Socrate 10 : Ma part d'Afrique dans ma Créolité

Hector Poullet

C’est le mercredi 2 mars à 9 h que nous avons été reçus au ministère des affaires culturelles du Bénin pour un échange avec une vingtaine  d’invités béninois du milieu universitaire.  J’avais préparé une introduction liminaire dans laquelle je comptais d’abord présenter la Guadeloupe à nos hôtes, non pas sous un aspect géographique, ni  historique, ni même donner un aperçu économique, mais plutôt laisser entrevoir notre dilemme d’insulaire, antillais,  produit d’une certaine colonisation à la française dite de l’ « assimilation » ;  introduction que j’intitulais  « Poétique de la Rencontre », clin d’œil à  la « Poétique de la Relation » de E. Glissant.

La veille de cet échange, au cours d’une conversation amicale avec celui qui nous avait invités, j’avais compris que dans ce genre de rencontre officielle,  tout est réserve, que je ne pouvais pas me laisser aller à remercier trop l’un par rapport à l’autre,  ni prendre le risque de heurter  par mes propos quelque possible susceptibilité.  D’ailleurs, Florent Couao-Zotti, écrivain béninois bien connu, qui était chargé de nous présenter et de conduire le débat ne m’en a pas laissé l’occasion. Je n’ai pas eu le loisir de commencer une quelconque introduction, c’est lui qui m’a posé d’entrée de jeu une question qui signifiait qu’il décidait le sujet du débat :

  • Monsieur Poullet dites-nous depuis huit jours que vous êtes au Benin, avec un groupe de visiteurs venus de Guadeloupe,  quel est votre ressenti  personnel de ce retour aux sources ?

Voilà, pour l’atmosphère d’un échange qui a duré une bonne heure, quant au contenu j’ai bien pu aborder quelques aspects de ce qu’on peut trouver d’Afrique dans notre langue créole, du vocabulaire avec des mots comme ago, abobo, agoman, moun, ou dans le comportement, comme le rire, le gout pour la musique et pour la danse, la gestuelle, mais également pour la quête spirituelle….et puis le gout pour les contes avec nos yékrik ! yékrak !

De là je suis passé à dire deux contes se rapportant au Dieu colonial ; celui du Colibri, pour laisser comprendre la résistance des « esclaves », et celui de l’invitation au ciel  faite par le Bon Dieu, au Blanc, au Mulâtre et au Nègre.

Il s’en est suivi un échange très fructueux avec le public. Public dans lequel nous avons découvert, une Martiniquaise, une Guadeloupéenne fille de Roger Thoumson,  un spécialiste du Vodoun, mais également un grand  professeur d’université qui a suggéré la création d’une chaire autour de la Créolisation au sein de  l’Université de Cotonou : idée à creuser.

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