Quand les Japonais abandonnèrent les mathématiques...japonaises

     Comment expliquer que sans avoir construit de pyramides ni avoir découvert l'électricité, sans avoir découvert l'atome, la Relativité générale ou la physique quantique, sans être les inventeurs de l'avion, du sous-marin, de la photographie, du téléphone, de l'automobile ou de l'Internet, la Chine et le Japon se classent aujourd'hui à la 2è et 3è place des pays les plus développés du monde ? 

     Oui, comment est-ce possible ?

     Aucun de ces deux pays n'a ni colonisé l'Afrique et pillé ses richesses, ni conquis l'Amérique ou quelque autre continent, toutes choses qui ont permis à l'Europe d'abord, puis aux Etats-Unis, d'acquérir une avance scientifique et technologique considérable sur le reste du monde. A la Chine et au Japon, il faut d'ailleurs ajouter la Corée du sud qui, en 1960, avait le même PIB que le Ghana et qui aujourd'hui, figure à la 12è place des pays les plus développés (sur 193 pays recensés par l'ONU quand même !). 

    Ils ont fait comment ? 

    Prenons l'exemple du Japon qui s'est très longtemps refusé d'avoir tout contact avec l'étranger, hormis avec la Chine dont il a repris l'écriture idéogrammatique. Au 17è siècle, à l'ère dite d'Edo, les Japonais étaient tout simplement interdits de voyager à l'étranger et les livres étrangers également interdits. Mais à partir du 19è siècle, dite ère Méji, la politique du sasoku (fermeture du pays) est levée et l'on assiste à un important mouvement de traduction d'ouvrages étrangers, notamment d'ouvrages scientifiques européens. Examinons un domaine : celui des mathématiques. Les Japonais avaient inventé leur propre arithmétique et leurs propres géométrie connues sous le nom de wasan ou mathématiques japonaises. Celles-ci étaient enseignées dans les écoles, primaires, secondaires et supérieures, jusqu'au milieu du 19è siècle. Et vint le fameux commodore américain Perry et son imposante flotte qui, en 1853, débarquèrent dans la baie de Tokyo et menacèrent de détruire le Palais impérial et de d'envahir la Japon si ce dernier ne s'ouvrait pas au commerce extérieur ! Après quelques atermoiements, en 1868, l'Empereur finit par promulguer un décret en 5 articles dont le cinquième dit ceci : 

   "La connaissance doit être recherchée partout à travers le Monde afin que l'intérêt de l'Empire soit promu"

   Il signait là la fin de l'enseignement des mathématiques japonaisesLa fin du wasan au profit du yosan ou mathématiques occidentales. Ces dernières furent dès lors imposées. C'est le décret Gakusei qui l'imposa désormais dans toutes les écoles nippones en 1872. Dès lors, les mathématiques japonaises devinrent un simple sujet d'étude pour les historiens des sciences mais ne furent plus du tout utilisées. Dans la foulée, la physique, la chimie, la géologie, l'hydrologie, la mécanique etc...venues d'Europe furent introduites également. Il est clair que l'abandon des sciences japonaises est l'une des principales explications de l'extraordinaire développement scientifique et technologique du Japon. Et des autres pays asiatiques ! Aujourd'hui nous conduisons des voitures japonaises, nous utilisons des téléphones portables coréens (Samsung) et nous utilisons le Tik Tok des Chinois. Jusqu'au manche à selfies inventé à Taïwan. Ou encore la cigarette électronique inventée encore en Chine. 

    Tout cela donne à réfléchir. Et la première idée qui vient à l'esprit, c'est qu'il y a des cycles civilisationnels. Ils durent rarement plus de quatre ou cinq siècles. Depuis 1492, quand Christophe Colomb conquit l'Amérique, nous vivons dans le cycle civilisationnel euro-nord-américain ou occidental. Ce cycle est sur la fin et la meilleure preuve en est que la Chine et le Japon se classent aux 2è et 3è rang des pays les plus développés. Avant 1492, la Chine était le pays le plus développé du monde et, par exemple, surpassait de loin l'Europe en termes de construction navale. Les 200 bateaux (120m de long, 58 de large et jaugeant 1.500 tonneaux) de l'amiral chinois Zeng He qui traversèrent toutes les mers de l'Asie du Sud-est pour rallier les côtes de l'actuel Kenya et de l'Arabie, ressemblaient aux petits bateaux de croisière d'aujourd'hui alors que les caravelles de Christophe Colomb avaient la taille de...nos pétrolettes. Au contraire de Colomb, qu'il devança de 2 siècles, l'Amiral Zeng He se contenta d'embarquer deux girafes et un lion avant de s'en retourner en Chine. Voici la carte de ses voyages :

 

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    Tout cela pour dire quoi ? Ceci : que quand on a le malheur de vivre dans un cycle civilisationnel qui n'est pas le nôtre, on doit tout faire pour emprunter, dupliquer, voler même les secrets scientifiques de la civilisation dominante au lieu de s'enferrer dans des délires passéistes du genre "les Egyptiens antiques avaient l'électricité". Longtemps, les Japonais furent accusés par les Occidentaux d'être des imitateurs, des pillards et de ne rien inventer eux-mêmes. Et alors ? Quand l'Europe n'était pas un centre civilisationnel, elle a bien récupéré les sciences et techniques de l'Egypte, de la Mésopotamie et de la Perse ! Elle a bien piqué le zéro (0) à l'Inde et les chiffres dits "arabes" mais en réalité indiens. Elle a bien bazardé les chiffres romains lesquels ont longtemps survécu jusqu'à ce que de nos jours, presque plus personne, hormis les latinistes et les historiens, n'écrive le "XVIII" siècle" mais bien "le 18è siècle". Elle a bien, cette Europe, liquidé sa religion polythéiste (Zeus, Poséidon, Hadès etc...) pour s'emparer d'une religion moyen-orientale à savoir le christianisme. Ben non, Bethléem ne se trouve pas dans les environs de Clermont-Ferrand, le Jourdain n'est pas un affluent de la Tamise ou du Rhin et la langue de la Bible, l'araméen, n'est pas une langue indo-européenne comme le grec, le latin, le français ou l'allemand mais une langue sémitique comme l'hébreu et l'arabe. 

   Quand son cycle civilisationnel n'était pas encore advenu (il commença à partir de 1492 donc), l'Europe n'a jamais hésité un seul instant à adopter ou à s'emparer des sciences et des techniques de telle ou telle civilisation dominante à telle ou telle époque. Sans le moindre état d'âme ! Et c'est exactement ce qu'ont fait plus tard les Asiatiques, chose qui à l'évidence leur a réussi. Dès lors, une question : pourquoi les Noirs ne font-ils pas pareil ? Pourquoi sont-ils obnubilés par leur, certes glorieux, passé (Égypte antique) et passent-ils le plus clair de leur temps à en ressasser les exploits ? Jusqu'à inventer des bobards comme ces pyramides-centrales électriques sorties du cerveau brumeux d'un Bac-12 ! 

   Les Japonais, eux, ne perdent pas leur temps à glorifier leur wasan (mathématiques japonaises)...

   NB. Quand, vers 2050 ou 60, le cycle civilisationnel asiatique commencera (l'Inde est la 4è puissance mondiale désormais), les égyptomaniaques et autres pyramydolâtres ké ni sa pou di. Traduction : "n'auront que leurs yeux pour pleurer". Ce n'est pas Toutankhamon qui sortira de son sarcophage pour leur venir en aide en tout cas.

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