MARTINIQUE-ECOLOGIE continue ses forum-citoyen après ceux de Rivière-Salée, des Trois-Ilets, du Marin, du Diamant et de Ducos, chaque fois sur un thème différent. C'est ainsi que ce jeudi 04 août, elle en a organisé un à la Médiathèque de la ville du Saint-Esprit sur celui du réchauffement climatique.
En effet, en dépit des images terrifiantes que diffusent en boucle ces temps-ci les télévisions (incendies de forêts, températures dépassant les 40°, sécheresses interminables etc.), cela dans presque toutes les régions du globe, les Martiniquais semblent ne guère s'en inquiéter alors même que leur île est déjà menacée, sur son versant caraïbe, par une inexorable montée des eaux qui détruit ses plus belles plages comme la jadis emblématique plage des Salines, dans la commune de Saint-Anne.
Après un mot de bienvenue du troisième adjoint au maire du Saint-Esprit, Eddy LOUIS-ALEXANDRE, au nom du maire de la commune Fred-Michel TIRAULT, c'est le président de Martinique-Ecologie, Louis BOUTRIN, qui ouvrit le forum en présentant un power-point décrivant l'état de la planète actuellement avec toutes sortes de catastrophes qui démontrent sans discussion possible que le réchauffement climatique n'est pas une fake-news comme le prétendent les climato-sceptiques mais bel et bien une réalité. En effet, c'est d'abord et avant tout parce que la température du globe augmente sans cesse, jusqu'à atteindre, disent les rapports du GIEC, 2° supplémentaires dans un proche avenir qu'on en est arrivé là. Hausse des températures qui est directement liée aux activités humaines et à l'exploitation forcenée de la nature par le système capitaliste notamment. Rappelant que certaines îles du Pacifique comme Tuvalu sont en passe d'être englouties, L. BOUTRIN a souligné le fait que la Martinique est d'ores et déjà en prise avec le réchauffement climatique et qu'il convient de continuer à mettre en place des politiques publiques permettant de lutter contre ses conséquences désastreuses. Il a rappelé les efforts entrepris par l'ancienne mandature à la CTM (Collectivité Territoriale de Martinique) en matière de diminution du recours aux énergies fossiles, de développement des énergies alternatives comme l'éolien et l'énergie solaire ainsi que la mise en route du TCSP et la liaison maritime entre Fort-de-France et Case-Pilote. Près de 70% de notre facture pétrolière, a-t-il rappelé, sert à couvrir nos besoins en matière de circulation automobile, d'une part et d'électricité, de l'autre. Il conviendrait donc d'étendre sans tarder le TCSP jusqu'à Rivière-Salée au sud et Trinité au nord. S'agissant de l'électricité, il a dénoncé le fait que nous importions du pétrole depuis la mer du Nord (Norvège) alors que le pétrole du Surinam, qui est à deux jours de bateau de la Martinique (contre 1 mois pour la Norvège), dispose d'un pétrole de haute qualité, contrairement à celui du Venezuela et d'autres pays sud-américains, pétrole répondant parfaitement aux normes européennes auxquelles la Martinique est soumise. C'est ce qui explique que le litre d'essence à la pompe y soit deux, voire trois fois, plus élevé qu'à Sainte-Lucie ou à la Dominique. Toutefois, c'est le recours massif à l'électricité solaire, a conclu L. BOUTRIN, qui, progressivement, est seule à même de nous conduire sur la voie de l'autonomie énergétique.
Le second intervenant, Raphaël CONFIANT, a souligné le fait qu'il y a deux semaines, le premier ministre des îles Fidji dans le Pacifique avait déposé plainte devant la Cour de Justice Internationale contre les plus gros pollueurs de la planète que sont l'Europe, les Etats-Unis, la Russie et la Chine alors même que ces pays ne rassemblent que 40% de la population du globe. R. Confiant a rappelé que la Cour de Justice Internationale traite habituellement des génocides, des crimes de guerre etc...et non des questions écologiques. En s'adressant donc à elle, le Premier Ministre des Fidji a voulu faire comprendre que la pollution engendrée par les pays dits "développées" était en fait un crime contre l'humanité. R. CONFIANT a ensuite plaidé pour "une société de sobriété" à l'échelle mondiale qui serait seule à même de remplacer le productivisme capitaliste et communiste qui règnent en maître depuis déjà deux siècles. Cela ne signifiant pas pour autant qu'il ne faut rien faire à l'échelle locale, celle de la Martinique, car actions écologiques globales et locales doivent aller de pair. I ja ka ta ! (Il est déjà presque trop tard), a-t-il conclu, citant une expression guadeloupéenne.
Puis, Daniel BOYER-FAUSTIN est intervenu pour contester la notion de "développement", lui préférant celle du "buen vivir" (épanouissement) que s'efforcent de mettre en place divers pays sud-américains progressistes et dont nous gagnerions à nous inspirer. Comme les précédents intervenants, il a reconnu que cela signifierait, pour la Martinique, un changement radical d'orientation politique lequel changement ne saurait être impulsé que par un pouvoir local, un réel pouvoir local, et non celui, bien trop limité, dont l'île dispose actuellement.
Albéric MARCELLIN a ensuite souligné le plus grave danger qui pèse sur la Martinique et sa population : l'augmentation de l'intensité des cyclones. En effet, le dernier qui a frappé Puerto-Rico avait des vents de 380kms/h alors que le fameux cyclone Hugo qui avait dévasté deux décennies plus tôt la Guadeloupe, avait des vents de 250kms/h. A Puerto-Rico, a rappelé A. MARCELLIN, il y a eu 4.000 (quatre mille morts) et dans l'année qui a suivi, on a assisté à une vague sans précédents de suicides (un peu plus d'un millier), une grande partie de la population portoricaine n'ayant pu retrouver sa vie d'avant suite à la perte de leurs maisons, entreprises etc... et à la lenteur de la reconstruction. Il a conclu en indiquant qu'en Martinique, l'habitat dont nous disposons ne pourrait résister qu'à des vents de 200kms/h au grand maximum, chose qui présage de graves destructions et pertes humaines le jour où un cyclone comme celui de Puerto-Rico nous frappera.
Enfin, diverses personnes du public ont pris la parole pour soit donner leur vision des choses soit pour poser des questions aux intervenants, toutes et tous reconnaissant qu'il y a urgence à agir. Quelqu'un s'est ainsi étonné du fait que les factures d'électricité ne diminuent pas en dépit des actions qui ont été entreprises au niveau de l'énergie solaire notamment. Il a plaidé pour que des fonds soient mis sur la table pour faire poser des panneaux solaires sur tous nos bâtiments publics ainsi que nos maisons et cités HLM.
Une intervenante s'est félicitée de la tenue de ce forum-citoyen alors que la Martinique entière est concentrée en ce moment sur le tour des yoles, espérant que la population profitera de cette manifestation pour mesurer de ses propres yeux les dégâts infligés à notre littoral par la montée des eaux des océans.
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