14 FÉVRIER 1974

Patrick MATHELIÉ-GUINLET

Sur le plateau Chalvet

tous ensemble ils marchaient,

leur commune misère

d’étendard leur servant,

de cinq malheureux francs

désirant seulement

augmenter leur salaire

trop maigre au demeurant

afin que leurs enfants

ne meurent pas de faim

pour aller à l’école.

Ouvriers agricoles,

des coupeurs de banane

tous unis dans la grève,

par désespoir poussés

à cette extrémité.

Pour tous ces prolétaires,

le travail inhumain,

la dure exploitation

par les riches patrons

lors avaient remplacé

l’esclavage aboli

des grandes plantations

de l’île, soi-disant

depuis si tant d’années…

Leurs revendications

pour plus de dignité,

pour justes qu’elles sont,

sont ignorées pourtant

par tous ces békés qui

n’ont pour eux que mépris.

 

Et en ce jour maudit,

quatorze février,

les gendarmes appelés

par les propriétaires,

font feu à bout portant

sur la foule en colère

des damnés de la terre,

faisant couler le sang…

Lors Ilmany “Renor”,

père de nombreux enfants

s’écroule raide mort !

Quatre autres sont blessés

et le reste est gazé

par les hélicoptères.

C’était le pot de terre

contre le pot de fer :

"qui demande du pain,

récoltera du plomb…"

Puis le surlendemain

avant qu’on ne l’enterre,

sur la plage à côté

fut découvert le corps

profané, mutilé

de Georges Marie-Louise

qui n’avait pas vingt ans,

assassiné aussi

par la maréchaussée

qui resta impunie,

ayant bénéficié

de la complicité

du pouvoir judiciaire.

 

Il fallut ces deux morts,

hélas, pour qu’un accord

soit à la fin signé

avec les syndicats,

améliorant le sort

des pauvres ouvriers.

Ce qui ne nous tue pas,

toujours nous rend plus fort

et il nous faut tirer

les leçons du passé,

nos martyrs honorer

en restant solidaires,

unis main dans la main,

pour de meilleurs demains !

 

Patrick Mathelié-Guinlet

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