C'est soit...soit...

   L'attitude des Français envers les Békés depuis quatre mois a de quoi plonger les Martiniquais, du moins ceux qui réfléchissent, dans une profonde perplexité.

   En effet, l'Etat français a toujours soutenu les Békés, d'abord pendant la période esclavagiste (sauf au moment de la Révolution française qui avait aboli l'esclavage en 1793, chose qui avait poussé les Békés à faire appel à l'Angleterre pour occuper l'île). A l'abolition de 1848, l'Etat français avait grassement dédommagé les Békés de la perte de leurs esclaves. Puis, de cette date jusqu'à février 1974, le même état n'a jamais hésité à envoyer ses gendarmes ou gardes-mobiles pour mater les grèves sur les plantations ou dans les usines à sucre (comme au François en 1901). Bref, Békés et Etat français ont toujours marché main dans la main !

   Or, depuis qu'a éclaté, il y a quatre mois, le mouvement contre la vie chère en Martinique, on assiste à une sorte de retournement de situation : l'Etat français semble avoir lâché les Békés. Le Ministre des Outremers, Manuel Valls, dénonce même les oligopoles, sans nommer personne, et les rend responsables de la situation actuelle, mais on voit très bien contre qui sa flêche est lancée : le Groupe GBH. Dans le même temps, une campagne de presse anti-Békés se développe dans les médias français et des avocats, hexagonaux pour certains d'entre eux, montent au créneau pour exiger que GBH publie ses comptes. 

   Bref, c'est l'hallali !

   Or, la France n'est pas dirigée par l'extrême-gauche que l'on sache. Pourquoi alors ce brusque désamour ?

   En y réfléchissant, on ne voit que deux explications et uniquement deux :  

   . soit l'Etat français fait semblant. Il dit secrètement aux Békés : "Je suis obligé de vous pointer du doigt vu la situation. Mais ne vous en faites pas, les choses sont sous contrôle ! D'ailleurs, les manifestants ne réclament pas l'indépendance de la Martinique. Rien à voir avec les Kanaks et leur FLNKS qui ont exigé de devenir indépendants le 25 septembre 2025. En Martinique, l'un des leaders du mouvement a juste parlé une fois d'"autonomie totale". Ce qui ne veut rien dire d'autant qu'en 2010, les Martiniquais avait rejeté par 80% des suffrages une sorte d'autonomie partielle avec l'Article 74. Donc, chers amis Békés, pas de panique ! D'ici deux ou trois mois les choses renteront dans l'ordre mais comprenez qu'entre temps, on est obligé de vous donner quelques coups de griffe".

   . soit l'Etat français est sérieux. Et si jamais c'est le cas cela signifie que des groupes capitalistes de l'Hexagone ont décidé de s'emparer du marché de l'Outremer soit environ 2,5 millions de consommateurs, et donc d'en chasser les Békés. Sutout le plus puissant d'entre ces derniers qui au lieu de se contenter de sa seule ile, la Martinique, a investi la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion, la Nouvelle-Calédonie et Mayotte. Ce qui lui a permis ensuite de s'installer dans une douzaine de pays étrangers tels que Saint-Domingue, le Maroc, la Côte d'Ivoire etc... Trop c'est trop ! Il faut les faire rentrer dans les rangs, ces Békés, et les remettre à leur place de simple boutiquiers insulaires.  

    C'est donc...soit...soit... Il n'y a pas de troisième hypothèse.

    Ce qui est triste pour les Martiniquais, c'est que quelle que soit celle des deux hypothèses qui est vraie ou s'avérera vraie, ils n'y auront rien à gagner. RIEN !

     Peut-être que quand ils le comprendront, ils arrêteront leurs gesticulations et autres afrocaribéâneries et se résoudront (pacifiquement) à suivre le chemin de Sainte-Lucie, Grenade, Barbade, l'île Maurice etc... C'est-à-dire s'assumer pleinement et sans haine de l'ex-colonisateur. Personne dans ces iles ne déteste les Anglais !