“Pāzha pônè maschettou, je ne m’y habituerai jamais, rien ne vaut notre koduvakatthî.”Panchami laisse tomber la machette et prend le bout de son sari pour enrouler le doigt blessé. Quelques gouttes de sang mélangées au suc de canne tombent sur le sol chaud. Le soleil rouge au zénith est impitoyable. La jeune femme essuie les perles de sueur qui coulent le long de son cou.
Suc de canne, gouttes de sang, perles de sueur, sa vie dans la plantation est loin d’être aride.
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-Tu as du sang ici. Nagamootoo pose un baiser sur le cou marqué par les traces rouges laissées par le mundanai ensanglanté. Il passe sa langue sur ses lèvres sans la lâcher et se surprend à apprécier le goût métallique salé du sang, de la sueur et du suc de la canne à sucre.
Mmmm…ça a le goût du urukka. Il ferme les yeux pour se rappeler du goût du condiment.
-Fais-moi à manger pendant que je me lave, mon ventre, il crie. Feignant la colère, Panchami le repousse et prend le chemin vers le Ravine de Saint Gilles. Étonné de l´entendre parler créole, Nagamootoo sourit et part vers le boucan. L´absence de sa bien-aimée l´arrange, car il avait décidé de lui préparer un vrai festin ce soir.
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L´esprit de Panchami s´évade en longeant le Canal Bruniquel. Elle n´avait que 16, 17 ans lorsqu´elle suivit son mari Samikannu pour s´installer à l´ile de la Reunion. Après son deuxième contrat, ce dernier revint à Pondichéry pour se trouver une épouse, et c´est tout naturellement qu´il se maria avec sa nièce Panchami. Cette dernière n´aurait jamais imaginé que sa vie prendrait pareil tournant. Partir loin des siens vers une destination inconnue lui faisait peur. Mais ces contrées lointaines ne lui étaient pourtant pas étrangères, car elle habitait dans le Coolietheruvu qui se trouvait à proximité du temple de Draupadi, à l´entrée du village de Murungapakkam, au sud de Pondichéry. Appelée de cette façon à cause des habitants qui avaient un lien avec l´engagisme, la rue des coolies vivait au rythme des départs et retours des engagés qui défiaient immuablement leur destin. Panchami n´était qu´une jeune fille vêtue de paavadai-sattai lorsque Samikannu revint de Maurise theevu la première fois. Son corps robuste et sa grosse moustache lui faisaient peur. Elle se cachait derrière sa mère à chaque fois qu´il cherchait à l´attirer vers lui pour s´amuser avec elle. Elle l´observait du coin de l´œil sans oser l´approcher. Elle ne s´est jamais sentie proche de lui malgré les plaisanteries de sa famille, car elle était la promise de Samikannu. Son destin habillé de daawani qui attendait son retour, partit drapé de sari vers la Reunion.
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Panchami abandonne un instant ses souvenirs à l´entrée du premier tunnel creusé dans la roche. Il fallait faire attention car la pente du ravin est abrupte dû probablement à un éboulis. Elle traverse le deuxième tunnel puis une étroite faille, et arrive enfin au Bassin Malheur. Fatiguée par la marche, elle s´assied sur un rocher au pied de la cascade.
« Pāzha pônè Mascareignes !» Des larmes coulent lorsqu´elle pense au navire qui avait transporté cette maudite maladie qui emporta son Samikannu. Elle en voulait au capitaine Joseph d´Agnel et son subrécargue Joseph Menon qui dédaignèrent la cholera qui sévissait à Kilwa d´où le navire quitta chargé d´engagés africains. Elle avait prié tous les dieux, avait marché des kilomètres et des kilomètres pour aller à la nouvelle chapelle de La Salette à Saint-Leu pour sauver son mari. De confession hindoue, cette double pratique religieuse ne lui était pas étrangère, car depuis des générations, sa famille se rendait fréquemment à l´église de Notre Dame de la Santé d´Ariyankuppam. Mais le destin en décida autrement… Samikannu succomba à la maladie et la laissa toute seule sans famille.
Le premier réflexe de Panchami fut de rentrer chez elle. Mais connaissant le sort réservé aux veuves dans la société indienne, elle écarta cette idée. On l´aurait vêtue de blanc, on l´aurait cloitrée en quatre murs sans aucune vie sociale, et à 20 ans son existence se serait arrêtée aux portes des paradis interdits. Panchami ne voulait pas se plier à cette tradition injuste, aussi décida-t-elle de rester à la Reunion et continuer la vie qu´elle avait commencée. Advienne que pourra !
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-Néna rien ke ton dent ke lé blan kom un grain de riz. Nagamootoo tend l´assiette à Panchami qui savourait son rhum préféré.
-Tu t´es surpassé aujourd´hui mon gaté. C´est un vrai festin que tu m´as préparé là.
-Riz sosso, cari de sauté de porc, rougail saucisses au piment oiseau et rougail boucané bringel.
Un sillarai pāttu mélancolique s´élève vers le ciel brumeux pour interrompre le silence triste de la plantation.
« Je me sens bien dans tes bras » Lovée contre Nagamootoo, Panchami dessine des formes insignifiantes sur son torse.
-Alors pourquoi ne pas rester avec moi Panchami ? Sa voix se fait suppliante.
-Ne gâche pas ce moment agréable Nagamootoo. Elle, comme toi fait aussi partie de ma vie. Je ne peux pas choisir…
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Panchami presse le pas, elle est en retard pour le grand jour. On allait ouvrir la Chapelle Massalin Karly qui était le premier temple de la plantation, et tout le monde était exalté. Panchami termina sa journée plus tôt que d´habitude et partit son prendre son bain habituel au Bassin Malheur. Sur le chemin de retour elle est encore envahie par le doute. Doit-elle y aller avec Raharianne ou Nagamootoo ? Ce dernier aurait été le choix naturel du fait qu´il était hindou comme elle ; mais Panchami n´avait pas peur des ladilafé. Tout le monde savait qu´elle était une femme libérée.
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Une odeur de suruttu l´accueille lorsqu´elle franchit la lisière du champ de canne à sucre. Pas de doute, c´est Virassamy ! Indisposée par sa présence, elle essaie de l´éviter, mais l´homme se met à travers et lui barre le chemin. Cela fait un moment qu´il rôde autour elle. Son regard concupiscent la suivait de distance depuis les premiers jours de son arrivée sur l´ile. Mais après la disparition de Samikannu, Virassamy ne se cachait plus. Il venait souvent l´importuner. L´homme n´avait pas l´air d´abandonner ses avances malgré les multiples refus de Panchami.
-Ce n´est pas le moment Virassamy, je suis pressée.
-Tu as du temps pour le monde entier, mais jamais pour moi. Dit-il, moqueur. Sa voix enjouée irrite Panchami qui essaie de le contourner.
-Je ne suis pas d´humeur à plaisanter. Que me veux-tu enfin ? Sois raisonnable, tu sais très bien que je ne suis pas seule.
-Justement ! Pourquoi te refuser à moi alors que tu as plus d´une personne dans ton lit.
-Ce que je fais dans mon lit ne regarde que moi. Je couche avec qui je veux et comme je veux. Ce n´est pas ton problème.
-Que tu couches avec Nagamootoo est une chose, mais partager ton lit avec cette salope de cafrine est dégoûtant ! Suis-je moindre qu´une esclave ?
-Je ne te permets pas de parler de Raharianne de cette façon ! Je fais ce que je veux, personne n´a le droit de me juger. Surtout pas toi Virassamy ! Panchami essaie de le pousser de toutes ses forces pour forcer le passage. Mais l´homme est fort. Il agrippe la main de Panchami et lui tord le bras derrière le dos.
-Lâche-moi espèce de brute, sinon j´ameute les voisins.
-Tu peux crier autant que tu veux ma belle, il n´y a plus personne. Ils sont tous partis au temple.
Panchami comprends à cet instant qu´elle est vraiment en danger. La crapule avait bien prémédité son délit. Le son du Thappattai resonne au loin, la fête vient de commencer. Il n´y a aucune chance que quelqu´un vienne à son secours. L´odeur de l´haleine putride mélangée de rhum et de suruttu de Virassamy la dégoûte. Elle sent son sexe dur gonflé par le désir bestial lorsqu´il la sert contre lui. Panchami étouffe. Elle se dégage de sa prise et griffe son visage.
-Thevudia mundai ! Virassamy se rue sur elle et la gifle à plusieurs reprises jusqu´à ce qu´elle tombe sur le sol. Espèce de dépravée ! Coucher avec un homme ne te suffit pas, il te faut aussi une femme ? Qu´est-ce que tu as entre tes jambes salope ? Viens, je vais te satisfaire pour de bon ! Virassamy regarde autour de lui à la recherche de quelque chose. Panchami profite de cet instant pour se relever et court jusqu´à chez elle. L´homme la suit avec un long bâton de canne à sucre. Elle a à peine le temps de rentrer dans le boucan que Virassamy la rejoint et l´agrippe par les cheveux. Il la renverse sur le sol, s´allonge de tout son long sur elle et écarte ses cuisses avec ses jambes. De sa main gauche il lui tient les bras, tandis que de sa main droite il essaie d´enfoncer le bâton de canne à sucre à l´intérieur de la jeune femme. Panchami hurle et se débat. Virassamy lâche les bras et met sa main sur sa bouche pour étouffer les cris. Les mains de Panchami tâtonnent et cherchent quelque chose. Le rythme du Thappattai est de plus en plus effréné. Karly est sortie du koilu pour la procession. Dans un dernier geste de désespoir Panchami saisit ce qu´elle cherchait.
Le corps de Virassamy sans tête gît sur le sol
Pāzha pônè maschettou!
Suc de canne, gouttes de sang, perles de sueur
Si on vous comprend bien, MoiGhislaine, le charbon de Lorraine devrait, pour reprendre votre expr Lire la suite
Je crains que vous n'ayez mal compris cet article. A moins que ce ne soit moi qui me trompe. Lire la suite
Il faut être un sacré farceur pour faire croire aux Martiniquais qu'un deuxième Cuba est possible Lire la suite
...toute la "classe politique" (qui n’est d’ailleurs pas une "classe sociale") sur le même plan ? Lire la suite
...ou ka trouvé tout diks-li, òben yo ka viré enprimé tou sa i fè-a vitman présé! Lire la suite