la priorité), la prise de position d’élus guadeloupéens demandant la visite d’une Délégation inter-ministérielle, rendent encore plus pertinente la démarche citoyenne et non partisane de l’Appel.
Signez, partagez et faites signez !
La Rédaction d’Opinion Internationale.
JE SIGNE L’APPEL
Monsieur le Président de la République,
Nous, citoyens français, ultra-marins et métropolitains, vous appelons à un sursaut pour reprendre en main la situation qui mine les Antilles et redonner espoir à leurs populations !
Depuis quinze jours, en fait depuis déjà juillet dernier, sur fond de recrudescence de la pandémie de la Covid, la violence monte inexorablement en Guadeloupe et en Martinique. Nous en sommes arrivés à un point de quasi-rupture. Les habitants se sentent en danger et vivent dans un véritable climat de guerre civile.
Des armes ont été volées, les réserves des douanes ont été pillées. L’insurrection semble organisée. Des émeutiers bloquent les routes, rançonnent les citoyens, pillent les commerces, brûlent les magasins, tirent sur les policiers, agressent les médecins et les empêchent d’aller soigner leurs patients. Des entraves illicites à la vie normale déguisées en grève générale (aucun salarié d’entreprises privées n’est en grève actuellement) ont été déclenchées la semaine dernière.
La situation pandémique reste extrêmement tendue sur place et les soignants, notamment dans les hôpitaux, sont exténués. Certes, l’annonce hier du report au 31 décembre de l’obligation vaccinale des soignants en Guadeloupe peut se comprendre. Mais le faible taux de vaccination fait craindre le jour où une nouvelle vague de la Covid déferlera sur les Antilles. Doit-on rappeler que la Covid ne fait pas dans la décentralisation. Le virus ne connaît ni les frontières ni les régimes dérogatoires à toute politique de santé publique digne de ce nom. Dans le monde entier, les gens se vaccinent ou aimeraient bien avoir accès au vaccin. Ce dernier n’empêche pas d’ailleurs d’utiliser des plantes et des médecines naturelles, complémentaires des remèdes issus de la recherche scientifique.
Monsieur le Président de la République, l’envoi de forces de l’ordre il y a quinze jours ainsi que votre prise de parole informelle lundi 22 novembre en marge d’une visite à Amiens, appelant au calme, et la réception d’élus ultra-marins par le Premier Ministre le même jour n’ont, hélas, pas calmé la situation.
Et voici que, prenant tout le monde de cours, le gouvernement se dit désormais « prêt » à ouvrir le débat sur l’autonomie de la Guadeloupe. Telle est l’une des annonces de Sébastien Lecornu, Ministre des Outre-mer, dans une adresse aux Guadeloupéens (la Martinique n’est-elle pas aussi en ébullition ?) prononcée dans le journal télévisé de Guadeloupe 1ère et relayée sur Internet vendredi 26 novembre au soir.
Monsieur le Président de la République, cette évocation de l’autonomie est perçue comme une concession inacceptable aux factieux ! Elle peut être interprétée comme une volonté de recul voire de retrait de l’État.
Cette idée de l’autonomie de la Guadeloupe aurait été formulée « en creux par certains élus locaux », au ministre des Outre-mer, selon ses propres dires. Pourquoi donner un tel crédit à des propos qui ne reflètent en rien l’opinion majoritaire des populations françaises des Antilles ?
Car, et c’est le plus rageant, cette chienlit qui paralyse les Antilles Françaises est provoquée par quelques ultras, radicaux et ultra-minoritaires, qui ne représentent en rien ce que pense l’immense majorité des Martiniquais et des Guadeloupéens. Les Antillais ne veulent pas plus d’autonomie, ils veulent de l’ordre, des emplois et des solutions à leurs problèmes du quotidien.
Et maintenant ?
Monsieur le Président de la République, l’autonomie n’est vraiment pas le sujet ni la réponse aux problèmes des Antilles ! La Martinique et la Guadeloupe disposent déjà d’une grande part d’autonomie. Les collectivités qui exercent le pouvoir local disposent de compétences qu’elles ont déjà du mal à assumer pleinement. Telle est la vérité !
La priorité, c’est de rétablir l’ordre, de faire lever les barrages, d’arrêter et de juger les malfrats qui sèment la terreur et bloquent les Antilles.
La priorité, c’est que l’État et les collectivités locales permettent à l’immense majorité des médecins et soignants ultra-marins qui appellent leurs coreligionnaires à se faire vacciner de poursuivre leurs efforts d’explication, de pédagogie et de prévention.
La priorité, c’est enfin, une fois la sécurité rétablie, d’ouvrir le dialogue avec les forces vives des Antilles autour d’une annonce claire, ambitieuse, apaisante que l’État et les collectivités locales pourraient porter ensemble.
Annoncer la création de mille emplois aidés dans le secteur non marchand, tel que l’a fait le ministre des Outre-mer, ne suffira pas à calmer la colère qui secoue les Antilles.
Mieux, nous proposons que l’État convoque un Grenelle des Antilles françaises qui réunirait, à Fort-de-France et Pointe-à-Pitre en même temps, toutes les parties prenantes pour affecter des moyens exceptionnels (tous les fonds du plan de relance post-Covid n’ont pas encore été employés) aux urgences les plus vitales des Antilles : la santé, l’eau, l’emploi des jeunes, le tourisme.
De même que les 87% des soignants vaccinés aux Antilles devraient peser plus dans vos décisions que les 13% qui ont refusé de se faire vacciner, de même arrêtons de tendre l’oreille à ceux qui, par la violence ou dans l’ombre, voudraient nous faire croire que les Antillais ne veulent plus de la France. C’est faux !
Ce qui se passe aux Antilles (la violence a aussi frappé Saint-Martin il y a un mois et continue à freiner le retour à la normale) concerne tous les Français et particulièrement tous les Outre-mer : la Guyane, La Réunion, la Nouvelle-Calédonie qui doit se prononcer une dernière fois sur son destin national le 12 décembre.
Le Général de Gaulle, lorsqu’il se rendit à Fort-de-France en 1962, eut cette parole émouvante et toujours valable aujourd’hui : « Mon Dieu, que vous êtes Français ! »
Monsieur le Président, à vous de jouer !
Il faut être un sacré farceur pour faire croire aux Martiniquais qu'un deuxième Cuba est possible Lire la suite
...toute la "classe politique" (qui n’est d’ailleurs pas une "classe sociale") sur le même plan ? Lire la suite
...ou ka trouvé tout diks-li, òben yo ka viré enprimé tou sa i fè-a vitman présé! Lire la suite
...À une époque pas si lointaine, l’adjectif qualificatif "national" était fréquemment utilisé po Lire la suite
ce sera très drôle! Lire la suite
Commentaires
Le bal des faux-culs commence
Tokyo
29/11/2021 - 10:43
La droite assimilationniste a sur ce sujet des alliés de choix qui ont déjà commencé à argumenter : les pseudo-indépendantistes
Attention !!!
Tokyo
29/11/2021 - 12:13
...de ne pas tomber dans le racialisme facile !!! Gros paragraphe sur les Békés. Mais ...ils ne sont qu'une fraction des Mquais prêts à vendre père et mère pour "rester Français". Et on découvre avec ahurissement que des militants "souverainistes" inattendus en constituent finalement les fractions restantes!!!!Mais ces derniers ont pour eux une arme absolue qui leur permet de ne pas faire repérer leur duplicité : le compère -lapinisme.
BEKES...
Albè
29/11/2021 - 17:35
Pour ma part, je ne vois aucune forme de racialisme dans le fait de rappeler que les Békés étaient contre la loi de départementalisation de 1946. C'est un fait historique mais bien souvent ignoré de la grande majorité des Martiniquais.
Devoir de mémoire.
MonOeil
29/11/2021 - 21:57
Historiquement, les Békés ont été autonomistes. Ils ne supportaient pas les représentants locaux de l'État. L'épisode du "gaoulé" est demeuré célèbre, où les békés ont renvoyé de force le gouverneur de la Varenne.
Après-guerre, ce sont les communistes, Aimé Césaire et autres progressistes qui ont demandé et obtenu la départementalisation, que les Békés ne souhaitaient pas.
La départementalisation acquise, les Békés s'y sont adaptés tandis que les départementalistes se sont diversifiés. Certains ont parlé d'indépendance, d'autres d'autonomie, tandis qu'ont subsisté des fidèles du département qui ont rejoint la droite.
Michel Renard est communiste quand il remporte la mairie du Marigot. Attaché au département, il ralliera le RPR.
Je ne sais pas si les Békés n'ont pas de mémoire mais les autonomistes ne se rappellent peut-être pas tous que leur chef emblématique a porté la départementalisation sur les fonts baptismaux.