Le 21 novembre dernier, la Cour pénale internationale (CPI) a émis des mandats d’arrêt, notamment contre le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Une décision forte alors que la justice internationale est souvent vue comme celle « des vainqueurs ». Très vite, plusieurs Etats parties annoncent qu’ils respecteront leur engagement auprès de la CPI, à savoir l’arrestation du Premier ministre israélien sur leur territoire pour qu’il comparaisse.
Mandats d’arrêt de la CPI : qu’est-ce que cela va changer pour Netanyahou ?
La France, elle, avait répété qu’elle appliquerait ses obligations au titre du droit international, mais sans dire clairement si elle irait jusqu’à arrêter Benyamin Netanyahou. Ce mercredi 27 novembre, le flou a disparu au profit… d’une position surprise : le ministère des Affaires étrangères a annoncé que le dirigeant israélien bénéficie d’une « immunité » qui « devra être prise en considération ». Une annonce qui relève d’un manque de connaissance juridique, estime Mathilde Philip-Gay, professeure de droit public à l’université Lyon 3 et autrice de « Peut-on juger Poutine ? » (Albin Michel, 16,90 euros).
Après avoir gardé une position plus floue que d’autres pays, pourquoi le ministère des Affaires étrangères annonce finalement une « immunité » de Benyamin Netanyahou ? Est-ce une position nouvelle ?
Mathilde Philip-Gay. Si jamais la position du ministère se confirme, elle tranche politiquement avec la tradition française dont le gouvernement devrait être fier. En effet, la France est un des seuls Etats membres de la CPI à avoir révisé sa Constitution pour justement empêcher la moindre ambiguïté sur le fait que l’immunité ne s’applique pas. Y compris à son propre chef d’Etat. Les dirigeants actuels doivent savoir que c’est tout l’honneur de notre pays, mais aussi un positionnement qui place la France parmi les défenseurs de la CPI.
Qu’en est-il juridiquement ?
Si elle suscite des interrogations, la question de l’immunité est en réalité tranchée depuis bien longtemps. Le 14 février 2002, saisie dans le cadre d’une affaire où la Belgique mettait en cause le ministre des Affaires étrangères congolais, la Cour internationale de Justice a rappelé qu’une juridiction nationale ne pouvait pas mettre en cause un ministre en exercice, ainsi que les chefs d’Etat et Premiers ministres. Tout en notant des exceptions, notamment la compétence de la CPI. C’est donc très clair : oui, il y a des immunités devant les juridictions des autres pays, mais pas devant la CPI.
« Israël comme le Hamas sont sujets au droit international, et des crimes de guerre semblent avoir été commis »
Pour justifier de sa décision, le ministère évoque des obligations prévues dans le droit international liées aux « immunités des Etats non parties à la CPI »…
Cette question est aussi tranchée depuis longtemps ! Dans les statuts mêmes de la CPI, il est prévu la possibilité, sous certaines conditions, qu’un Etat non partie puisse être soumis à la juridiction de la Cour. Notamment pour les dirigeants soupçonnés d’avoir commis un crime sur les ressortissants ou le territoire d’un Etat partie. En l’occurrence, la Palestine a accepté la compétence de la CPI et celle-ci a accepté la Palestine sans préjuger de sa qualité d’Etat. La CPI peut donc, sous certaines conditions, être compétente pour des dirigeants d’Etats non parties.
Il n’y a en définitive aucune raison valable d’appliquer une « immunité » à Benyamin Netanyahou ?
Non. Il n’y a aucune raison de se demander s’il faut exécuter ou pas le mandat d’arrêt ou si l’immunité doit s’appliquer. Une fois que la chambre préliminaire de la CPI s’est reconnue compétente pour émettre ce mandat d’arrêt, il doit être appliqué par les Etats parties. Que ce soit à l’égard d’un autre Etat partie ou d’un Etat non partie. Point.
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Entendons-nous : l’immunité est reconnue dans le droit international. Mais c’est toute la justification de la CPI que d’échapper au régime des immunités. Comme d’autres Cours internationales, elle a été mise en place pour lutter contre l’impunité de ceux qui sont soupçonnés des pires crimes internationaux et qui, justement par leur immunité, pourrait échapper à la justice. Prétendre qu’une immunité peut être reconnue après un mandat d’arrêt devant la CPI, c’est un manque de connaissance juridique.
C’est aussi un précédent, sinon juridique, moral alors que Vladimir Poutine est aussi visé par un mandat d’arrêt de la CPI…
Mettre en cause une personne, c’est estimer qu’il y a des éléments susceptibles de l’impliquer dans un crime. On parle là des crimes les plus graves, ceux de masses contre des personnes, qui heurtent la conscience humaine. C’est pour ça qu’on a mis en place cette justice internationale.
Rappelons qu’une personne mise en cause peut se défendre et que la justice peut reconnaître qu’elle est coupable ou non. Des chefs d’Etat ont été condamnés, d’autres acquittés. Ceux en exercice peuvent même poursuivre leurs fonctions donc tout est fait pour ne pas troubler l’exercice politique. Donc essayer d’avoir des arguments techniques pour tenter de contrer ce processus, c’est une faute morale. D’autant plus que la France a déjà reconnu qu’elle appliquera ce mandat d’arrêt pour Vladimir Poutine. Il ne peut y avoir deux poids, deux mesures.
Notons tout de même que le ministre a déclaré qu’en dernier ressort, c’est à l’autorité judiciaire de décider. Heureusement nous avons des juristes brillants et les juges décideront certainement d’exécuter le mandat d’arrêt. Juridiquement, ce n’est donc pas un problème. Mais politiquement et moralement, ça n’est pas très habile.
« Immunité » de Netanyahou face à la CPI : « C’est un manque de connaissance juridique et une faute morale »© Copyright 2024, Le Nouvel Obs
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