L’auteur, le « prix » et la critique

Le Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, 31 ans, a remporté le prix Goncourt 2021 pour La Plus Secrète Mémoire des hommes (Editions Philippe Rey), mercredi 3 novembre. Un tel exploit qui n’a pas manqué de provoquer la réjouissance de beaucoup de Sénégalais qui ont félicité l’auteur. Une distinction qui laisse perplexe certaines personnes. Ainsi, Imam Kanté a réagi dans l’une de ses récentes publications parues sur Facebook.

Voici l’intégralité de sa publication !

« Le prix Goncourt, je n’aime pas trop le terme prix car le talent n’a pas de prix, est le prix Goncourt. C’est-à-dire une distinction qui ne peut être séparée des enjeux ou questions de l’époque et du lieu d’où il est décerné. Cela veut dire que les auteurs et candidats à ce « prix » Goncourt acceptent de se soumette aux critères, exigences et arbitrages d’un jury qui n’échappe pas et ne peut échapper aux questions d’époque et de lieu, ici c’est la France du 21e siècle.

Comme tous les autres jury, celui du « prix » Goncourt met inévitablement en avant des préférences qui par définition ne sont pas neutres. Notons au passage que Jean Paul Sartre a refusé un « prix » Nobel alors que Sarkozy a décoré des universitaires sénégalais parmi d’autres après avoir tenu son discours à l’Ucad sur son Afrique qui n’est pas encore entrée dans son histoire ! Sans occulter la question de qui paie le jury et les auteurs distingués ? Il y a bien sûr un coût et se pose alors la question de qui paie et pourquoi, comme celle des critères explicites et implicites qui encadrent et guident le choix du jury.

Les auteurs choisissent de soumettre leurs œuvres à tel « prix » et pas à tel autre… Ce qui laisse supposer qu’il y a à la base une intuition qui pousse un auteur ou une auteure à penser qu’au moment où il candidate, son œuvre a des chances d’être distinguée ici avec ces gens et pas ailleurs avec d’autres.

Il se trouve que les personnes qui évaluent les œuvres qui leur sont soumises le font forcément dans le cadre d’une vision de la littérature puisque c’est de cette matière qu’on parle ici, en rapport avec les enjeux qu’elles mettent en avant en entente avec le ou les bailleurs du privé ou du public.

C’est ainsi que pour la France de nos jours, parmi les enjeux les plus aigus figurent la question de la mémoire, de ses relations avec l’Afrique, l’orientation sexuelle, la laïcité, l’islam, l’émigration, le mariage et la PMA pour tous, le vrai ou supposé sentiment anti-francais en Afrique, etc.

Il en vient que l’œuvre de Mohamed Mbougar Sarr est lue sous le prisme de ces enjeux sans oublier la relation que ce nouveau livre a avec les précédents. C’est tout cela qui est en jeu dans ces « prix » Goncourt ou autre.

Étant donné que l’auteur dit quelque part ce qu’il pense de son époque dans son œuvre, et que celle-ci ne lui appartient plus dès que le public s’en saisit, il est tout à fait normal qu’elle soit critiquée et les conditions d’obtention du « prix » avec. Cela a toujours été le cas avec les auteurs africains qui étant du côté de la lutte contre le « déracinement » ont critiqué vertement les auteurs qui étaient pour l’assimilation si on prend le cas de l’Afrique francophone.

Par exemple, Camara Laye a été critiqué pour avoir proposé un enfant noir trop joyeux dans une Afrique coloniale… Il y a eu d’autres polémiques et querelles sur d’autres enjeux. Donc y a rien de plus naïf et anti intellectuel que de dire : chuuuut, taisez-vous et applaudissez notre champion sénégalais, faut surtout pas gâcher la fête sinon c’est que vous êtes jaloux ou on ne sait quoi encore…

Remarquons au passage que Mohamed Mbougar Sarr ne s’est pas revendiqué d’un patritiotisme littéraire national en décidant de soumettre son œuvre au jury du « prix » Goncourt. Au contraire, on l’a entendu dire que son pays c’est la littérature, le seul milieu où il se sent lui-même. Tant mieux pour lui.

Il se trouve que Mohamed Mbougar Sarr s’est illustré avant ce « prix » Goncourt par des prises de position sur ce qu’il appelle le pouvoir religieux de façon péjorative, l’homosexualité et son texte dévalorisant sur les sénégalais, c’est le moins qu’on puisse dire (voir son texte de 2013 sur le site « Seneplus ») qui peuvent plaire au jury du « prix » Goncourt en ce qu’il en tiendra compte dans les critères jugés positifs de sa grille d’évaluation.

Peut-on imaginer un seul instant qu’un imam Ahmad kanté reçoive un « prix » du genre Goncourt pour une œuvre qui serait à contre courant des préoccupations mentionnées plus haut?

Des auteurs brillants en matière de littérature, de cinéma, de musique, de sport, de politique, etc, sont en train de subir le rouleau compresseur des lobbies pro LGBT, Genre, etc, malgré l’immense talent qui peut être le leur !

Tout cela pour dire que ce qui est en question, c’est non pas le talent de Mohamed Mbougar Sarr, en termes de maîtrise de la langue de Molière et l’art du roman français ou en français ( je ne suis pas techniquement compétent pour en juger, ce qui m’importe le plus, c’est de comprendre ce qu’il écrit et dit), mais ceci qu’un auteur ne peut être séparé de son œuvre ni de sa temporalité propre. Cela vaut aussi pour le jury qui attribue un « prix » que ce soit Goncourt ou pas de même que pour ceux et celles qui apprécient favorablement ou non la chose.

Alors à Mohamed Mbougar Sarr d’assumer tout ce qui va avec la fonction d’écrivain et pas seulement la possibilité d’un « prix » dans l’espoir qu’il n’aura pas à y perdre ni de son latin ni de son Mohamed.

Wa Salam »

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