Opération israélienne en Cisjordanie: après le passage des blindés, Jénine devient un champ de ruines

L’offensive meurtrière de l’armée israélienne se poursuit dans le nord de la Cisjordanie occupée, marquant le troisième jour d’une opération que l’État hébreu qualifie « d’antiterroriste ». Cette opération a ciblé trois villes palestiniennes : Jénine, Tulkarem et Tubas, ravagées par des frappes de drones et l'utilisation de bulldozers militaires. Au total, 16 Palestiniens ont perdu la vie. Vendredi 30 août, les opérations se concentrent principalement à Jénine. Selon les Palestiniens, « sous couvert de lutte antiterroriste, les Israéliens ont pour objectif d’annexer la Cisjordanie ». L’ONU « condamne fermement les pertes de vies humaines et appelle l’État hébreu à mettre fin immédiatement à cette opération », menée dans des zones urbaines densément peuplées.

Avec notre correspondant à Jérusalem, Sami Boukhelifa

Depuis trois jours, Mohamed et sa famille restent cloîtrés chez eux. Une nouvelle fois, Jénine est un champ de bataille. Une nouvelle fois, la guerre est dans la ville.

« Les plus forts dévorent les plus faibles. C’est la loi de la jungle ici. La situation est terrifiante, décrit Mohamed. Que voulez-vous qu’on fasse ? On subit. On reste à la maison, et on attend que ça passe. L’armée israélienne est partout. On entend des tirs à proximité. Ce matin, une frappe de drone a visé trois personnes dans leur voiture. Si vous êtes un combattant palestinien, ou s’ils vous soupçonnent de l’être, ils vous tuent », raconte-t-il.

Selon l'armée israélienne, les trois personnes tuées étaient des membres du Hamas.

« La ville est en ruines »

Des dizaines de blindés et de bulldozers ont fait irruption à Jénine, écrasant tout sur leur passage. Routes éventrées, bitume et trottoirs retournés, canalisations d’eau et d’assainissement détruites, le courant coupé : la ville est en ruines. « L'utilisation disproportionnée de la force par l’armée israélienne, et la destruction méthodique des infrastructures de base, cachent à peine la volonté expansionniste de l’État hébreu », dénonce un autre habitant de Jénine, qui a souhaité garder l’anonymat.

Il poursuit : « En réalité, les Israéliens veulent nous pousser au départ. Lorsque vous n’avez plus d’eau, plus d’électricité, plus d’internet, plus de pain dans les boulangeries, lorsque vous ne trouvez plus de quoi nourrir vos enfants, il ne vous reste qu’une seule option : partir. Leur objectif est sur le long terme. Ils vous rendent la vie impossible, et en parallèle, ils poursuivent la colonisation. »

Selon le ministère de la Santé palestinien, près de 700 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée depuis le 7 octobre, que ce soit par l’armée israélienne ou par des colons juifs.

« Ils veulent imposer une situation invivable pour nous pousser au départ »

Encerclée par l’armée israélienne qui a posté ses snipers sur les toits de Jénine Najat, mère de famille, vit la peur au ventre. 

À Tulkarem, Médecins sans frontières dénonce l'obstruction d'accès aux soins

À Tulkarem, en Cisjordanie occupée, les civils sont impactés par les incursions de l'armée israélienne. C'est ce qu'explique Caroline Willemen de l'organisation humanitaire Médecins sans frontières (MSF), jointe par téléphone par Murielle Paradon du service international de RFI. Elle décrit la difficulté de l'ONG d'accéder aux hôpitaux et aux blessés.

« Ce qui nous concerne énormément en tant qu'organisation humanitaire médicale, c'est l'obstruction de l'accès aux soins. Quand il y a une incursion, très souvent tous les accès du camp sont bloqués. Et en fait, c'est pour ça que une partie de notre travail à Jénine et à Tulkarem se focalise sur le soutien pour les gens qui travaillent dans les ambulances et les bénévoles du camp qui donnent les premiers soins », décrit Caroline Willemen. « Ils prennent des risques énormes pour essayer de soutenir les gens qui sont blessés. Mais même en soi, pour moi, cela dit beaucoup. Si un projet MSF, au lieu de pouvoir donner les soins en première ligne, en fait ce qu'on fait ici, c'est un soutien, des formations aux gens qui sont en première ligne parce que ce n'est pas possible pour nous de le faire. »

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