«Violation du droit international», «facteur de déstabilisation»… La communauté internationale s’insurge des déclarations de Trump sur Gaza

Ses propos ont ébahi la communauté internationale. Le président des Etats-Unis a affirmé au cours d’une conférence de presse mardi soir que «les Etats-Unis [allaient] prendre le contrôle de la bande de Gaza», pour «en être propriétaire à long terme». «Nous serons responsables du démantèlement de toutes les dangereuses bombes non explosées et autres armes. Tout raser, se débarrasser des bâtiments détruits.»

Le milliardaire a également promis de faire de Gaza «la Côte d’Azur du Moyen-Orient», afin de «créer un développement économique qui fournira un nombre infini d’emplois et de logements pour les habitants de la région». Pour les Gazaouis, il envisage la construction de «logements de qualité, des villes magnifiques», édifiés dans «quatre, cinq ou six zones […] en Egypte, en Jordanie». Ces déclarations fanfaronnesques n’ont pas manqué de faire réagir le reste du monde, des pays arabes, profondément choqués, à l’Europe, largement opposée aux volontés de Trump. Seuls les soutiens du président américain et l’extrême droite israélienne ont jubilé devant ces annonces.

Moyen-Orient

Palestine. Dans un communiqué officiel, Mahmoud Abbas, le président palestinien, a rejeté «fermement» le projet américain. Refusant pareillement tout déplacement des «Palestiniens hors de leur patrie», il a ajouté : «Nous ne permettrons pas que soient bafoués les droits de notre peuple.» Le dirigeant de l’opposition en Cisjordanie occupée, Mustafa Barghouti a rappelé que les «suggestions de Trump [étaient] en totale violation du droit international et représent [ai] ent un appel au nettoyage ethnique qui est un crime de guerre». Les propos présidentiels témoignent d’une «grave ignorance [de] l’histoire du peuple palestinien», a-t-il poursuivi, assurant que «tous les Palestiniens sans exception rejettent totalement les commentaires de Trump». Même son de cloche pour l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), dont le secrétaire général Hussein Sheikh a exclu mercredi tout projet de transfert. «Ici nous sommes nés, ici nous avons vécu et ici nous resterons», a-t-il tonné sur son compte X. «Notre peuple dans la bande de Gaza ne permettra pas que ces plans soient adoptés… Ce qu’il faut, c’est mettre fin à l’occupation (israélienne) et à l’agression contre notre peuple, et non pas l’expulser de sa terre», a également réagi Sami Abu Zuhri, l’un des dirigeants du Hamas.

Turquie. Le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan ne s’est pas montré moins indigné par la déclaration de Trump. «Expulser [les Palestiniens] de Gaza est une question que ni nous ni les pays de la région ne peuvent accepter. Il n’est même pas question d’en discuter», a déclaré le ministre lors d’un entretien à l’agence de presse turque Anadolu.

Egypte. Badr Abdelatty, le ministre égyptien des Affaires étrangères, a appelé ce mercredi à une reconstruction rapide de la bande de Gaza et demande que cela se fasse sans déplacement de ses habitants, «notamment en raison de leur attachement à leur terre et de leur refus de la quitter». Il a aussi précisé que l’Egypte était impatiente que l’Autorité palestinienne «assume ses responsabilités dans la bande de Gaza en tant que partie des territoires palestiniens occupés».

Jordanie. Le roi de Jordanie Abdallah II a rejeté ce mercredi «toute tentative» pour prendre le contrôle des Territoires palestiniens et déplacer ses habitants après l’annonce en ce sens du président américain. Lors d’une réunion avec le président palestinien Mahmoud Abbas, le monarque a souligné «la nécessité d’arrêter les activités de colonisation et de rejeter toute tentative d’annexion de terres et de déplacement des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie», selon un communiqué du Palais royal.

Arabie saoudite. Allié des Américains, le royaume a affirmé qu’il «poursuivra sans répit ses efforts pour un Etat palestinien», soulignant qu’il «n’établira pas de relations diplomatiques avec Israël sans cela».

Qatar. Le médiateur clé dans les négociations de cessez-le-feu à Gaza, est occupé par la deuxième phase de l’accord et a déclaré qu’il était trop tôt pour parler de la question des Palestiniens et des déplacements de population, a déclaré mercredi le porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères à Fox News. «Nous savons que les Palestiniens sont très traumatisés par les déplacements de population. Mais il est encore trop tôt pour en parler, car nous ne savons pas comment cette guerre va se terminer», a déclaré Majed Al-Ansari.

Emirats arabes unis. Le pays rejette catégoriquement toute tentative de déplacer les Palestiniens et de leur refuser leurs «droits inaliénables», a déclaré ce mercredi le ministère des Affaires étrangères des Émirats arabes unis dans un communiqué.

Iran. «L’Iran n’est pas d’accord avec un quelconque déplacement de Palestiniens», a déclaré un haut responsable du pays, faisant référence aux annonces de Donald Trump.

Afghanistan. Le projet du président des Etats-Unis est une «violation flagrante du droit international», ont déclaré les autorités talibanes. «Gaza fait partie intégrante du territoire palestinien et personne d’autre n’est habilité à déterminer le sort de ses habitants», ont-elles ajouté.

Europe

France. Dans un communiqué publié ce mercredi en fin de matinée, le ministère des Affaires étrangères a «réitéré son opposition à tout déplacement forcé de la population palestinienne de Gaza, qui constituerait une violation grave du droit international, une atteinte aux aspirations légitimes des Palestiniens, mais aussi une entrave majeure à la solution à deux Etats et un facteur de déstabilisation majeur pour nos partenaires proches que sont l’Egypte et la Jordanie ainsi que pour l’ensemble de la région». La France assure vouloir continuer à se mobiliser pour la mise en œuvre de la solution à deux Etats, «la seule qui puisse garantir la paix et la sécurité sur le long terme aux Israéliens et aux Palestiniens». Pour le ministère des Affaires étrangères, «l’avenir de Gaza doit s’inscrire non dans la perspective d’un contrôle par un Etat tiers mais dans le cadre d’un futur Etat palestinien, sous l’égide de l’Autorité palestinienne», précisant que le Hamas doit être «désarmé et n’avoir aucune part à la gouvernance de ce territoire.» «La France continuera de marquer son opposition à la colonisation, contraire au droit international, et à toute velléité d’annexion unilatérale de la Cisjordanie.»

Royaume-Uni. Le chef de la diplomatie britannique, David Lammy, a affirmé mercredi que les Palestiniens devaient pouvoir «vivre et prospérer» dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Le travailliste a toutefois reconnu que «Donald Trump a raison» sur un point : «Gaza est en ruines». Il a réaffirmé son soutien à une solution à «deux Etats», israélien et palestinien. Les Palestiniens «doivent pouvoir revenir chez eux. Ils doivent pouvoir reconstruire, et nous devons être avec eux dans cette reconstruction, sur le chemin d’une solution à deux États», a abondé le chef de gouvernement Keir Starmer.

Irlande. «La direction à prendre est très claire : nous avons besoin d’une solution à deux États, et les peuples de Palestine et d’Israël ont tous deux le droit de vivre dans des États sûrs, côte à côte, et c’est là que nous devons nous concentrer», a déclaré le ministre irlandais des Affaires étrangères Simon Harris, ajoutant que «toute idée de déplacer la population de Gaza ailleurs serait en contradiction flagrante avec les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.»

Allemagne. La bande de Gaza «appartient aux Palestiniens» et doit «tout comme la Cisjordanie et Jérusalem-Est» faire partie du «futur Etat palestinien», a martelé mercredi la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock. «La population civile de Gaza ne doit pas être expulsée et Gaza ne doit pas être occupée de manière durable, ou de nouveau colonisée», a-t-elle déclaré dans un communiqué.

Italie. Silence radio pour la présidente du Conseil, Giorgia Meloni, seule dirigeante européenne à avoir assisté à l’investiture de Donald Trump. Pour avoir une réaction, il fallait se tourner vers son ministre des Affaires étrangères, Antonio Tajani. «Je n’ai pas à commenter les déclarations, ce sont les faits qui comptent. Lorsqu’il y aura une proposition opérationnelle, nous la commenterons, mais il me semble qu’en ce qui concerne l’évacuation de la population civile de Gaza, la réponse de la Jordanie et de l’Egypte a été négative, donc cela me semble difficile», a commenté le chef de la diplomatie transalpin. «Nous sommes pour deux peuples, deux Etats, j’ai dit que nous sommes même prêts à envoyer des soldats italiens pour une mission de réunification de Gaza avec la Cisjordanie. Le gouvernement n’a pas changé d’avis», a-t-il ajouté, semblant marquer un désaccord avec la proposition de Washington.

Espagne. «Je tiens à être très clair sur ce point : Gaza est la terre des Palestiniens de Gaza et ils doivent rester à Gaza. Gaza fait partie du futur État palestinien que l’Espagne soutient et doit coexister en garantissant la prospérité et la sécurité de l’État israélien», a jugé le ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Albares.

Russie. Moscou estime qu’un règlement au Moyen-Orient n’est possible que sur la base d’une solution à deux États. «C’est la thèse qui est inscrite dans la résolution pertinente du Conseil de sécurité des Nations unies, c’est la thèse qui est partagée par l’écrasante majorité des pays impliqués dans ce problème. Nous nous en inspirons, nous la soutenons et nous pensons qu’il s’agit de la seule option possible», a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Asie-Océanie

Chine. Par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lin Jian, Pékin a affirmé ce mercredi avoir «toujours soutenu le fait qu’une gouvernance palestinienne sur les Palestiniens était le principe de base de la gouvernance d’après-guerre de Gaza et nous sommes opposés au transfert forcé des habitants de Gaza».

Indonésie. Le pays, qui compte la population musulmane la plus importante dans le monde, «rejette vigoureusement toute tentative de déplacer de force les Palestiniens ou de modifier la composition démographique du territoire palestinien occupé», a déclaré le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Australie. «La position de l’Australie est la même que ce matin et que l’année dernière. Le gouvernement australien soutient, sur une base bipartisane, une solution à deux États», a rappelé le Premier ministre australien Anthony Albanese.

Amérique

Brésil. «Ceux qui doivent veiller sur Gaza, ce sont les Palestiniens, qui ont besoin d’une réparation pour tout ce qui a été détruit afin qu’ils puissent reconstruire leurs maisons, leurs hôpitaux, leurs écoles et vivre dans la dignité et le respect», a réagi le président brésilien Lula. «Et où iront les Palestiniens ? Où vivront-ils ? Quel est leur pays ? C’est quelque chose de quasiment incompréhensible», a-t-il poursuivi. «Ce qui s’est passé à Gaza a été un génocide, et honnêtement, je ne sais pas si les Etats-Unis, qui sont impliqués dans tout cela [en référence à la politique américaine de soutien à Israël, ndlr] seraient les mieux placés pour s’occuper de Gaza», a-t-il tancé, répétant son engagement en faveur d’une solution à deux Etats.

Etats-Unis. Certains élus américains démocrates ont critiqué le plan avancé par le président. «Répétez-moi ça ?», a réagi le représentant Eric Swalwell (Californie) sur les réseaux sociaux. «Les Etats-Unis vont occuper Gaza ? Il ne nous avait pas promis la fin des guerres sans fin ?» Le sénateur Chris Murphy (Connecticut) a qualifié cette suggestion de «blague tordue». «Une invasion américaine de Gaza entraînerait le massacre de milliers de soldats américains et des décennies de guerre au Moyen-Orient», a-t-il prévenu. Il a également ajouté qu’il doutait de la réalisation d’une telle proposition, la considérant comme une distraction par rapport à d’autres coups de force de Trump à Washington. L’idée a aussi été qualifiée de «nettoyage ethnique» dans des déclarations distinctes du sénateur Chris Van Hollen (Maryland) et de la représentante Rashida Tlaib (Michigan). A l’inverse, l’administration Trump est, sans surprise, en bloc derrière son chef. Notamment le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio, qui a déclaré que Gaza devait être «LIBÉRÉE» du Hamas et que les Etats-Unis «sont prêts à prendre les devants». Le Floridien affirme que le plan annoncé par Trump vise à «instaurer une paix durable dans la région pour tous les peuples». Et de reprendre le slogan MAGA en l’appliquant à l’enclave palestinienne : «Make Gaza Beautiful Again.»

Israël

La nouvelle idée de Donald Trump fait des heureux en Israël. L’ex-ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, tête de gondole de l’extrême droite et colon ultranationaliste, a salué sur X la proposition du président américain. «La seule solution pour Gaza est d’encourager l’émigration de la population de Gaza. Quand je l’ai dit à plusieurs reprises pendant la guerre, les gens se sont moqués de moi. Maintenant, c’est clair : c’est la seule solution au problème de Gaza.» Et de singer Humphrey Bogart dans Casablanca : «Donald, cela ressemble au début d’une belle amitié». Autre figure de l’extrême droite israélienne, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a de son côté promis sur Telegram de tout faire pour «enterrer définitivement» l’idée d’un Etat palestinien : «Le plan présenté hier par le président Trump est la véritable réponse au 7 octobre. […] Nous allons maintenant œuvrer pour enterrer définitivement l’idée dangereuse d’un Etat palestinien.»

Benjamin Nétanyahou, lui, se trouvait aux côtés du président américain mardi soir à la Maison blanche. Contenant difficilement son ravissement, le Premier ministre israélien semblait ne pas en revenir non plus – même venant de Trump, qu’il présente comme «le meilleur ami qu’Israël ait jamais eu à la Maison Blanche». «Parmi mes trois objectifs [avec la destruction du Hamas et la libération de tous les otages, ndlr], le but est de s’assurer que Gaza ne représente plus jamais une menace pour Israël. Le président Trump va beaucoup plus loin. […] Il voit un avenir différent pour ce morceau de terre qui a été au centre de tant de terrorisme, de tant d’attaques contre nous, de tant d’épreuves et de tribulations. […] Je pense que c’est quelque chose qui pourrait changer l’Histoire.»

Toutefois, le député israélien Ayman Odeh, en faveur d’une solution à deux Etats, a fustigé l’idée de Trump. «Un transfert n’aura pas lieu et n’apportera pas la sécurité», a-t-il écrit sur X. «Les deux peuples - palestinien et juif - trouveront un moyen de vivre côte à côte, dans un État à côté d’un État, dans la paix et la mutualité. Aussi loin que possible de la vision kahaniste [qui prône l’expulsion des Palestiniens, ndlr] de Trump et de Nétanyahou», qualifiant les deux dirigeants de «populistes».

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  • Asé pléré, annou édiké !  

    Autre petit exemple "d'enfant-gâtisme" pervers.

    Nuit noire

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    SEUL LE COMMENTTEUR FRENETIQUE...

    Albè

    08/02/2025 - 07:28

    ...de ce site, le dénommé "Nuit noire", y sera admis selon une information confidentielle de l'AF Lire la suite

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    Albè

    08/02/2025 - 07:26

    T'as complètement oublié le Grand Amin Dada, mon gars ! Lire la suite