Le projet est sur la table. Dans un entretien au Monde publié ce samedi 9 septembre, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a détaillé le projet du gouvernement pour l’avenir institutionnel de l’archipel après l’expiration des Accords de Nouméa et à la sortie de discussions tripartites inédites depuis quatre ans.
Les délégations indépendantistes et non-indépendantistes ont été reçues cette semaine à Matignon, à Beauvau et à l’Élysée : les deux camps n’avaient plus échangé directement sur l’avenir de l’archipel depuis 2019. En juillet dernier, le président de la République en déplacement à Nouméa avait échoué à réunir l’ensemble des forces, les indépendantistes déclinant son invitation.
« Il faut noter la bonne volonté de tous les acteurs et je les en remercie », déclare le ministre de l’Intérieur au Monde quand la présidence se félicite d’une semaine « constructive, marquant des avancées très significatives ».
Dans son interview, Gérald Darmanin déclare que le projet d’accord proposé par l’État prévoit « une modernisation des institutions de la Nouvelle-Calédonie », avec « des changements dans la répartition des compétences entre les trois provinces et le gouvernement », une élection du président « directement par le Congrès » et le fait que « le nombre d’élus des provinces au Congrès réponde aux évolutions démographiques ».
Le projet « réaffirme que la Nouvelle-Calédonie, restée française, garde un titre spécifique dans la Constitution, et que l’on ne touchera pas à l’accord de Nouméa de 1998 », poursuit le ministre. La citoyenneté néo-calédonienne, qui s’ajoute à la citoyenneté française, n’a donc pas vocation à changer.
En outre, il « propose un accord pour les élections provinciales de 2024 en dégelant le corps électoral dans certaines conditions plus conformes aux règles démocratiques générales ». Pour rappel, le corps électoral a été gelé sous la présidence de Jacques Chirac, en 2007, c’est-à-dire limité aux personnes résidant sur le territoire avant 1998. Cette disposition est depuis contestée par les loyalistes qui y sont défavorables. Après des années de refus, les indépendantistes ont accepté début juin le principe de son élargissement.
Concernant le droit à l’autodétermination, le projet « ne propose plus de date ou de durée pour l’atteindre », une « révolution » selon Gérald Darmanin, pour qui cela retire une « épée de Damoclès ».
Comme « base de départ, ouverte à la discussion », le gouvernement suggère « trois conditions à discuter » : l’éventuel futur projet serait proposé « par les Néo-Calédoniens eux-mêmes, au lieu d’une question binaire oui/non à l’indépendance », les « deux tiers du Congrès » devraient le voter et un « droit de pétition pourrait être créé, accessible à partir de 50 % du corps électoral ».
Le gouvernement veut aboutir à un accord d’ici la fin de l’année en vue d’une révision constitutionnelle début 2024. Le ministre de l’Intérieur doit revenir sur place fin octobre.
« Mais s’il n’y a pas d’accord, nous allons modifier le corps électoral pour tenir les élections provinciales : c’est une exigence démocratique », prévient le ministre dans cette interview.« Des indépendantistes et des non-indépendantistes se sont réunis par deux fois dans une même salle avec moi cette semaine, je compte sur la grande responsabilité des différentes parties face à l’histoire », ajoute-t-il.
L’objectif est d’arriver, « d’ici au 11 octobre », à « un document qui fasse un état des lieux des points d’accord et des points de désaccord », a précisé à l’AFP Sonia Backès, secrétaire d’État en charge de la Citoyenneté, présidente de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie et cheffe de file des Loyalistes.
Les discussions doivent également porter sur l’avenir de la filière nickel, pilier économique fragilisé de l’archipel, alors même que l’Europe et la France ont d’énormes besoins de ce métal pour fabriquer les batteries électriques automobiles.
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