Il n’aura pas échappé à celles et ceux qui sont authentiquement sensibles et vigilant-e-s vis-à-vis de toutes les formes d’inégalités Nord/Sud que, durant la crise du Covid, les habitants du Nord pouvaient rester de longs mois chez eux sans avoir à se soucier de leur rémunération, versée (directement ou indirectement) par l’Etat, alors que dans le Sud, rien (ou très peu) de cela n’avait lieu. Pourquoi cette énième inégalité ?
Est-ce dû à l’incompétence ou à la désinvolture légendaire des Etats du Sud, ou ceci est-il le symptôme d’une forme de domination pas assez reconnue : la domination monétaire, qui est le volet le plus vital de l’impérialisme, encore plus que le volet militaire comme nous le verrons plus loin. Cette inégalité avait été soulevée par Houria Bouteldja lors de son débat avec Bernard Friot au Havre en mai dernier, dans le cadre de la soirée Vers un communisme décolonial [1], or Bernard Friot, pourtant économiste, avait répondu en évacuant de la question d’Houria Bouteldja ce qui était pourtant bien le cœur de cette inégalité : l’impérialisme et les avantages exorbitants qu’il donne au Nord en toutes circonstances. Dans cet article, qui synthétise sous une forme que nous espérons accessible les principales idées de feu David Graeber, de Michael Hudson, et d’autres auteurs/trices sur ce sujet particulier, nous explorerons les fondements sains et moins sains des systèmes monétaires utilisés à travers les millénaires, ainsi que les évolutions perverses qui permettent aujourd’hui à l’Empire étasunien (et à un moindre degré l’Union Européenne), qui exerce une domination monétaire historiquement inégalée et inédite par sa nature, d’imprimer de la ‘monnaie hélicoptère’ (car parachutée à la populace en cas de coup dur comme lors de la récente pandémie) sans subir de conséquences à la hauteur du geste, alors que si les pays du Sud s’étaient amusés, eux, à suivre la même voie, leurs devises auraient subi des conséquences largement au-delà du geste (c’est-à-dire une forte dévaluation) dont il aurait fallu des années pour se remettre. Nous verrons aussi que, au-delà de l’impression d’argent magique en toute impunité, cette domination monétaire moderne a produit une nouvelle forme d’impérialisme – un super-impérialisme – aux ressources quasi-illimitées (car malheureusement financé par nous toustes, malgré nous) qui engendre un état de guerre permanente.
« Qui contrôle l’approvisionnement alimentaire contrôle les peuples; qui contrôle l’énergie peut contrôler des continents entiers; mais qui contrôle la monnaie peut contrôler le monde. »
Attribué à Henry Kissinger, criminel de masse, et occasionnellement Secrétaire d’État et conseiller à la sécurité nationale sous les administrations Nixon et Ford.
« Le dollar est notre monnaie, mais c’est votre problème. »
John Connally, Secrétaire au Trésor sous le président Nixon, en 1971.
Invention de la monnaie
Contrairement au mythe de l’invention de la monnaie pour sortir d’un système primitif basé sur le troc, la monnaie, définie comme 1) un moyen d’échange (sa fonction principale), 2) une unité de compte (ce qui permet de quantifier la valeur d’un bien ou d’un service contre lequel elle serait échangée), et 3) une réserve de valeur (c’est-à-dire que sa valeur se conserve dans la durée ; on verra plus loin que celles qu’on appelle aujourd’hui monnaies étatiques ne respectent plus ce critère), a existé de tout temps. L’or et l’argent (le métal précieux), qui respectent bien ces trois critères, ont été utilisés pendant au-moins 5 000 ans comme monnaies. Mais le troc ou la monnaie n’étaient pas nécessaires pour qu’une communauté prospère.
A titre d’exemple, dans la société ‘primitive’ des Six Nations Iroquoises amérindiennes, la majorité des biens étaient stockés dans des maisons longues (longhouses) et gérées et distribuées au sein de la communauté par des conseils de femmes [2].
D’ailleurs, l’idée d’économies primitives basées sur le troc n’a jamais été confirmée par l’anthropologie [3] et est donc un énième mythe du libéralisme (mythe inventé par Adam Smith, père du libéralisme économique, dans son ouvrage Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations), libéralisme qui a notamment servi à l’invention du domaine moderne et douteux qu’est la ‘science’ économique dominée par cette pensée libérale [4][5] qui permet, sous couvert de scientificité, de réduire le but de vies et de communautés entières à de simples échanges de produits et services, au point que les vies et les communautés sont elles-mêmes réduites à des commodités soumises au diktat de la rentabilité (un rêve bourgeois de contrôle sur tout, y-compris les vies), le tout sur fond de promesse de prospérité générale (qu’à ce stade beaucoup auront compris qu’il s’agissait bien d’une énième duperie de la Bourgeoisie). L’économie est le nouveau dieu qu’il faut vénérer via la religion du marché, qui justifie, via des contorsions de ses propres principes comme on le verra plus loin, l’asservissement de la périphérie du monde vis-à-vis des centres occidentaux colonialistes et impérialistes, centres qui font eux-mêmes à leur tour l’objet d’une subdivision entre centres et périphéries, avec la Bourgeoisie occidentale à la tête de cette chaîne parasitaire. Et le contrôle de la (fausse, car elle ne respecte pas le troisième critère comme on le reverra plus loin) monnaie en est l’arme principale.
Madagascar et les Malgaches en savent quelque-chose [6]: une fois le contrôle sur toute l’île assuré en 1901 par le général Gallieni, celui-ci imposa une taxe élevée sur chaque ‘tête’ (la France avait à cœur de faire payer aux colonisés le coût de leur propre colonisation), taxe qui était payable seulement… en francs malgaches, nouvellement imprimés, contrôlés, et mis en circulation par ce même colonisateur (l’obligation de verser les taxes dans cette nouvelle monnaie la rendait de facto, de jure, et surtout vi et armis, monnaie principale d’échanges, au détriment de toutes les monnaies préexistantes). Dès sa mise en place, cette taxe fut collectée juste après les récoltes, les locaux n’ayant alors d’autre choix que de rapidement vendre une partie de leur récolte pour obtenir la somme en francs malgaches nécessaires à la régler, ce qui soudain mit une importante quantité de riz sur le marché et provoqua une chute des prix (la bourgeoisie locale, des marchands n’ayant eux aucune de difficulté à régler cette taxe, y a vu une opportunité pour faire des affaires en achetant du riz au rabais) et força les Malgaches à se séparer d’une quantité d’autant plus importante de leur récolte, voire, pour certains à s’endetter auprès de ces mêmes marchands, qui sont au passage devenus des usuriers-tyrans: un scénario tellement classique.
La perversion et la soumission capitalistes ne s’arrêtèrent pas là : des documents internes de l’administration coloniale ont révélé une politique consistant à vouloir quand-même laisser aux indigènes suffisamment de revenus de côté pour qu’ils puissent s’offrir des ‘petits luxes’ modernes comme des parapluies, du rouge-à-lèvres, et des cookies pour les convertir à la nouvelle anthropologie consumériste et les rendre dépendants vis-à-vis de la Métropole coloniale [6].
Cette situation de domination monétaire se prolongea au-delà de l’indépendance officielle de Madagacar, mais en 1972, un important mouvement populaire (étudiants, lycéens, et travailleurs) de contestation des accords monétaires néocoloniaux avec la France a donné lieu à des manifestations géantes, et a culminé avec la démission du président Tsiranana, qui remit les pleins pouvoirs au général Gabriel Romanantsoa.
Ce dernier, patriote, négocia pendant une année (via son ministre des affaires étrangères Didier Ratsiraka) avec la France, qui finit par accepter le retrait de ses bases militaires de l’île, mais – chose intéressante à noter – pas la sortie de Madagascar du Franc CFA ! Comme c’est étonnant… et révélateur de ce qui réellement l’arme la plus puissance de l’impérialisme.
Devant ce constat, le 21 mai 1973, le général Gabriel Ramanantsoa déclare : « Nous préférerions rester pauvres, mais dignes, que nous agenouiller devant des richesses. »
Le lendemain, Didier Ratsiraka annonçait depuis Paris que Madagascar allait quitter le Franc CFA [7]. Ce choix coûta beaucoup à l’île en termes de turbulences monétaires (qui auraient pu être évitées si la France avait accepté un accord de sortie douce de Madagascar du Franc CFA), mais au final, elle s’est bien libérée du joug de la domination monétaire française.
Ironie de l’histoire, cette fameuse taxe fut appelée par Gallieni « taxe moralisatrice »…
Monnaie e(s)t dette (dans certains cas)
Il est communément admis que la notion de crédit, et donc de dette, est apparue bien après celle de monnaie, alors que les plus anciennes traces de l’existence de monnaies, qu’on retrouve sur des tablettes mésopotamiennes datant de 5 000 ans, mentionnent aussi les créances et les dettes des uns envers les autres.
Contrairement à la monnaie telle que définie précédemment avec les trois critères, la dette, elle, pouvait se pratiquer seulement entre personnes et entités d’une même communauté sur la base de la confiance (aspect important sur lequel nous reviendrons plus loin) : d’ailleurs, des « monnaies » (pas au sens stricte du terme, la troisième condition de réserve de valeur n’étant pas respectée) furent utilisées à partir d’objets sans valeur intrinsèque, leur caractéristique principale étant leur rareté et leur contrefaçon difficile ou impossible (par exemple, des communautés autochtones d’Afrique de l’Ouest, des îles du Pacifique, et de l’Amérique du Nord utilisèrent des coquillages particuliers comme monnaie d’échange).
Pour distinguer dans la suite de cet article les vraies monnaies de ces monnaies sans valeur intrinsèque, appelons ces dernières devises.
C’est ainsi qu’on pourrait considérer – un peu à tort – les billets de banque (dont la valeur intrinsèque est seulement de quelques centimes d’euros, même pour le billet de 500 euros), comme étant de la devise, alors qu’il s’agirait plus d’une dette de l’Etat envers le porteur du billet. D’ailleurs on les appelle monnaies (on dirait ici devises) fiat, le terme fiat (qui en latin veut dire ‘qu’il en soit ainsi’) indiquant qu’il ne s’agit pas de devises consensuelles, mais plutôt de devises imposées par un pouvoir politique.
Pourquoi imposées ? La confiance n’existe-t-elle pas entre le porteur du billet et l’Etat?
La réponse est évidemment : pas forcément (et même, pour tout-e citoyen-ne armé-e d’un sens critique minimal, rarement, l’Etat étant une entité pouvant être contrôlée à différents moments par différents individus plus ou moins honnêtes et fiables).
À défaut de cette confiance, comment les gens en vinrent-ils à accepter les billets – et aussi les pièces modernes, qui ne sont plus faites d’or ou d’argent mais plutôt avec des alliages à faible valeur, et n’ont donc plus de réelle valeur intrinsèque – comme moyen d’échange au quotidien, et même d’épargne?
Pour obtenir cette confiance, les Etats furent à leur fondement – un moment où le rapport de force n’était pas complètement à leur avantage – obligés de garantir que chaque pièce et billet qu’ils émettaient étaient échangeables sur demande contre l’équivalent en pièces d’or ou d’argent (le métal précieux) auprès du Trésor public : d’ailleurs c’est ce qui fut inscrit sur les billets eux-mêmes (voir l’image 1 ci-dessous).
Image 1 : Ancien billet d’un dollar, qui contenait encore la promesse de convertibilité “à la demande” vers une réelle monnaie (en l’occurrence l’argent)
Plus tard, et on verra plus loin dans quelles circonstances, cette même promesse disparut, comme le montre le nouveau billet contemporain d’un dollar ci-dessous.
Image 2 : Billet d’un dollar, ne mentionnant plus la promesse de convertibilité vers l’argent (métal précieux).
Naissance de la dette intergouvernementale
En tant que phénomène historique, la dette entre Etats est relativement récente car elle date de la Première Guerre Tribale Européenne [8][9].
A noter ici que le thème de la guerre, spécialité occidentale par excellence, est le principal élément qui a généré la situation monétaire internationale désastreuse dans laquelle nous sommes empêtrés [10], a fortiori depuis que cette logique de guerre est passée de moyen d’expansion impérialiste à une finalité capitaliste téléologique, autrement dit une nécessité de guerre permanente, comme la guerre que fait aujourd’hui l’Empire étasunien à la Russie en utilisant l’Ukraine comme proxy, et celle qu’il prépare contre la Chine, le tout pour faire d’une pierre deux coups: se débarrasser de concurrents menaçant son monopole de la domination, et les démanteler pour les exploiter à leur tour.
En effet, pendant cette première grande guerre, les nations européennes (la France, le Royaume-Uni, et l’Allemagne en tête) se sont lancées dans une guerre d’attrition dans laquelle elles ont placé toutes leurs ressources – y-compris industrielles – dans leur destruction mutuelle, au point où elles ne produisaient plus que des armes (même la nourriture était importée). Ceci les obligea à se ravitailler, à crédit (et c’est là que commença la dette intergouvernementale), auprès de leur allié naturel non-impliqué dans la guerre (et qui ne voulait surtout pas y entrer), les Etats-Unis, au point où ces pays ont transféré leurs réserves d’or (auxquelles leurs devises étaient encore adossées) pour régler leurs importations, essentiellement de l’armement, et aussi en guise de garantie.
Il est nécessaire de s’arrêter un instant pour souligner que, jusque-là, les Etats empruntaient seulement auprès de la Grande Bourgeoisie internationale, sauf que cette dernière n’allait pas financer des projets guerriers qui allaient détruire les actifs mêmes de ses Etats débiteurs – notamment l’outil industriel, qui était soit converti pour servir l’effort de guerre, ou alors mutuellement détruit – qui leur auraient permis d’avoir des revenus pour rembourser leurs dettes une fois la guerre terminée. Aussi, seul un autre Etat, les Etats-Unis, pouvait être intéressé de financer ces guerres, car il pouvait espérer en contrepartie exercer son pouvoir de créditeur pour soumettre les Etats belligérants, surtout que ceux-ci n’incluaient ni plus ni moins que les empires dominants du moment: une occasion (c’est le cas de le dire) en or.
Et au moment où cette guerre se terminait, ces Etats européens étaient en effet et sans surprise fortement endettés (la dette inter-alliés se montait à 28 milliards de dollars US en 1923, et la dette allemande au titre des réparations à 60 milliards de dollars, des sommes faramineuses pour l’époque) [11].
Ainsi s’étaient créées les conditions de la naissance de l’empire étasunien comme empire dominant, créancier des anciens empires désormais en déclin.
Cependant, la domination étasunienne par la créance n’allait pas permettre la transformation de l’empire étasunien en super-puissance: pour cela, il a fallu une autre série d’événements (dont une autre guerre tribale européenne) qui allaient progressivement créer les conditions d’une monstrueuse perversion historiquement inédite.
De Bretton-Woods au choc de Nixon :
Il a fallu moins d’une génération avant que les tribus européennes oublient leur promesse mutuelle du ‘Plus jamais ça’ et retournent à un état de guerre d’une barbarie atteignant des nouveaux sommets. Là encore, après la destruction et la mort de masse, la faillite fût au rendez-vous.
A la sortie de cette nouvelle guerre, où l’Empire étasunien démontra sa suprématie militaire sidérante à travers les bombardements nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki, il en a aussi profité (car il faut battre le fer tant qu’il est chaud) pour établir sa domination monétaire (en lieu et place de celle de l’empire britannique avec sa livre Sterling) à travers les accords de Bretton-Woods, qui ont entre autres décisions arrimé la totalité des devises dites ‘souveraines’ au dollar étasunien [12]. Cela constituait certes une cession d’une grande partie de leur souveraineté monétaire de la part de ces Etats, et officialisait le statut du dollar comme principale devise de réserve mondiale, car tous les Etats du monde devaient désormais avoir une réserve de dollars s’ils voulaient s’engager dans le commerce international (un peu comme les Malgaches étaient forcés d’utiliser la monnaie coloniale, le franc malgache), ce qui donna au dollar aussi bien l’utilité que l’aura lui permettant d’être robuste par rapport aux chocs – notamment la création monétaire brutale (sous la forme de ‘monnaie hélicoptère’) qu’on mentionnait en début d’article.
Mais adopter le dollar à l’époque n’était pas complètement suicidaire car il était encore garanti par les réserves d’or étasuniennes au taux de 35$ par once d’or, et donc au final cela voulait dire que toutes ces devises étaient indirectement adossées à l’or via le dollar.
Mais c’était sans compter sur les ambitions impérialistes du nouveau maître du monde, qui se lança dans le soutien financier et militaire du Sud Vietnam contre le Nord Vietnam communiste, puis dans une guerre ‘chaude’ dès 1955, guerre dans laquelle les Vietnamiennes et Vietnamiens, après avoir combattu et battu la France à un coût élevé, ont dû continuer à se battre pour leur liberté, cette fois-ci contre un ennemi avec encore plus de ressources.
Et l’Empire étasunien n’a pas lésiné sur les moyens pour tenter de battre les Vietnamien-ne-s, au point d’y liquider une grande partie de ses réserves d’or (alors que la quantité de dollars en circulation a elle plus que doublé entre 1945 et 1971, cf. la Table 1 ci-dessous), qui ont fondu de 20 338 tonnes métriques en 1945 à 8 740 tonnes métriques en 1964 lorsqu’il était évident pour tout le monde que ces réserves d’or étaient insuffisantes pour continuer à garantir la convertibilité (et donc la valeur) du dollar [13][14].
Table 1 : Evolution des réserves d’or des Etats-Unis, ainsi que de la masse de dollars en circulation, entre 1945 (mise en place de Bretton-Woods avec l’arrimage des devises du monde au dollar étasunien) et 1971 (année du choc de Nixon, avec le désarrimage du dollar étasunien par rapport à l’or). Il est clair que les Etats-Unis n’ont cessé d’augmenter la quantité de dollars en circulation post 1945 alors que leurs réserves d’or dégringolaient pour pouvoir financer la guerre au Vietnam (sources: World Gold Council, Banque mondiale, et Fonds Monétaire International, Réserve fédérale des États-Unis).
Nous pourrions penser que l’Empire étasunien décida cette année-là de sagement admettre sa défaite face au Vietnam pour arrêter l’hémorragie de dépenses guerrières, lui qui donnait des leçons de pacifisme civilisé aux nations européennes quelques vingt ans auparavant, mais ça serait sans compter sur la créativité (et la perversion) des élites yankee: au lieu de cela, le président Nixon décida, en 1971, de tout-simplement… affranchir le dollar de sa convertibilité en or (c’est ce qu’on appela le choc de Nixon) [15].
Autrement dit, le dollar étasunien – auquel étaient arrimées toutes les autres devises depuis Bretton-Woods – n’était plus raccroché à rien, sinon à la promesse de l’un (les USA) et à la foi naïve (et la volonté contrainte par la menace du recours à la force [16]) des autres.
Ceci eut pour effet – en plus de permettre à l’administration Nixon d’imprimer librement une importante masse monétaire pour financer 4 000 000 de tonnes d’explosifs et d’engins incendiaires largués sur les villes et villages d’Indochine [17] – de dévaluer le dollar (et le reste des devises nationales dites ‘souveraines’, qui elles aussi n’étaient pour le coup plus adossées à aucune réelle monnaie, ni directement, ni indirectement, ce qui a rapidement engendré une inflation des prix, en particulier par rapport à l’or, ce dernier atteignant 600$ par once en 1980. [18]
Ironie de l’histoire (spoiler alert: ça sera encore aux frais seuls des damnés de la Terre), cette explosion du prix de l’or créa un énième transfert de richesse qui bénéficia aux… usual suspects:les pays du Nord, les empires anciens et nouveau en tête (car ce sont eux qui détenaient l’essentiel des réserves d’or), qui ont vu la valeur de ces réserves d’or exposer, alors que les pays du Sud Global, du sous-sols desquels l’essentiel de cet or fut pillé, se sont retrouvés encore plus appauvris qu’avant [19].
Et comme dans la fameuse série 24 heures chrono, juste au moment où on pense que le drame ne pourrait être pire, on découvre que la perversion va beaucoup, beaucoup plus loin.
La fabrication de la dette comme carburant de l’expansion impérialiste et de la guerre permanente
“Ce qui a transformé les anciennes formes d’impérialisme en un super-impérialisme c’est que, alors qu’avant les années 1960, le gouvernement des États-Unis dominait les organisations internationales en vertu de son statut de créancier prééminent, depuis cette époque, il le fait en vertu de sa position de débiteur.” Michael Hudson, dans Super Imperialism, The Origin and Fundamentals of U.S. World Dominance
Le système mis en place par l’Empire étasunien après la Seconde Guerre Tribale Européenne, et accepté de facto par le reste du monde (mais avec quelques protestations suite au choc de Nixon), lui a accordé plusieurs privilèges qui en ont rapidement fait la super-puissance criminelle débridée et de masse que l’on connaît aujourd’hui :
– Le dollar US étant devenu la principale devise des échanges internationaux, il est aussi devenu – paradoxalement – LA valeur refuge, alors même qu’il ne bénéficie plus de la convertibilité garantie vers l’or depuis 1971,
– Le statut de principale devise d’échange a fait que les banques centrales des différents Etats se sont retrouvées avec une quantité plus ou moins importante de dollars résultant de leurs exportations de produits et services (dénominés forcément en dollars), ce qui a causé un problème aussi grave qu’insidieux : en laissant ces dollars s’accumuler dans leurs réserves, ces banques centrales contribuaient – quoique involontairement – à l’augmentation de la masse de dollars en circulation dans le monde, qui conduit mécaniquement à la baisse de la valeur du dollar par rapport à leurs devises nationales… et donc à la création d’un déséquilibre en faveur des exportateurs étasuniens (et à la défaveur des – souvent fragiles – exportations des Etats du Sud),
– Pour tenter de sortir de ce dilemme (qui est en réalité insoluble comme on le verra), ces banques centrales ont trouvé comme solution… d’acheter de la dette étasunienne, qui leur permettait d’échanger leurs dollars (et donc de les retirer de la circulation, baissant ainsi l’inflation du dollar) contre des bons du Trésor étasunien (un bon est une promesse de dette qui est émise par un Etat pour lui permettre de lever des fonds) [20][21].
Table 2 : Avoirs en Bons du Trésor US par les principaux pays du G20 (en milliards de USD).
A noter le renversement de tendance dès 2020 pour les pays du BRICS, qui souhaitent se débarrasser de la dette étasunienne après avoir compris son insidiosité.
– N’étant plus retenus par la nécessité de réserves d’or (imaginez une banque donnant à ses clients un accès illimité à des crédits, sans contrepartie que la banque pourrait saisir en cas de comportement délinquant des clients), et dans un environnement international assoiffé de dette étasunienne pour éviter une dévaluation du dollar, les gouvernements étasuniens successifs sont très rapidement devenus accro et ont très rapidement ‘explosé’ la dette (qui est passée de 34,6 % du PIB en 1971 à 120,2 % en 2023), dette qui a notamment permis à l’Empire de financer ses guerres expansionnistes (y-compris par proxy, en Palestine occupée et en Ukraine) qui endettent encore plus l’État et le Yankee moyen mais enrichissent massivement la Grande Bourgeoisie, détentrice de l’essentiel des actions d’entreprises de production d’armes comme Lockheed-Martin (voir le Tableau 5 plus loin).
Table 3 : Evolution de la dette étasunienne depuis le choc de Nixon (sources: Bureau du Budget du Congrès (CBO) des États-Unis, Banque mondiale, et Fonds monétaire international).
– La cyclicité du capitalisme, avec ses épisodes de ‘boom’ (tendance haussière) et de ‘bust’ (crise), fait qu’en période de ‘boom’ les profits vont essentiellement à la Bourgeoisie détentrice de l’essentiel des actions (1% des Yankees détient 53% de la valorisation boursière étatsunienne [23]); pendant les périodes de crise, comme lors de la récente pandémie dont nous parlions en début d’article, d’énormes masses monétaires sont créées pour sauver les banques et les grandes entreprises cotées en bourse (et donc indirectement la Grande Bourgeoisie), avec des miettes qui sont jetées aux citoyens-consommateurs lambdas, sans que cela ne provoque l’effondrement du dollar car son statut (frauduleux) de principale devise de réserve mondiale lui assure une robustesse inégalée,
– Sanctions: le dollar étant roi, l’essentiel des échanges internationaux transitent à un moment ou à un autre par des banques étasuniennes, qui peuvent bloquer telles ou telles transactions en fonction des instructions de Washington ; par ailleurs, le principal système de transferts internationaux, le SWIFT, est sous la forte influence des Etats-Unis; ces deux facteurs font que le dollar est devenu l’arme la plus puissante, mais aussi la plus insidieuse, de l’Empire, avec la possibilité d’exclure, du jour au lendemain et sans tirer un seul coup de feu, des nations entières du commerce international et donc de biens vitaux (500 000 enfants morts en Irak dans les années 1990 [24], et 40 000 morts au Venezuela entre 2017 et 2018 [25]),
– Last but not least, et en cohérence avec le facteur principal derrière l’addiction des Etats-Unis vis-à-vis de la dette qu’était la guerre, nous notons une croissance forte des dépenses militaires étatsuniennes post 1945, et naturellement une surperformance des actions des plus grandes entreprises d’armement étasuniennes, y-compris par rapport à l’indice S&P500 (qui lui-même a largement surperformé par rapport à l’inflation étasunienne et mondiale): la boucle est bouclée, et la Grande Bourgeoisie se porte très bien, merci.
Table 4 : Budget du Département de la Défense étasunien, aussi appelé Pentagone (source: Département de la Défense des États-Unis).
Table 5 : Performance des actions boursières des principales entreprises d’armement étasuniennes (quatre premières colonnes) comparée à celle de l’indice boursier étatsunien S&P500, partant d’une base 100 en 1945 (sources: Département de la Défense des États-Unis, le Congressional Budget Office (CBO), ou encore les publications du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI))..
Ce système on ne peut plus pervers fait que ce qui aurait dû être une faiblesse de l’économie étasunienne (son déficit commercial chronique et croissant essentiellement en raison de ses guerres impérialistes sans fin) est devenu une arme sans égal : ainsi a été créé un système de domination d’une échelle et d’une nature inédites, les exploités étant des Etats entiers dont dépendent des millions, dizaines de millions, voire centaines de millions d’humains à chaque fois, qui sont dominés non-plus sur la base de la créance mais de la dette. Ces États sont tenus par l’Empire à produire ni plus ni moins ce que ce dernier souhaite, et dans la quantité souhaitée (les règles du libre marché s’imposant seulement aux autres, comme nous l’avons vu récemment avec les barrières douanières ciblant les véhicules électriques chinois), au risque de le voir imprimer encore plus de dollars pour jeter les autres devises – et leurs économies respectives – dans le chaos de la déstabilisation monétaire et l’appauvrissement (via la dévaluation de la valeur des bons du Trésor états-unien qu’ils détiennent) ; voire à les sanctionner économiquement, ou carrément envahir leur territoire pour le contrôler et l’exploiter (comme c’est la cas présentement en Syrie).
Où va-t-on ?
A ce stade, il sera évident à chacune et à chacun que, grâce au mécanisme d’une perversion inégalée dans l’histoire de l’Humanité qu’est la domination par la dette décrite ci-dessus, la Bourgeoisie étasunienne a réalisé le fantasme de toute bourgeoisie de tout temps : avoir le monde à ses pieds non-pas pour emprunter auprès d’elle mais… pour lui prêter, potentiellement indéfiniment. Le maitre de la plantation n’a plus besoin de tenir l’esclave par la dette : c’est ce dernier qui perçoit comme étant son meilleur intérêt (ou en tout cas la solution la moins dommageable pour lui) de prêter ses économies… à son maitre, pour qu’il agrandisse et renforce la plantation. La plantation est abolie, vive la plantation 2.0 !
Cette Bourgeoisie est parvenue à enfermer le reste du monde dans une logique qui fait que c’est lui qui finance sa propre exploitation et destruction via la machine capitaliste-impérialiste, ce qui est le rêve de tout colonisateur et impérialiste, jusque-là mis en application seulement à une échelle locale comme nous l’avions vu avec l’exemple de la France à Madagascar.
Le choc de Nixon a aussi engendré le risque moral ultime du capitalisme : celui de la création monétaire affranchie de toute contrainte vis-à-vis du monde réel, et les effets ne se sont pas faits tarder, avec l’émergence d’une finance débridée et dérégulée depuis le début des années 1980, et de puissantes entités que sont les banques et fonds d’investissement comme Goldman Sachs et BlackRock, brassant chacun des milliers de milliards de dollars par an, sommes phénoménales au point que ces entités se sont mises à attaquer (c’est le terme consensuel) des devises nationales, ce qui a eu comme conséquence de jeter des centaines de millions de vies dans la misère [26].
Autre conséquence sordide du choc de Nixon, l’explosion de produits financiers débridés, nouvel Eldorado qui a lui enfanté les Golden Boys, des jeunes hommes aux dents longues cherchant un enrichissement rapide sans aucune place pour la moralité [27], dont certains, comme Emmanuel Macron (qui s’est lui enrichi dans les fusions-acquisitions, dont l’objectif principal est de fusionner des grandes entreprises en mettant à la porte des employés par dizaines de milliers pour augmenter les profits, et a au passage gagné autour de trois millions d’euros en moins de trois ans), ont aussi eu des ambitions politiques après leur passage par la grande finance et avoir ‘sécurisé’ leurs finances personnelles, avec les effets de leurs politiques que nous constatons (sans réelle surprise sachant leur appartenance de classe et leurs motivations psychopathiques).
Une autre ‘innovation’ de la finance débridée, les produits dérivés, dont la taille est inconnue pour la simple raison que les montages créés sont tellement complexes, voire frauduleux comme l’a montré la crise des sub-primes de 2008, que personne ne peut réellement les quantifier.
Ce qui est par contre sûr c’est qu’ils sont tellement significatifs qu’ils représentent une part importante du PIB mondial [28] : autrement dit, le jour où une part importante de ces produits dérivés s’effondrera, l’économie réelle ne suffira peut-être pas pour absorber les pertes qu’ils vont engendrer (et qui seront à n’en pas douter là encore ‘socialisées’, contrairement aux profits).
Mais plus encore que la finance débridée, la capacité de l’empire étasunien à financer des conflits extrêmement onéreux (nous parlons désormais de centaines de milliards de dollars par an comme l’indiquait la Table 4) sans conséquences négatives pour ses finances et son économie (au contraire, comme nous l’avions vu précédemment dans la Table 5 avec la surperformance des actions des grandes entreprises d’armement), malgré les centaines de milliers de morts par an [29], constitue le volet le plus terrifiant de cette histoire, a-fortiori sachant que l’Empire se sent menacé, à juste titre d’ailleurs car il arrive probablement à la fin de son règne, ce qui le rend plus agressif vis-à-vis de la Russie, qu’il souhaite balkaniser, démanteler [30], et soumettre à son diktat (comme il avait commencé à faire sous Boris Eltsine) avant de s’attaquer à la Chine, de préférence à travers des territoires et nations proxy (l’Ukraine côté Russie, et Taiwan et l’Australie côté Chine), car envoyer des soldats yankees se faire massacrer n’est pas viable comme l’Histoire le montre.
Et oui, pour ceux qui commencent à s’en douter, vous avez raison : nous contribuons toustes de façon importante, du simple fait de notre appartenance – malgré nous – à ce système diabolique, au financement du massacre de nos sœurs et frères en Palestine, en Ukraine, et ailleurs, aussi bien via la taxe que nous versons à l’Empire à chaque fois qu’il émet de la dette nette que nos Etats respectifs (que nous finançons) achètent, qu’en raison de notre financement massif de nos bourgeoisies respectives depuis maintenant 50 ans, pendant lesquels les gains en productivité du travail ont servi exclusivement à augmenter les profits du capital (voir graphique ci-dessous).
Graphique montrant l’évolution de la productivité et des salaires entre 1947 et 2004 (source : Graeber, David. Debt, the first 5,000 years (éd. 3), p. 471).
Bourgeoisies qui elles aussi s’en vont acheter de la dette étasunienne, un investissement sûr et (en ce moment) très rentable car les taux d’intérêt sont élevés.
On pourrait se rassurer (faussement) en se disant que ce système ne peut pas durer longtemps, et qu’on n’a qu’à attendre patiemment qu’il s’effondre, mais la triste réalité est que Rome ne s’est pas effondrée en un jour, et ce système (aux mains des Etats-Unis aujourd’hui, possiblement d’une autre puissance demain) peut perdurer encore longtemps.
D’ailleurs, feu l’anthropologue David Graeber pense que, depuis le choc de Nixon, l’Humanité est entrée dans un cycle monétaire historiquement inédit qui pourrait durer plusieurs siècles.
Il pense aussi que la sortie de ce système dépendra du rapport de force qu’on pourra instaurer collectivement : « Pour commencer à nous libérer, la première chose que nous devons faire est de nous voir à nouveau comme des acteurs historiques, comme des personnes capables de faire une différence dans le cours des événements mondiaux. C’est précisément ce que la militarisation de l’histoire tente de nous retirer.
Même si nous sommes au début d’un très long cycle historique, il dépend encore largement de nous de déterminer comment il va se dérouler. » [31]
Mehdi Taileb
A suivre
Dans le prochain article, nous tenterons de dresser une esquisse des solutions possibles pour sortir de cette situation dramatique.
Références :
[1] Voir https://www.youtube.com/watch?v=mxPf0wbuDVA&t=3983s
[2] Graeber, D. (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3). Melville House Publishing.
[3] Chapman, Anne (1980). Barter as a Universal Mode of Exchange: A Perspective from New Guinea, Mouton Publishers.
[4]D’ailleurs beaucoup d’économistes finissent par se rebeller et critiquer de façon radicale ce domaine dans sa doxa officielle, voire par le quitter pour aller faire des choses sérieuses.
[5] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 48.
[6] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 68.
[7] Pigeaud, Fanny, et Sylla, Ndongo Samba (2018). L’arme invisible de la Françafrique: Une histoire du franc CFA. Paris: La Découverte, p. 86.
[8] Désignation juste par feu le professeur Niouserrê Kalala Omotunde de ce qui est communément appelé Première Guerre Mondiale par l’Occident, car ce dernier aime bien s’attribuer les accomplissements humains et mondialiser ses propres désastres, un peu comme le capitalisme privatise les profits et socialise les pertes.
[9] Cependant, n’oublions pas que la dette fut utilisée dès 1825 par la France comme arme pour saboter son ancienne colonie Haïti en cours d’émancipation: cette dette aussi suffocante (l’équivalent de 25 milliards de dollars aujourd’hui) qu’odieuse (car supposée compenser la France de ses pertes de plantations mais aussi du coût de ses expéditions ratées pour mater la révolution haïtienne) fut négociée par la France – avec l’aide des Etats-Unis, qui imposèrent un embargo à Haïti pour le forcer à accepter cette dette – en échange de sa reconnaissance de l’indépendance de Haïti a saboté le développement économique de cette dernière, l’obligeant même, ironie du sort, à aller emprunter à des taux élevés auprès de banques… françaises pour rembourser cette dette étatique (le remboursement s’est étalé de 1825 à 1947).
[10] Hudson, Michael (2021). Super Imperialism: The Economic Strategy of American Empire (Third Edition). New York: Independent Publishers Group, p. 10.
[11] Hudson, Michael (2021). Super Imperialism: The Economic Strategy of American Empire (Third Edition). New York: Independent Publishers Group, p. 40.
[12] Bretton-Woods a aussi servi à créer le FMI et la Banque Mondiale, deux organes contrôlés essentiellement par l’Empire états-unien qui ont pour rôle de transformer le Sud Global en atelier de misère – sweat shop – et de le condamner au sous-développement chronique pour qu’il reste à la merci du Nord.
[13] Hudson, Michael (2021). Super Imperialism: The Economic Strategy of American Empire (Third Edition). New York: Independent Publishers Group, p. 16.
[14] D’ailleurs, en 1965, De Gaulle parlait – toute h’chouma bue, lui qui au même moment chapeautait des politiques tout aussi criminelles en Afrique – de “privilège exorbitant” des Etats-Unis, et envoya la même année un navire militaire pour échanger les excédents français de dollars contre l’équivalent en or, opération qui s’étala jusqu’en 1966.
[15] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 453.
[16] Souvenons-nous du destin de Muammar Gaddafi après qu’il ait eu comme projet de créer un dinar adossé à des réserves d’or libyennes, qui aurait concurrencé les evises impérialistes comme le dollar (dans les ventes de pétrole et de gaz) et le Franc CFA. Voir cet email confidentiel publié par Wikileaks : https://wikileaks.org/clinton-emails/emailid/12659
[17] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 457.
[18] D’ailleurs on signale ici que cet événement qui a provoqué une forte inflation du prix des commodités, et donc un appauvrissement mondial brutal, a forcé les pays de l’OPEP, qui ont vus leurs revenus pétroliers chuter en termes réels (c’est-à-dire en prenant en compte l’effet appauvrissant de l’inflation), ont décidé d’augmenter le prix du pétrole, ce qui a causé un autre fort déséquilibre qu’a été la crise pétrolière des années 1970.
[19] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 454.
[20] Hudson, Michael (2021). Super Imperialism: The Economic Strategy of American Empire (Third Edition). New York: Independent Publishers Group, p. 31.
[21] On pourrait se demander pourquoi ces excédents de dollars n’étaient pas utilisés par les différents Etats pour acquérir des parts dans des entreprises états-uniennes, et la réponse est malheureusement simple: l’Oncle Sam, champion auto-déclaré du libéralisme économique, interdisait purement et simplement l’acquisition de ses entreprises – vues par lui, à juste titre comme on peut le constater sans équivoque aujourd’hui, comme des agents et tentacules de son empire – par des Etats étrangers [22].
[22] Hudson, Michael (2021). Super Imperialism: The Economic Strategy of American Empire (Third Edition). New York: Independent Publishers Group, p. 17.
[23] Saez, Emmanuel, and Gabriel Zucman (2016). Wealth Inequality in the United States since 1913: Evidence from Capitalized Income Tax Data. Quarterly Journal of Economics, 131(2), pp. 519-578.
[24] UNICEF (1999). Iraq Surveys Show ‘Humanitarian Emergency’. UNICEF Press Release, August 12, 1999. Disponible sur: https://www.unicef.org/newsline/99pr29.htm
[25] Weisbrot, Mark, and Jeffrey Sachs (2019). Economic Sanctions as Collective Punishment: The Case of Venezuela. Washington, D.C.: Center for Economic and Policy Research (CEPR). April 2019.
[26] La crise financières asiatique de 1997 n’est qu’un exemple parmi tant d’autres : elle avait débuté lorsque la devise thaïlandaise, le baht, subit une attaque spéculative coordonnée de la part de plusieurs banques et fonds d’investissement. La crise qui s’en suivit se propagea rapidement à d’autres pays de la région comme l’Indonésie, la Korée du Sud, et la Malaysie. Ironiquement, leur sauveur désigné ne fut autre que… le FMI, dont les ‘ajustements structurels’ sont maintenant réputés pour être synonymes de condamnation au sous-développement et à l’assujettissement aux besoins de l’économie étasunienne : cette crise a montré s’il en était encore besoin qu’il n’y a toujours qu’un seul gagnant dans ce système.
[27] Voir à ce titre l’interview aussi rare qu’éclairante d’un ancien golden boy : https://www.youtube.com/watch?v=39YQbv6vEFA
[28] Voir https://www.investopedia.com/ask/answers/052715/how-big-derivatives-market.asp
[29] Une étude bouclée le 19 juin 2024 et publiée dans le Lancet le 5 juillet 2024 estimait que, même si le cessez-le-feu intervenait immédiatement, le nombre cumulé de morts dépasserait les 186 000.
[30] Voir à ce titre cette excellente vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=LfWYtRMbMnk
[31] Graeber, David (2014). Debt, the first 5,000 years (éd. 3), Melville House Publishing, p. 480.
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ce sera très drôle! Lire la suite
...vous vous bouchez les yeux quand il s'agit d'identifier les VRAIS responsables de la situation Lire la suite
Les propos de Crusol sont gravissimes .C'est néanmoins une analyse originale qui mérite qu'on s'y Lire la suite
Rien de plus facile que de modifier la constitution. Lire la suite
En droit français actuel PERSONNE ,même pas Macron ne peut "octroyer" l'indépendance à un territo Lire la suite