Le nombre de contrôles d’identité a bondi, les « jeunes arabes, noirs ou maghrébins » premières cibles

La Défenseure des droits s’alarme de ces discriminations qui génèrent « une érosion de la confiance »

C’est une vaste enquête, qui avait déjà été menée en 2016 par l’institut Ipsos. Renouvelée l’an dernier, elle visait à interroger un panel représentatif de la population au sujet des contrôles d’identité menés par les forces de l’ordre. Avez-vous été contrôlé cette année ? Pour quel motif ? Avez-vous confiance en les forces de l’ordre ? Pendant plus de trente minutes, les personnes sondées ont dû répondre à un paquet de questions au sujet de leur rapport avec les policiers et gendarmes.

Résultat ? « 26 % des personnes interrogées ont déclaré avoir été contrôlées par la police ou la gendarmerie au moins une fois au cours des cinq dernières années », révèle le rapport de la Défenseure des droits. Un chiffre en hausse de 10 points par rapport à l’enquête de 2016. Faut-il trouver cela rassurant pour notre sécurité ou s’inquiéter de cette progression ? Difficile à dire. D’autant que cette hausse pourrait être liée aux confinements, aux couvre-feux ou aux nombreux mouvements sociaux.

Ce qui préoccupe davantage la Défenseure des droits, c’est la persistance des discriminations, qui génèrent une « érosion de la confiance » envers l’institution policière. Cela est susceptible de mener à « une escalade des tensions ». D’après cette même enquête dévoilée ce mardi, seulement 50 % de l’ensemble des répondants se disent « confiants ou rassurés en présence des forces de sécurité », souligne la Défenseure des droits Claire Hédon. D’autant que tout le monde n’est pas égalité face au contrôle d’identité. Les 18-24 ans représentent 41 % des individus contrôlés.

Mais là aussi, tous les jeunes ne sont pas à égalité. D’après le sondage, 39 % des personnes contrôlées sont perçues comme « arabes, noires ou maghrébines ». Un chiffre qui tombe à 23 % pour les personnes « blanches exclusivement ». Les hommes noirs ou arabes auraient ainsi vingt fois plus de chance de se faire contrôler.

Plus de 30 millions de contrôles par an

Les services de police et de gendarmerie procèdent chaque année en France à quelque 32 millions de contrôles d’identité (hors contrôles routiers), selon une estimation de la Cour des comptes en 2023. Des contrôles que les forces de l’ordre jugent elles-mêmes « peu ou pas efficaces ». Selon le député Nupes Benjamin François, il faudrait instaurer « un récépissé de contrôle d’identité pour mettre fin aux contrôles discriminatoires ».

La Défenseure des droits s’étonne que dans la moitié des cas, le motif du contrôle ne soit pas explicité. Et qu’une personne sur cinq se plaint d’un « comportement inapproprié » de la part des policiers et gendarmes (tutoiement, insultes, provocations, brutalités). « J’ai la conviction que le contrôle de la déontologie, la transparence de la police et la gendarmerie et le dialogue constituent les meilleures voies pour renforcer ou restaurer la confiance », a plaidé Claire Hédon. On notera également que, 21 % des personnes interrogées ont déclaré avoir essuyé un refus de dépôt de plainte.