Songkran en vitesse de croisière

Patrick Chesneau

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   En levée de rideau avant le spectacle intégral, les batailles d'eau géantes, avaient commencé très en amont du 13 avril. Ces pugilats en mode arroseur arrosé sont, bien évidemment, la marque déposée de l’événement le plus truculent de l’année au pays du sourire.

   Le nouvel an thaï est particulièrement imbibé.

   Dès hier, à Bangkok, Khaosan Road dégoulinait par la force des pistolets en plastique et de leurs munitions liquides. Des rangées de guerriers spécialisés dans l’aspersion et le tourniquet veulent en découdre comme s’il était question de mener une bataille pour la survie du genre humain reconverti en une espèce inédite de batraciens. Le plus souvent accompagnés d’inépuisables réservoirs portatifs autorisant la reconstitution d’épopées navales genre Trafalgar.

Depuis le début de ce dimanche, Silom affronte un déluge de force 7. Un goutte à goutte haute fréquence qui laisse tout le monde pantelant.

Des dizaines et des dizaines de milliers de citadins, souvent par nécessité d’emploi, avaient tenu à rejoindre il y a deux-trois jours déjà leurs provinces d'origine. 

   Sorte de rituel que le mot thrombose peine à décrire tant l’exode est massif.   Trains, avions, autobus, vans, voitures, tous les moyens de locomotion avaient littéralement été pris d'assaut. Tristement, Les routes sont, à pareille époque, le lieu d’hécatombes, inlassablement répétées. Sempiternelle statisque d’une sinistralité exacerbée. Mais rien ne semble devoir doucher l’allégresse d’un peuple en phase d’exaltation joyeuse. 

Pour le reste, le voyage est, certes, éprouvant. Mais on endure d'autant mieux le côté chaotique d’une telle pérégrination qu'au bout du périple, il y a les retrouvailles exubérantes avec la famille et tous ceux du village natal. Des régions comme l’Isaan font miraculeusement le plein. 

   La ruralité redevient subitement un aimant. 

   Comme de juste, la bière coule pour l’occasion dans une inflation d’hectolitres. Nécessité fait loi. Des norias de gosiers assoiffés exigent d’être humectés en continu.  Libations toujours enveloppées dans les flots tumultueux d’une musique stridente. On danse jusqu'à plus soif avant de s’emparer d’une énième canette. Sonos et déhanchements. Tradition oblige: Le Royaume ruisselle pendant trois jours. Partout, les contrées du bas Mékong sont trempées jusqu’à l’os, sourire en bandoulière.

Outre la vague d’allégresse submergeant le Royaume, l’édition 2025 de cette frénésie aqueuse revêt opportunément une valeur cathartique. Une grosse quinzaine après le tremblement de terre du 28 mars qui a stupéfié, tétanisé, choqué des millions de Thaïlandais, d’expatriés et de touristes, il faut noyer la peur. Les spasmes qui agitent les  cortèges détrempés doivent recouvrir le trauma. Circonvenir la frayeur de nouvelles secousses sismiques. Hypothétiques mais jamais exclues.

Les bains de foule sont aussi une résurrection. On pressent jusque dans les jeunes générations un désir de purification.  Effluve ludique des corps, ensemencement des âmes.

Alors, que l'on aime les ablutions niagaresques  ou que l’on préfère les cérémonies plus intimistes dans le cadre familial, il est une évidence:

   Le Nouvel An Thaï s'arrose.

   Jusqu'au 15 avril, Songkran synonyme de libération et d’abondance.

 

   Patrick Chesneau

 

   Remerciement photos:

   Chayut Kunsiritanan  The Nation

   Bangkok  Silom Road 

   Premier jour de Songkran

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