Poésie : "JOUANACAERA-50 pas" de Jean-Marc-Terrine

Fernand Fortuné

Rubrique

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Il faut d’abord féliciter le percussionniste musicien, parolier et chanteur, Charly Labinsky. Une entente musicale et poétique symbiotique. Un ansanm ansanm merveilleux de précision et de ponctualité. Textes et sons tombaient pile au bon moment pour se confondre et faire un seul, là où il le fallait. Un beau travail de compérage.

Il faut remercier Isambert Duriveau, premier lecteur, tout en retenue, tout en émotion qui a parlé de l’auteur et dit comment il appréciait cette poésie essentielle. Il             a noté avec justesse que l’ouvrage est de belle facture et a bien fait d’insister sur le fait que la poésie n’est pas un objet marchand commun, et par ce biais, il a complimentait l’éditeur.

Je dois dire que j’ai lu avec un plaisir non dissimulé l’ouvrage « Laso tè », co-écrit par Jean-Marc Terrine et Isambert Duriveau. Je suis heureux de voir réunis ensemble ces deux complices qui ont su trouver les mots les plus appropriés, les plus beaux, les plus sensibles pour dire leur amour de la terre, cette terre du Pays-nôtre. Découvrir au fond d’eux-mêmes, les mots les plus vrais pour parler de nos Gens de la Glèbe. L’amour des mots, la magie des mots les a comme possédés pour rendre ce livre si séduisant et authentique.

Ce soir, en nous offrant son ouvrage et sa poésie, et dans le choix qu’il a fait de certains poèmes, Jean-Marc  Terrine s’est révélé comme un vrai poète, porté par une passion qui fait vibrer tout son corps, une passion qui dirige sa voix et ses émotions.

Il est comme imbibé de poésie, il est plongé dans la poésie, il est possédé par la poésie. Il ne le cache pas, il ne s’en cache pas, il se donne entier comme poète. Quand  il parle et nous regarde, il se livre à nous, il ne craint pas de se livrer tout entier à nous, car il avance d’un pas assuré sur ce chemin difficile de la poésie,  qu’il voudrait que nous empruntions, qu’il voudrait que nous partagions.

C’est en levant la tête et en plongeant ses yeux dans les nôtres, qu’il nous convainc qu’entrer en état de poésie, c’est profiter du temps libre pour s’adonner à la méditation, au loisir studieux, aux activités intellectuelles et à la poésie. C’est la définition de ce mot latin «otium» qui a ponctué toute la soirée. Cet état particulier, l’état de poésie, a fait l’objet d’un ouvrage du grand poète haïtien René Depestre qui le définit ainsi : « «  L’état poétique est le seul promontoire connu, d’où par n’importe quel temps du jour ou de la nuit l’on découvre à l’œil nu, la côte nord de la tendresse ».

 

En continuité avec l’ouvrage « Laso Tè », dans les morceaux choisis qui sont des scènes de la vie populaire, des scènes de notre culture, on pourrait dire qu’il y a presque une lecture poétique d’ouvrages de Joseph Zobel, ou une écriture poétique des tableaux des peintres de l’Atelier 45. Cette poésie, en partie, raconte le vécu, le quotidien populaire et dévoile chez Jean-Marc Terrine, une connaissance quasi sociologique, voire anthropologique de nou menm.

J’ai dit plus haut que le poète nous conduit sur des chemins difficiles. Oui ! Pourquoi entrer en poésie, devrait-il être simple, facile ?

La poésie de Jean-Marc Terrine est complexe dans l’écriture, dans le choix graphique, dans les allers-retours d’une langue à une autre, dans le choix volontaire de l’absence de ponctuation relevé par Isambert Duriveau,  (en fait c’est le rythme qui ponctue la diction).

Cette poésie n’est pas d’entrée, d’un abord facile, et nous pensons détecter comme un besoin d’entrer en initiation. Chaque vers révèle et cache à la fois quelque chose, un non dit que le poète nous donne la liberté de découvrir, donc de nous rapprocher de cet otium qu’il chérit. C’est ce que nous font comprendre, dans ces moments où il veut que nos regards se croisent, son intonation, ses changements de rythme, ses rappels continus à l’otium, dans sa façon de poser la voix pour recapter notre attention, dans  ses brefs silences parfois, et surtout dans ces instants fascinants où le tambouyé, Charly Labinsky,  après un decrescendo, lui redonne la parole pour une transition qui relève quasiment de l’ésotérisme. Même les rares sanglots de l’auteur ont accompagné la montée en puissance de sa parole poétique. Le poète sait que les mots lui sont reconnaissants d’avoir été, contre toute logique, mais pour la beauté et l’envoûtement de la poésie, été mis ensembles, attelés ensemble, mis en connivence.

Nous n’étions pas nombreux, mais tous amis de la poésie, tous amateurs d’excellence. Jean-Marc Terrine a eu l’extrême amabilité de remercier nos Autorités politiques et culturelles qui donnent le feu vert pour de telles manifestations, où sont célébrés l’esprit et la liberté de création

 

©Fernand Tiburce FORTUNE

Ancien Président du Groupe de plasticiens FWOMAJÉ

Ducos, le 30 Avril 2023

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